Pédro a écrit :
Pourquoi votre conception devrait se substituer aux travaux de nombreux chercheurs qui ont travaillé sur le sujet sur un seul argument de complexité?
Parce que sur ceux que j'ai lus, et j'en ai lu quelques uns, ça part dans tous les sens et ça ne me satisfait pas.
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Je rappelle par exemple que l'Italie Fasciste est souvent considéré comme un totalitarisme "inachevé" alors que son régime possède nombre de caractère typique de ces régimes. Je crois qu'il est difficilement transposable et à trop le généraliser on risque de perdre la substance d'une mécanique du pouvoir dont les effets sont particulièrement significatifs.
C'est pour l'Italie fasciste que l'adjectif "totalitario" a été lancé par Giovanni Amendola. "Inachevé" (ou "partiel" ou "modéré", etc.), ça me parait juste. Mais pourquoi est-il si difficile ou si rare de préciser par des adjectifs ou compléments ce qu'on souhaite dire en utilisant le mot ?
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Il ne me semble pas que l'Histoire ait une quelconque vocation prophétique...
Le concept de
totalitarisme n'appartient pas qu'à l'histoire.
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Pour en venir un peu à l'intention des régimes totalitaire le juriste nazi Ernst Forsthoff expose assez clairement les buts et les modalités du pouvoir dans un Etat totalitaire, et même s'il est évident que les système politique n'avaient pas les moyens de leur politique de contrôle cela est assez notable pour être rappelé :
"L'Etat totalitaire doit être un Etat de la responsabilité totale. Il requiert de chacun l'accomplissement total de son devoir envers la nation. L'accomplissement de ce devoir supprime le caractère privé de l'existence individuelle. Dans son action publique comme dans le cadre de sa famille ou de la communauté domestique, chaque individu est responsable du destin de la nation. Ce qui est important, ce n'est pas que l'Etat donne des ordres et des lois jusque dans les plus petites cellules de la vie du peuple, mais qu'il peut là aussi demander des comptes à tout individu qui ne subordonnerait pas entièrement son destin personnel à celui de la nation. Cette exigence de l'Etat totalitaire posée à chaque citoyen représente la nouvelle essence de l'Etat."
C'est intéressant, mais ce n'est pas une définition, c'est un ensemble de tendances ou de conséquences. Il y aurait d'ailleurs de quoi ergoter pour le stalinisme.
Citer :
La notion d'Etat qui ne cesse d'être répétée tout au long de ce texte cadre bien le sujet central de cette question ; le totalitarisme concentre les forces d'agir du système ; tout procède de lui et s'y dilue. Ce n'est pas la société dans son ensemble qui fait corps autour d'un concept et l'Etat, ou tout du moins les autorités publiques qui arbitrent, c'est l'Etat qui est acteur et ordonne. Cela se prolonge avec la mise en place d'une police secrète qui fait planer sur la société l'angoisse de l'espionnage et de la dénonciation. De là se développe un autre aspect du totalitarisme, la question de la terreur, sur laquelle il me semble que Hannah Arendt a particulièrement insisté de façon tout à fait pertinente. Or pour établir la terreur faut-il encore en avoir les moyens. Ce texte de Carl Joachim Friedrich est assez explicite sur la question des moyens :
Idem, en tant que tendances globales, je veux bien, mais c'est trop pour une définition ! Et si on ne commence pas par une définition j'ai du mal à croire qu'on arrivera quelque part.
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"Une idéologie millénariste officielle ; un parti unique à base de masses et direction élitaire, dominant la bureaucratie d'Etat ou liée à elle ; le monopole des moyens de combat ; le monopole des moyens de communication ; le contrôle policier terroriste, c'est à dire qui définit lui-même arbitrairement les adversaires. Ces cinq monopoles caractéristiques n'avaient jamais été réunis par aucun régime du passé. Les trois derniers n'ont été rendus possible que grâce au progrès technique ; les deux premiers grâce au progrès général de l'éducation qui a développé le besoin de certitude absolue, déjà créé en l'homme par le christianisme et la démocratie."
Ce que je trouve fort dans cette analyse c'est que le totalitarisme apparaît comme une forme de gouvernement dérivant d'un contexte particulier ; celui de la modernité. C'est un peu le sens de certaines dystopie comme 1984 ou V pour vendetta. A partir d'un moment de l'Histoire certains caractères des sociétés que ce soit dans l'ordre technique ou idéologiques rendent plus probable la mise en place de ce type de gouvernement que dans les sociétés passées.
Trop pour une définition. Si je lis ça au premier degré (mais ai-je bien compris ?), l'idéologie millénariste semble être un moyen parmi d'autres, la finalité devenant floue pour le coup. Un but en soi ? Ou quoi d'autre ?
Et pourquoi ne pas parler de "
totalitarisme moderne", par exemple ? Parce que si le concept ne sert que pour deux cas, et encore imparfaitement, je n'y vois pas grand intérêt.