Je vais essayer d’être rapide car j’ai un certain nombre de choses à exposer.
D’abord, à vous, Salmanasar :
- 1)
salmanasar a écrit :
Ce que je veux dire, c’est qu'au début de leur histoire, les Assyriens ne vivaient pas sur le territoire où avait vécu les Akkadiens.
Merci de m’avoir éclairé ; je souhaiterais cependant savoir encore une chose : est-ce qu’à son apogée, l’Assyrie contrôlait l’ancien pays d’Akkad ? Auriez-vous, par hasard, des cartes de l’Assyrie ?
- 2)
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Si dans votre message, par royaume vous entendez territoire de l'empire akkadien,César,ce dernier recouvrait non seulement tout la Mésopotamie,mais il s'étendait en plus au-delà de la Mésopotamie.
Je n’en suis pas persuadé. Auriez vous une carte de l’empire akkadien à son apogée ?
- 3)
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Non César, l’empire akkadien dominait bel et bien des peuples d'origine diverses:dont les Sumériens, Élamites et les peuples sémites des environs (peut-être même que j'en ai oublié).
Il me semble que vous aviez dit, plus haut, que Sumer et Akkad étaient des pays différents. Si l’empire akkadien dominait Sumer, c’est qui y eu une rencontre, une guerre et une conquête. Je n’ai pas de souvenir de cette guerre mésopotamienne. Sauriez vous quelque chose là-dessus, ou, en disant que Sumer et Akkad étaient différents, vous seriez vous trompé ?
- 4)
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À moins d'avoir un blanc mémoire, il me semble que l'Égypte n'a jamais dominé les Hittites. Pouvez-vous me donner plus de renseignement César ?
Durant la première partie de son long règne, Ramsès II s’est battu pour reprendre les terres d’Afrique et d’Asie Mineure que l’Égypte possédait aux XVIe-XVe siècles av. J.-C. Ses principaux adversaires dans cette entreprise furent les Hittites, contre lesquels il mène une longue guerre. La principale bataille eut lieu en 1274 av. J.-C. à Qadesh, dans le nord de la Syrie ; revendiquée par Ramsès II comme une grande victoire égyptienne, la bataille se solde de fait par un statu quo. Par un traité, les terres contestées sont partagées et la paix est scellée par le mariage de Ramsès II et de la fille du roi Hattousili III. L’Egypte impose alors sa domination sur l’empire hittite et contrôle une partie de la population hittite.
- 5)
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L'Égypte a bel et bien formé des empires au cours de l'Antiquité, mais l'Égypte en elle-même n'était pas un empire.
Vous n’êtes pas très clair. Quels sont vos arguments ?
Ensuite à vous, Keikoz :
- 1)
keikoz a écrit :
Il faut dire que les premiers à parler d'empire pour l'Egypte ont été les Allemands. Ils parlaient d'empire en référence notamment à l'empire germanique. C'est ainsi que l'on parle d'Ancien Empire, Moyen Empire, Nouvel Empire.
Pourquoi ont-ils appelé l’Egypte « empire » ? Quand ? Et comment savez vous çà ?
- 2)
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Donc je dirais que au sens pratique on peut parler d'empire pour la domination exercée par les Egyptiens sous, par exemple, Ramsès II ou Thoutmosis IV au Moyen Orient, en Nubie, au Sinaï, etc. (corrigez moi si je dis des c.....).
D’après vous, on peut donc parler d’empire égyptien à certaines périodes (Ramsès II, Thoutmosis IV, Aménophis III, ect…) et de royaume égyptien à d’autres époques ?
- 3)
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L'Egypte se représente comme un peuple, et le pharaon comme le roi de ce peuple, pas comme un roi universel (mais là encore je n'en suis pas sûr).
Là-dessus vous avez raison, d’ailleurs rien dans la traduction et le sens du mot « pharaon » ne parle de « roi de tous les peuples » ou de « roi des rois » comme en Perse par exemple : le mot "pharaon" apparaît pour la première fois dans la traduction grecque de la Bible, oeuvre colossale commandée par Ptolémée II Philadelphe aux érudits juifs vivant à Alexandrie au IIIème siècle avant Jésus-Christ. Ainsi apparut le mot pharao (faraw), alors que les Hébreux s'étaient toujours contentés, comme les Égyptiens, de traduire le mot égyptien per-aât ("la Grande Maison"). En fait, per-aât désignait à l'origine le palais royal et tous ses habitants et donc la fonction globale, comme nous parlons de l'Élysée pour désigner à la fois la fonction présidentielle, le bâtiment et le président lui-même. Quant au mot per-aât utilisé comme titre, il n'existe réellement que depuis l'hérésie amarnienne d'Akhénaton, c'est-à-dire vers 1300 avant J.-C. Et encore, il est toujours suivi de la formule sacrée "Puisse-t-il vivre, être prospère et bien se porter".
Jusqu'à l'époque amarnienne, où l'on voit apparaître le mot per-aât comme titre, on ne désigne pas le souverain comme le "pharaon untel" mais comme l'"Horus untel", selon une titulature qui suit un protocole royal, ou "grand nom", très élaboré. Cette titulature, qui a évolué depuis l'Ancien Empire, était le plus souvent mise en place par un collège de prêtres proches du pharaon. Le roi recevait cette titulature le jour de son intronisation, en même temps que les insignes royaux.
