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Message Publié : 08 Juil 2009 12:05 
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Salluste
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Inscription : 11 Mai 2009 20:59
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Je vais tout de suite lever le quiproquo : l'ai parlé de ce que je connaissais mais c'était pour amorcer la discussion sur toutes les châtaigneraies. On parle souvent d'une civilisation de la châtaigne. Il serai intéressant de comparer les exemples entre eux pour voir si il y a convergence entre elles. Par ce post je souhaitais vous y inviter. Je vois que vous êtes venu même si vous n'aviez pas compris que la porte était ouverte. C'est très bien ainsi mais je vais encore préciser que ce sujet n'est pas géographiquement limité mais ouvert.
Deuxièmement je voulais aussi souligner un point : c'est que l'aire culturelle de la châtaigneraie dominante est plus limitée que ce que l'on pense d'habitude.

Quand à votre question, je vais bien la lire et essayer de la reformuler pour tenter d'y répondre ou pour ouvrir la discussion.
J'apprécie personnellement que ce sujet fasse l'objet d'un questionnement très élaboré. ;)


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Message Publié : 08 Juil 2009 12:13 
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Salluste
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Inscription : 11 Mai 2009 20:59
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Je vais répondre rapidement : non. La culture technique est importante. Des communautés paysannes n'ont pas forcément la culture pour mettre en valeur des vergers de châtaigniers. D'autre part les structures foncières ne s'y prêtent pas toujours. On peut les contourner par la propriété arboraire mais c'est toujours limite.
Contre exemple typique : en Estremadura, on a des systèmes pastoraux notamment porcins sous chênaies : la dehesa. Rien de cela dans l'aire italique. Pourquoi?
Ensuite en fonction des systèmes agraires un même milieu n'aura pas forcément la même valeur qu'un autre. En région méditerranéenne un sol humide c'est une bénédiction. En région océanique c'est une mouillère où on n'entre que rarement seulement pour y mettre les génisses ou les vaches vides.
Prendre une échelle aussi vaste que la France, c'est un peu aussi se donner des difficultés car les conditions écologiques et les conditions culturelles y sont par trop différentes. Il faudrait raisonner déjà par régions oro-climatiques pour bloquer certains facteurs de variations. Par exemple l'Ouest, la montagne alpine, le bassin parisien, la montagne méditerranéenne, etc...


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Message Publié : 08 Juil 2009 13:26 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 18:37
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Citer :
Ensuite en fonction des systèmes agraires un même milieu n'aura pas forcément la même valeur qu'un autre. En région méditerranéenne un sol humide c'est une bénédiction. En région océanique c'est une mouillère où on n'entre que rarement seulement pour y mettre les génisses ou les vaches vides.
Prendre une échelle aussi vaste que la France, c'est un peu aussi se donner des difficultés car les conditions écologiques et les conditions culturelles y sont par trop différentes. Il faudrait raisonner déjà par régions oro-climatiques pour bloquer certains facteurs de variations. Par exemple l'Ouest, la montagne alpine, le bassin parisien, la montagne méditerranéenne, etc...


Ben ça dépend. Les besoins sont toujours les mêmes, les différences vont porter sur l'éventail des solutions dont on dispose. Typiquement, vous parlez des sols humides. Dans le raisonnement de mon post précédent, l'eau est un besoin agricole - pour les animaux, pour la croissance des végétaux. Quand on en a partout en abondance, voire surabondance, hop à dégager, ce n'est plus le critère qui servira à classer les parcelles. Que peut-on faire de cette parcelle au sol profond et humide ? Dans l'Ouest, ce n'est pas la plus propice à la culture : on en a, à dispo, d'un peu moins humides, qui donnent mieux. Hop ! à dégager. On plantera le blé ailleurs. Finalement, qu'est-ce qu'elle donne d'autre et qu'aucune autre parcelle ne fasse mieux ? Pas grand-chose : on l'utilise donc comme prairie pâturée. Dans le Midi, tout change ! ce sol profond et humide, c'est ce qu'on a de mieux pour planter ce qu'on espère planter.
Donc, évidemment un même milieu n'a pas la même valeur partout : tout dépend de comment il se classe par rapport aux milieux dont dispose l'exploitant/la communauté pour répondre à une liste de besoins, pris au sens le plus large, ce qui fait qu'ils sont à peu près les mêmes partout. Ce qui change, ce sont les solutions disponibles : les milieux et le savoir-faire pour les exploiter, comme les cartes dans la main d'un joueur.
Donc ! Je veux de la farine : j'ai quoi à ma disposition ? Ai-je des sols assez profonds, humides et alcalins pour des céréales ? je les y consacre, la farine, le pain c'est le besoin numéro un... Je n'en ai pas ? je prends les parcelles les moins pires... et si le châtaignier, qui donne de la farine aussi, pousse allègrement, bien mieux que le seigle ? va pour le châtaignier.
Le hic à cette théorie, ce pourquoi je cherche à savoir plus, ce sont les régions où le châtaignier pousse mieux que le seigle et où pourtant on s'est acharné sur le seigle.
Ce que je ne sais pas, c'est s'il existe des régions où il aurait été au moins aussi rentable de jouer la carte céréales plutôt que châtaigneraies.

