En tout cas, dans la première moitié du XXème siècle, les relations franco-anglaises sont tendues.
Il y a des tensions coloniales au tournant des deux siècles et jusqu'à la Première Guerre mondiale car le principal souci géopolitique de l'empire de Sa Majesté est de s'établir de par le monde et d'obtenir le contrôle des mers. En Europe, il faut, selon la géopolitique britannique du début du siècle, empêcher la formation d'un ensemble eurasiatique en plaçant dans une lutte à mort et sans issue la Russie et l'Allemagne. Il y a donc un double jeu, qui pousse, parfois, à s'allier à la France pour s'opposer à cette construction d'une Eurasie menaçante et, parfois, à s'opposer à la France pour entreprendre la conquête d'espaces extra-européens et étendre l'influence britannique.
Il y a une permanence de ces tensions dans les discussions inter-alliées de la Première Guerre mondiale (Voir une autre discussion engagée sur le sujet sur le forum, en ce qui concerne surtout la Seconde Guerre mondiale) et l'alliance avec l'allié russe est plus un concours de circonstances. D'ailleurs, l'Angleterre s'entend très vite pour envoyer des troupes soutenir le régime impérial déchu et les armées blanches lorsque les Soviétiques déstabilisent définitivement l'un des deux piliers de leur géopolitique européenne. De même, dans les négociations de fin de guerre (Voir Soutou), l'Angleterre ne cherche pas la fin de l'empire allemand mais simplement sa défaite : les discussions austro-anglaises sont vraiment éclairantes à ce sujet.
Après l'effacement, tout relatif, des tensions pendant la guerre, l'entre-deux-guerres montre un regain de ces tensions franco-anglaises parce que l'Allemagne, "l'ennemi héréditaire" paraît vaincu. Il s'agit, maintenant, de se confronter à un autre adversaire, la Perfide Albion, engagée dans une lutte pour contrôler les colonies lointaines, engagée encore dans un combat sur la question des réparations de guerre et sur l'influence française en Europe, notamment en Allemagne (militairement) et en Europe centrale (économiquement). La menace hitlérienne permet de réunir la France et l'Angleterre, d'abord dans une tentative de sauver la paix (en s'alliant à l'Italie autour du milieu des années 1930) puis dans une tentative de sauver l'ordre européen (en s'alliant pour sauver la Pologne en 1939, en s'alliant, enfin, pour sauver ce qu'il reste de la France après la débâcle de 1940), et la question de l'union franco-anglaise, c'est-à-dire la fusion des deux entités politiques, à ce moment décisif de la guerre est l'exemplification parfaite de cette réunion des deux puissances autour d'une lutte commune.
Il y a, sur cette première moitié de siècle, l'impression que les deux puissances se concurrencent dans le contrôle de l'Europe et dans le contrôle des espaces coloniaux, l'idée, encore, que toute opposées qu'elles soient, ces deux puissances européennes parviennent à s'allier face à des crises menaçant leur stabilité (Première Guerre mondiale, Seconde Guerre mondiale) mais que la moindre ouverture vers une ère de renouveau relance les rivalités (Tensions au Proche-Orient après la Première Guerre puis la Seconde Guerre mondiales, Rivalités économiques dès décembre 1918).
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