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Message Publié : 29 Sep 2005 21:43 
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Eginhard
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Inscription : 25 Mai 2004 21:35
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J'espère ne pas me tromper de forum en postant ce sujet ici. Je ne prépare pas l'agrégation cette année, mais c'est un problème intéressant que cette sorte d'exception française dans l'agriculture européenne, ce qui rejoint la question d'agrégation.

L'originalité de l'agriculture française, par rapport aux agricultures anglaises et allemandes du XIXè siècle, est l'extrême morcellement des exploitations et le grand nombre des propriétaires.
Considérée comme un frein par les élites anglomanes du premier XIXè siècle, la petite exploitation est, à la fin du siècle et au début du XXè siècle, louée par les élites rurales des deux bords. Elle devient le symbole de la nation française, profondément agricole.

Pour les élites ruralistes de droite, la petite propriété paysanne est un frein à l'exode rural et donc la garantie du maintien d'une paysannerie peu revendicatrice, louée pour ses soi-disant qualités morales. La petite propriété empêche le secteur agricole de devenir un secteur industriel comme un autre, qui se fonderait sur l'opposition du capital et du travail. Et puis, chanter les vertus de la petite propriété permet de garder le silence sur les grands domaines aristocratiques ou bourgeois de Beauce ou du Pas-de-Calais.
A gauche aussi, la petite exploitation à la française est valorisée. Par les radicaux, puisque les nouveaux petits propriétaires du sud-ouest forment la base de leur électorat. Les socialistes eux aussi renoncent rapidement à la collectivisation de la terre, au vu de l'attachement des paysans à la petite propriété et parce que la petite exploitation semble le symbole d'une société relativement égalitaire.

Que penser de cette solution française? Est-elle responsable du retard de l'agriculture française sur les agricultures allemande et anglaise?
La petite exploitation n'a-t-elle pas été un stimulant? C'est parce que le petit paysan français sait qu'il peut arrondir son patrimoine foncier certes modeste qu'il travaille d'arrache-pied.

Il faudrait pour ça comparer avec les autres agricultures européennes, que je connais peu.


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Message Publié : 29 Sep 2005 23:15 
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Jean Froissart
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Inscription : 16 Avr 2005 0:09
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Localisation : Outre nulle-part
On peut peut-être voir du côté de l'URSS, lors de la collectivisation forcée de l'agriculture (kholkozes, sovkhozes) où les paysans exploitaient avec un grand intérêt le petit lopin de terre alloué et qui leur permettait de mieux vivre, voire survivre grâce à leurs propres productions. Bien entendu ils n' étaient pas propriétaires de ces terrains et l'Etat pouvait à tout moment leur en retirer la concession, ce qui devenait alors un drame.
Sorte de chantage : si vous travaillez bien au kolkhoze, on vous laisse cette parcelle, sinon....
Vlad

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Message Publié : 30 Sep 2005 7:41 
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Que penser de cette solution française? Est-elle responsable du retard de l'agriculture française sur les agricultures allemande et anglaise?
La petite exploitation n'a-t-elle pas été un stimulant? C'est parce que le petit paysan français sait qu'il peut arrondir son patrimoine foncier certes modeste qu'il travaille d'arrache-pied.


C'est précisément la thèse de J.L. Mayaud (La petite exploitation rurale triomphante, France XIXe siècle), aujourd'hui assez largement acceptée: la petite exploitation pluri-active, parce qu'elle offre une souplesse incomparable, a été un facteur déterminant de stabilité et de prospérité pour la France du XIXe.
A l'inverse, les problèmes de l'agriculture française apparaissent précisément quand on crée de grandes exploitations monoculturales.

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Message Publié : 30 Sep 2005 11:31 
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Eginhard
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Inscription : 25 Mai 2004 21:35
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Localisation : Paris
Florian a écrit :
C'est précisément la thèse de J.L. Mayaud (La petite exploitation rurale triomphante, France XIXe siècle), aujourd'hui assez largement acceptée: la petite exploitation pluri-active, parce qu'elle offre une souplesse incomparable, a été un facteur déterminant de stabilité et de prospérité pour la France du XIXe. .

