Bonjour Corlin,
J'ignore pourquoi tu t'acharnes ainsi sur ce pauvre Albert Lebrun, ton réquisitoire contre lui est si excessif que tu en arrives à commettre plusieurs inexactitudes, que je vais tenter de rectifier.
Corlin a écrit :
Il a donc vécu petitement, lui, le premier Président à être réélu de l'histoire de France
Tiens donc ? Albert Lebrun aurait, selon toi été le "premier Président à être réélu de l'histoire de France" !… Alors, pourquoi oublies-tu Jules Grévy, élu une première fois le 30 janvier 1879 et réélu le 28 décembre 1885 ?
Corlin a écrit :
Aussi mal élu que possible en 1932 ( par une Chambre qui ne représentait pas la nation puisque les élections législatives venaient juste de se terminer )
Dans ce que tu as dit, il y a deux inexactitudes :
-1°) Albert Lebrun n'a pas été "mal élu" le 10 mai 1932 par "l'Assemblée Nationale" (et non la "Chambre" ; je rappelle que sous la Troisième République les Présidents étaient élus par "l'Assemblée Nationale" qui était la réunion, à Versailles, du Sénat et de la Chambre des Députés, d'ailleurs, c'est le Président du Sénat qui présidait de droit "l'Assemblée Nationale") ; Albert Lebrun a été élu au premier tour de scrutin, les résultats ayant été les suivants :
Inscrits : 902
Votants : 826
Blancs ou nuls : 49
Suffrages exprimés : 777
Majorité Absolue : 389
- Albert Lebrun : 633 voix (81,47 %)
- Paul Faure (SFIO - parti socialiste) : 114 voix (14,67 %)
- Paul Painlevé : 12 voix (1,54 %)
- Paul Faure (SFIC - parti communiste) : 8 voix (1,03 %)
- divers : 10 voix (1,29 %).
Plus de 80 % des suffrages exprimés pour Albert Lebrun, est-ce qu'avec un tel score on peut sérieusement dire qu'il a été "mal élu" ?…
Pour voir comment s'est déroulée cette élection à "l'Assemblée Nationale" le mardi 10 mai 1932, voici les liens Internet vers cinq quotidiens français numérisés :
Voir l'exemplaire numérisé du quotidien niçois "L'Éclaireur de Nice" du mercredi 11 mai 1932 :
http://193.48.79.11/archives/ImageZoomV ... &journal=2Voir également l'exemplaire numérisé de l'autre quotidien niçois "Le Petit Niçois" du mercredi 11 mai 1932 :
http://193.48.79.11/archives/ImageZoomV ... &journal=1Si je donne d'abord la référence aux deux quotidiens niçois plutôt qu'à des quotidiens nationaux, c'est que ceux-ci sont certes également numérisés, mais la Bibliothèque Nationale de France (BNF), sur son site "Gallica" utilise un procédé de numérisation qui se révèle être très médiocre dès que l'on veut grossir le texte, qui devient rapidement illisible à partir d'un certain grossissement (alors que le procédé de numérisation du Conseil Général des Alpes Maritimes permet un grand confort de lecture, même avec un très gros grossissement). Pour preuve, voici la numérisation par "Gallica" de deux quotidiens nationaux, et d'un quotidien régional :
- "Le Figaro" du mercredi 11 mai 1932 :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k2969602.item- "Le Temps" (l'ancêtre du journal "Le Monde") du jeudi 12 mai 1932 (paru le mercredi 11 mai 1932 dans l'après-midi) :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k248780g.item- "Ouest-Éclair" (l'ancêtre du journal "Ouest-France") du mercredi 11 mai 1932 :
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k499245b.item-2°) Albert Lebrun n'a pas été élu par une "Chambre qui ne représentait pas la nation puisque les élections législatives venaient juste de se terminer", il a été élu par "l'Assemblée Nationale" avec les sénateurs et les députés en fonction au 10 mai 1932. Certes, parmi les députés qui ont voté ce jour-là, certains avaient été battus lors des élections législatives qui se sont déroulées les dimanches 1er et 8 mai 1932 et qui vit la victoire du "Cartel des gauches" (
http://www.roi-president.com/elections_ ... s_1932.php ). Mais, la nouvelle Chambre des députés n'avait pas encore pris ses fonctions, il est donc tout à fait normal que ce soit les élus de l'ancienne Chambre des députés qui aient pris part au vote.
Et puis, tu oublies de préciser le point le plus important : s'il y a eu une "Assemblée Nationale" convoquée dans l'urgence le 10 mai 1932, c'est à cause de l'assassinat du Président de la République Paul Doumer (élu moins d'un an auparavant par "l'Assemblée nationale" le 13 mai 1931) par l'émigré russe Paul Gorgulov le 6 mai 1932 à 15 heures (Paul Doumer mourra le lendemain matin, 7 mai 1932 à 04h37 du matin). La France avait alors été traumatisée par cet assassinat !… Les pouvoirs publics ont cherché de toute urgence à combler le vide à la tête de l'État causé par cet assassinat. Ils ont eu raison d'agir comme ils ont agit !…
Pour apprécier ce traumatisme, voir l'exemplaire numérisé du quotidien niçois "L'Éclaireur de Nice" du samedi 7 mai 1932 qui annonce l'attentat contre Paul Doumer :
http://193.48.79.11/archives/ImageZoomV ... &journal=2Voir ensuite l'exemplaire numérisé du quotidien niçois "L'Éclaireur de Nice" du dimanche 8 mai 1932 qui annonce à la fois le décès de Paul Doumer et la réunion de "l'Assemblée Nationale" pour élire son successeur :
http://193.48.79.11/archives/ImageZoomV ... &journal=2Et puis, pour terminer sur Albert Lebrun, je voudrais vous citer un extrait de l'article de la "notice sur Albert Lebrun" sur le lien Internet
http://pagesperso-orange.fr/freysselina ... Lebrun.htm :
«
En 1939, après un septennat éprouvant, Albert Lebrun souhaite se retirer. Il a loué un appartement à Paris, au ler étage du 19, boulevard Beauséjour ; il souhaite profiter de sa famille, de ses petits-enfants. Mais des voix s’élèvent pour lui demander de rester président, afin de ne pas donner à la France le spectacle d’une querelle politique à quelques mois d’une guerre qu’on sent proche. Il refuse à plusieurs reprises, mais cède devant les instances de ses amis et à la demande, unique dans l’Histoire, des présidents des deux assemblées, Herriot et Jeanneney. Refuser, ne serait-ce pas une désertion ? On lui dit : « Vous serez le président de la guerre. » Il répond : « Je crois que c’est pour cela que je vais accepter ». Il est réélu, quasiment sans concurrent, à la présidence de la République. « Lebrun Albert succède à Albert Lebrun » titre le Canard Enchaîné.
Il paiera cher cette décision. Par esprit de sacrifice, il sera le président de la défaite, le dernier président d’une République que les régimes suivants allaient vouer aux gémonies pour sa faiblesse. S’il s’était retiré en 1939, il aurait laissé le souvenir du président bon et estimé qu’il avait été, comme Doumergue ou Fallières ; il aurait été le président de la paix. »
Moralité : soyons moins injuste envers Albert Lebrun…
Roger le Cantalien.