Sir Peter a écrit :
A contrario,certains objets deviennent du luxe dont les prix atteignent des sommets: les bonnes chaussures de cuir,les costumes en lainage de bonne qualité,les montures de lunettes plaquées or....Un livre bien relié...
Certains plats. D'ailleurs avec la nourriture on voit de drôles de choses. J'ai du gouter mon premier foie gras vers les 27-30 ans. C'était vraiment un produit de luxe. Les huitres, c'était une ou deux fois par année. Au contraire, il y avait des plats courants qui sont devenus des produits de luxe simplement parce qu'ils nécessitent une longue préparation et qu'aujourd'hui, le temps, c'est vraiment beaucoup d'argent. Souvent il en existe des version industrielles qui ont peu de chose à voir avec un plat fait à la maison avec de bons aliments frais.
La tradition en Émilie, région de naissance de ma mère, est de faire des capelletti. Comme son nom l'indique, il s’agit d'une espèce de petits chapeaux de pâte farcis avec des farces à base de viande, même si maintenant, on les farcis à tout et n'importe quoi.
Nous en avions 5 à 10 fois par an selon les circonstances, mais au moins à chaque repas de fête. Si on doit en faire pour un quinzaine de personne, comptez 8 heure de travail. Il faut le temps de faire la farce, puis la pâte. Ensuite, il faut abaisser la pâte, découpez les petits carrés. Ma mère utilisais, au début une roulette en bois de ce style :
Ensuite, elle a eu des roulettes en métal et puis on a trouvé des roulettes qui permettent de couper 1, puis, 2 ou 3 carrés à la fois sur les marchés en Italie.
Ensuite arrive, le plus fastidieux : le pliage. L'enfant que j'étais était fier d'exceller dans ce travail, aidés par ses petits doigts ... Pendant le pliage, on incorpore la farce à la pâte. Et on laisse ensuite sécher quelques heures. Si le repas a lieu que quelques jours après, on mettait dans un récipient au réfrigérateur. Maintenant, mon père les stocke au congélateur. Et on les cuit au moment voulu dans un bouillon. Pas un bouillon du commerce avec des cubes, mais un vrai bouillon. D'ailleurs, souvent nous avions la viande du pot-au-feu qui avait servi à faire le bouillon ensuite, ou le soir.
C'était un vrai plat de pauvres, avec des ingrédients pas chers à l'achat. Pour la farce, on n'utilise qu'environ 1/3 de viande et le parmesan était abordable dans la région d'origine. Il fallait juste du travail et c'est pour cela qu'il était réservé aux repas.
Actuellement, manger de vrais capelletti faits à la main est un luxe. Luxe, très abordable pour qui n'a pas peur de passer quelques heures à la réalisation du plat. Mais, au début des années 60, une roulette en métal pour découper la pâte était un objet haut de gamme que tout le monde n'achetait pas. Aujourd'hui, on en trouve pour un ou deux euros sur les marchés de la région de ma mère. La roulette en bois est réalisée par quelques artisans et coûte au moins une dizaine d'euros. Pour certaines choses, il y a eu un vrai retournement de valeur.