Je ne suis pas sûr de bien comprendre cette thèse.
L'agriculture française au XIXè siècle est-elle si prospère? Stable peut-être, dans le sens où sa modernisation est lente et tardive. Il me semble que la France, malgré des atouts agronomiques très importants, a une agriculture en retard sur ses voisins du nord (Allemagne, Pays-Bas, Angleterre). Or justement, l'agriculture de ces pays se fondent sur un partage de la terre extrêmement inégalitaire, avec de grands domaines et une foule d'ouvriers agricoles.

Florian a écrit :
A l'inverse, les problèmes de l'agriculture française apparaissent précisément quand on crée de grandes exploitations monoculturales.

De quand parlez-vous? Je ne vois pas bien quand on crée ces grandes exploitations monoculturales, ni les problèmes qui apparaissent.


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Message Publié : 30 Sep 2005 12:36 
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Il me semble que la France, malgré des atouts agronomiques très importants, a une agriculture en retard sur ses voisins du nord (Allemagne, Pays-Bas, Angleterre).


L'agriculture est peut-être "en retard" en terme de production brute, mais précisément parce que ces exploitations ne sont pas uniquement agricoles. Cela leur permet de mieux résister aux crises.

Citer :
De quand parlez-vous? Je ne vois pas bien quand on crée ces grandes exploitations monoculturales, ni les problèmes qui apparaissent.

Je parle d'aujourd'hui par exemple: est-ce que le développement d'exploitations toujours plus grandes et toujours plus spécialisées n'est pas un contresens économique? La comptabilité des exploitations rurales traditionnelles étaient certes sans comparaisons, mais elles étaient stables et pas sous perfusion européenne.

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Message Publié : 30 Sep 2005 13:58 
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Florian a écrit :
Je parle d'aujourd'hui par exemple: est-ce que le développement d'exploitations toujours plus grandes et toujours plus spécialisées n'est pas un contresens économique? La comptabilité des exploitations rurales traditionnelles étaient certes sans comparaisons, mais elles étaient stables et pas sous perfusion européenne.

Les subventions européennes ont pour cause non l'agrandissement des exploitations mais la facilité des transports de marchandises agricoles. Sans subventions, non seulement nous ne pourrions plus exporter nos produits agricoles en dehors de l'Europe (les pays pauvres préfèreraient produire, ça leur reviendrait moins cher), mais les agriculteurs européens subiraient de plein fouet la concurrence de produits agricoles de pays plus pauvres ou de pays dont l'agriculture est subventionnée.
Les problèmes posés par les grandes exploitations sont plutôt d'ordre environnemental. Destruction du paysage, ruissellements, érosion, sans les haies séparant de petites parcelles, fragilité des cultures...

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Yoda

On ne peut jamais se reposer sur l'amour - et c'est pourtant sur lui que tout repose. - Jean Rostand


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Message Publié : 01 Oct 2005 19:17 
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Eginhard
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Inscription : 25 Mai 2004 21:35
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Localisation : Paris
Florian a écrit :
L'agriculture est peut-être "en retard" en terme de production brute, mais précisément parce que ces exploitations ne sont pas uniquement agricoles. Cela leur permet de mieux résister aux crises.

J'avoue que je ne connais presque rien à l'histoire rurale des autres pays européens, du coup je ne peux pas comparer la résistance aux crises des autres agricultures.
Mais la crise des années 1870-1890 a touché de plein fouet l'agriculture française, et a montré son retard au grand jour. Elle sera le moteur d'une première vague de progrès.
En temps de guerre en revanche, je veux bien croire aux vertus de la petite exploitation qui pratique la polyculture.

On pourrait dire qu'il y a petite exploitation et petite exploitation. La petite exploitation du XIXè siècle est plutôt une micro-exploitation, et à mon sens, un archaïsme qui non seulement freine le progrès économique (puisqu'il est hors de question pour un petit paysan d'innover, donc de prendre des risques, sur sa terre) mais aussi le progrès social et l'amélioration des modes de vie en permettant de maintenir à la terre une foule de petits journaliers micro-propriétaires, véritable prolétariat rural qui a un effet baissier sur les salaires.
C'est après la seconde guerre mondiale que le niveau de vie paysan va grandement s'améliorer, en même temps que progresse de façon fulgurante la motorisation et que régresse (mais moins vite qu'on ne le croit) la petite exploitation. Le tracteur a permis à la fois l'agrandissement des exploitations et la quasi-disparition du prolétariat rural.
Certes le productivisme forcené va amener son lots de problème : l'endettement croissant des paysans, la dépendance vis-à-vis de Bruxelles, etc.


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