Jadis a écrit :
c'est le fait que Ghandi n'ait pas été capable d'endiguer ce phénomène de haine, qu'il n'ait pas su tenir ses troupes, appeler ses "lieutenants" à un dialogue plus pacifique. Ce qu'il faut interroger, c'est l'origine de cette incapacité : était-il naïf, était-il trop confiant dans ses "lieutenants", voulait-il fermer les yeux sur des sortes de soupapes de l'opinion ?
Je m'autorise à penser que Gandhi était simplement devenu très certain de lui. Ceci n'est pas un jugement mais simplement le fruit d'un comportement qui jusqu'ici n'avait donné aucun échec.
Tant le bon comme dans le mauvais, l'être humain s'habitue : c'est réflexe. Gandhi s'est habitué à contrer les Anglais par un message, un chemin nouveau auquel il était le seul à croire. Il en a payé le prix mais a réussi. Ceci crée parfois une augmentation de la foi en soi, dans le message et un sentiment d'invincibilité voire -dans les moments de méditation, une culpabilité- d'où une recherche de martyr (expiation de l'orgueil et/ou de la vanité ressenti devant "les fidèles" ---> culpabilité).
Il s'est trouvé "débordé" à un certain niveau dans les échanges et il ne pouvait "voir" ou "accepter" un quelconque blocage.
Comme "fermer les yeux" s'inscrit dans son cheminement (on peut voir ceci comme une opposition pacifique), il a continué son schéma, celui là même qui l'avait conduit à une certaine victoire.
En se faisant, il n'abusait que lui : du moins le croyait-il. S'il avait survécu à son attentat, il aurait été alors obligé de soulever la question de la violence, de la scission, de l'intolérance, de marqueurs de liberté dans la mesure où il aurait été obligé de négocier pied à pied avec la faction musulmane. Il avait atteint ses limites mais ne voulait ni le voir ni l'entendre. On peut ainsi comprendre le pourquoi de son manque de vigilance quant à sa personne ce qui inquiétait son entourage. Je pense que cette fin était souhaitée, c'est un aboutissement : on peut le remarquer chez d'autres personnes prônant la tolérance où se sentant "messager" d'un idéal quel qu'il soit. Souvent la fin est violente et si l'on cherche un peu dans le parcours, on trouve souvent un bloquage dans l'analyse et/ou dans l'échange et/ou une transgression (Jésus, M. Luther King, Malcom X, Mandela, Jean Paul II etc.). J'ajouterais des personnages comme Guevara ou Jean Moulin et d'autres qui -à un moment donné- "décrochent" et semblent, avec une inconscience incroyable précipiter leur fin tout en entretenant une lucidité peu commune.
La "Gandhi" de la fin est déifié de son vivant. Il accepte ce qui n'est ni plus ni moins qu'une forme de culte de la personnalité. Arrivé à ce stade, se remettre en question ou se retirer tient de l'impossible. Ainsi, certaines personnes reconnues comme "positives" arrivent à devenir un frein dans une évolution quelle qu'elle soit.