Pour le premier point, vous me répondez
Citer :
Des communautés paysannes n'ont pas forcément la culture pour mettre en valeur des vergers de châtaigniers.


Mais au fil des siècles, si le sol est décidément peu propice aux céréales, même au seigle, ne vont-elles pas finir par la développer, cette culture ?


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Message Publié : 08 Juil 2009 13:31 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Inscription : 23 Oct 2004 9:14
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Localisation : village des Pyrénées
Un élément important dans votre discussion, particulièrement intéressante : le délai entre mise en culture et récolte.
Dans le cas des céréales comme le seigle, le délai est de quelques mois.
Dans le cas d'arbres comme le châtaignier, il est de plusieurs années.
Donc, même si la perspective de rendement est meilleure, il faut avoir le temps et la volonté d'attendre (surtout si risque de disette).
Ce choix est d'ailleurs universel en économie : c'est le choix d'investir ou pas.

_________________
"La vie des hommes qui vont droit devant eux, renaitraient-ils dix fois en dix mondes meilleurs, serait toujours semblable à la première. Il n'y a qu'une façon d'aller droit devant soi." (Pierre Mac Orlan)


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Message Publié : 08 Juil 2009 13:53 
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Inscription : 15 Avr 2004 22:26
Message(s) : 15790
Localisation : Alsace, Zillisheim
Cuchlainn a écrit :
Mais au fil des siècles, si le sol est décidément peu propice aux céréales, même au seigle, ne vont-elles pas finir par la développer, cette culture ?


Dans certains cas, on a besoin d'un "précurseur", un homme qui se dit que ça pourrait marcher. Ainsi, un Alsacien du XIXème siècle soldat en Algérie, voit la culture des asperges dans un sol léger et sablonneux. Il se dit que ça devrait marcher sur certaines terres ingrates de son village au bord du Rhin au nord de Strasbourg. Rentré chez lui avec quelques plants, il tente l'expérience. Au bout de quelques tâtonnements, la culture des asperges se relève prolifique au bord du Rhin. Là-dessus, l'Allemagne envahie l'Alsace, et la culture des asperges se répand aussi sur la rive badoise du Rhin. C'est pour cela qu'en avril-mai, on déguste de succulentes asperges sur les bords du Rhin. Si cette personne n'avait pas été en Algérie, s'il n'avait pas été aussi curieux, s'il n'avait pas eu l'idée de transplanter des asperges chez lui, si ...

Des exemples comme cela, il y en a pas mal. Des nobles, des notables, mais aussi de simples particuliers ont laissés leurs noms pour avoir réussi (ou parfois raté, mais c'est plus rare que l'on mette en avant des échecs) la transplantation de telle espèce d'un terroir à l'autre.

Ainsi, a qui doit-on l'implantation de la vigne en Bourgogne au premier siècle de notre ère. Quel entrepreneur est à l'origine de cet essais qui a profondément changé le paysage de cette région ? http://www.enviscope.com/16775-Gevrey-Chambertin-vigne-antique.html

Mais, aussi, sans ces personnes, la terre peut être favorable à l'implantation d'une culture spécifique, mais il faut une volonté pour que cette implantation ai lieu.

_________________
Une théorie n'est scientifique que si elle est réfutable.
Appelez-moi Charlie


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Message Publié : 08 Juil 2009 14:09 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 18:37
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Dédé a écrit :
Un élément important dans votre discussion, particulièrement intéressante : le délai entre mise en culture et récolte.
Dans le cas des céréales comme le seigle, le délai est de quelques mois.
Dans le cas d'arbres comme le châtaignier, il est de plusieurs années.
Donc, même si la perspective de rendement est meilleure, il faut avoir le temps et la volonté d'attendre (surtout si risque de disette).
Ce choix est d'ailleurs universel en économie : c'est le choix d'investir ou pas.


Mais ce n'est pas forcément à la place des céréales qu'on "cultive" le châtaignier. On va se retourner vers le spécialiste : à l'origine, comment ça commence ? Je suppose qu'on a des colons qui défrichent dans une région boisée où le châtaigner est bien présent, constatent que le seigle pousse à reculons, complémentent leur maigre ordinaire avec de la châtaigne, et finalement se mettent à favoriser le châtaignier dans les forêts jusqu'à transformer certaines parcelles en véritables vergers, et éventuellement ensuite on remplace les champs de céréales décidément sans intérêt par de nouveaux vergers ?
On ne part pas de zéro, on a au départ des châtaigniers sauvages, et ses propres cultures de céréales.


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Message Publié : 08 Juil 2009 14:15 
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Salluste
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Inscription : 11 Mai 2009 20:59
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Il y a deux réponses pour le châtaignier dans le sens où c'est une culture arboricole :
- Il y a eu une politique de plantation obligatoire car c'est coûteux et lent à avoir un retour sur investissement.
- Le précurseur c'est donc la puissance publique.

Mais le raisonnement est plus complexe pour toutes les autres cultures et pour des communautés paysannes. Parce qu'un changement de culture c'est le bout de la ficelle qu'on tire : changement de dates des opérations techniques, changement d'outillage, changement de pics de main d'oeuvre, changement de rotations, changement des périodes d'interculture, changement d'assollement, changement d'organisation du transfert de la fumure vers la sole cultivée etc...
C'est pas si simple que ça car une culture s'insère dans un ensemble de cultures, dans un système. Plusieurs cas de figure peuvent se rencontrer qui empêche l'adoption d'une culture :
: La nouvelle culture amène à opérer des interventions techniques à un moment déjà surchargé en travail, ce qui n'était pas le cas de l'ancienne.
La nouvelle culture entraîne l'adoption de nouveaux outils, voire l'obligation de passer à la traction attelée (ai je les boeufs, la surface fourragère pour leur nourriture etc...)
La nouvelle culture s'insère mal dans les rotations existantes
La nouvelle culture se séme trop tôt par rapport au précédent cultural, ou se récolte trop tard par rapport au successeur cultural. On risque de perdre un an. Ou plus soft mais tout autant dangereux : la récolte de la nouvelle culture fait tomber les semis du successeur en période impraticable (pluie, etc...)
Du coup, mon assolement devient biennal au lieu de triennal ou autre
Mais alors je ne peux plus gérer la vaine pâture ou le transfert de fertilité depuis les forêts.
La nouvelle culture ne se prête pas à l'élevage concomitant (le châtaignier par exemple).


Un système agraire c'est un équilibre dynamique très cohérent qui n'évolue pas comme ça. Changer une petite chose finit par avoir de grosses incidences. Et il n'est pas facile de faire évoluer un morceau seulement du système. Quand un système évolue c'est tout l'ensemble qui change en même temps. On ne peut donc raisonner de façon simpliste en disant je prend ça, ça j'élimine etc... d'autant plus qu'un système a une épaisseur historique. On ne part jamais de rien mais un système est toujours le successeur d'un système antérieur.

Pour aller plus loin je peux vous conseiller la lecture de Chantal Blanc Pamard (le nom que je cherchais tout à l'heure), Michel Sébillotte, Jean Pierre Deffontaines (+), Marc Dufumier, Mazoyer etc...
Ce serais bien que les historiens travaillent en interdisciplinarité avec les autres disciplines : agro, zoot, géographie etc...


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Message Publié : 08 Juil 2009 16:53 
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Jean-Pierre Vernant
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La châtaigneraie "cultivée" apparaît à partir de quelle époque ?


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Message Publié : 08 Juil 2009 17:40 
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Salluste
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Je vais voir.


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Message Publié : 08 Juil 2009 18:34 
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Salluste
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13ème siècle en Italie du Nord (Lombardie, Piemont). Plus tard ailleurs.
Il s'agit généralement de plantations.


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Message Publié : 08 Juil 2009 21:41 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

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C'est-à-dire qu'en Corse, en Ardèche, Rouergue... jusqu'au milieu-fin du MA on n'utilisait pas le châtaignier comme ressource alimentaire ? ou alors comme appoint ?


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Message Publié : 08 Juil 2009 23:04 
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Salluste
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Non c'était surtout des céréales et de l'élevage. Mais la population était très peu dense et avait fortement baissé suite à la chute de l'empire romain. Pratiquement on se retrouve à un niveau proche de l'âge du fer.


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Message Publié : 09 Juil 2009 6:20 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 18:37
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En fait je pensais que l'utilisation du châtaignier était beaucoup plus ancienne que ça, du coup dans mon raisonnement je me basais presque sur la situation des pionniers de l'âge du Bronze ou du Fer qui se trouvent face à ce genre de terres très pauvres.


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Message Publié : 09 Juil 2009 15:48 
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Salluste
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Attention, on mange de la châtaigne depuis l'antiquité. Mais il y a un monde entre manger de la châtaigne et vivre de la châtaigne. Pas les mêmes paysages, ni les mêmes systèmes agraires.


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Message Publié : 09 Juil 2009 16:06 
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Polybe
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Inscription : 03 Avr 2009 12:59
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Localisation : Besançon
Je n'ai strictement rien à dire sur la châtaigne en dehors de certaines dégustations en hiver...
Je m'émerveille de l'érudition des deux principaux intervenants.
Bravo,je ne pensais pas un jour trouver un tel intérèt personnel à découvrir notamment,le rôle social (nutrition), les conditions géologiques nécéssaires à la culture de ce végétal qui, il y a quelques jours à peine, me semblait très banal.
Je ne regarderai plus jamais un châtaignier de la même façon.
Merci PH.

_________________
"En guerre comme en amour, pour en finir, il faut se voir de près."
NAPOLEON


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