Tout roi porte cinq noms distincts, ou pharaoniques, qui lui sont accordés lors des cérémonies d'intronisation. Ces noms sont suivis d'épithètes souvent flatteuses, mettant l'accent sur les traits de caractère positifs et glorieux du roi.
Cette titulature royale comporte en premier lieu le nom d'Horus, puisque le monarque est considéré comme le digne successeur de ce dieu, premier souverain de l'Égypte. C'est le titre le plus ancien, et il subsistera jusqu'à l'époque romaine.
Ensuite vient le nom de "Deux Maîtresses" ou "Deux Déesses", qui rappelle le temps où le pays était divisé en deux royaumes distincts et protégé au nord par Ouadjet, la déesse cobra, et au sud par Nekhbet, la déesse vautour.
Le troisième nom, "l'Horus d'or", évoque la victoire d'Horus sur Seth, son oncle.
Le quatrième est en fait le prénom ou nom d'intronisation et précédé par le formule "Roi de la Haute et de la Basse-Egypte", c'est-à-dire celui qui appartient au roseau, symbole du Sud et à l'abeille, symbole du Nord.
Enfin, le cinquième, nom de naissance, est à son tour précédé du titre de "fils de Rê".
Tout çà pour dire que rien dans la titulature pharaonique ne fait allusion à « roi de tous les peuples » ou de « roi des rois ».
- 4)
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Par contre si nous envisageons le problème de savoir où la notion d'empire tel que nous le connaissons est née, c'est-à-dire sous sa forme occidentale (romaine, médiévale, ...) alors là c'est une autre chose...
Je ne comprends pas, ce que vous voulez dire par « notion d’empire tel que nous le connaissons, sous sa forme occidentale ». Il nous resterait à la définir, cette notion.
- 5)
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Je tenterais de résumer la question en général de cette façon. A la question "qu'est-ce qu'un empire", que pouvons-nous répondre? Que le terme recouvre plusieurs choses.
1. Le terme même est "inventé" par les Romains: initialement l'imperium est le pouvoir de commandement suprême, détenu par les consuls et les préteurs, les magistrats curules à Rome. Il désigne par conséquent, plus tard, le général victorieux, l'imperator. Lors de la formation du principat à Rome, sous Octavien (Auguste), un des titres donné à ce "prince" est précisément celui de imperator, à côté d'autres titres, (augustus, caesar, pontifex maximus.
Finalement cette construction a été appelée "empire", de l'un de ces titres, celui d'"empereur", certainement parce qu'il désignait au mieux le caractère principal de cette construction politique qu'est devenue Rome: une domination qui se veut universelle et qui donc idéalement a soumis tous les peuples du monde.
2. Cela a conditionné l'usage de ce terme d'"empire". Le premier usage a consisté à l'utiliser pour désigné les nombreux héritiers de l'empire romain: l'empire byzantin, le Saint Empire, le Saint Empire germanique, le III Reich, même le tsar de Russie. Dans tous ces cas il existe bien une véritable idéologie, une représentation du pouvoir impérial, voulue, consentie, élaborée.
3. L'autre usage a consisté à l'utiliser pour désigner toutes ces entités qui, faute d'être "constitutionnellement" un empire, l'étaient pour des raisons de fait: l'empire athénien, français du XIX, etc. On parle dans ces cas d'"empire" par analogie à la domination militaire qui est exercée.
4. Un quatrième usage existe, qui est celui qui ici fait problème. Le fait que des civilisations ont développé une véritable idée impériale, avec l'idée de domination universelle, en dehors du cadre romain-occidental: on parle d'empire dans ces cas par analogie non pas à la domination réelle, mais par analogie à l'existence d'une idéologie de domination universelle, qu'elle existe ou pas. C'est le cas des Achéménides, dont les rois se dénomment "roi des roi", des Japonais si j'ai bien compris.
Ce mot empire est donc utilisé pour trois types de réalité différents. Lorsque je dis dans mon précédent message que l'idée d'empire est universelle, je fait référence aux points 3 (empire sans idéologie) et 4 (idéologie existante mais hors du cadre traditionnel de l'"empire" romain). Dans ces cas il n'est pas tout à fait correct de parler de notion d'empire, dès lors que les idéologies impériales sont aussi nombreuses que les empires. Lorsque j'utilise les mots "notion d'empire", par contre je fais référence forcément à une idéologie clairement identifiée, celle de l'empire romain... Ou bien on fait référence à une autre, mais il faut alors savoir laquelle. J'en reviens toujours à ma première idée.
Vous avez parfaitement résumé la situation, mon cher Keikoz.
- 6)
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Le fait que des civilisations ont développé une véritable idée impériale, avec l'idée de domination universelle, en dehors du cadre romain-occidental: on parle d'empire dans ces cas par analogie non pas à la domination réelle, mais par analogie à l'existence d'une idéologie de domination universelle, qu'elle existe ou pas. C'est le cas des Achéménides, dont les rois se dénomment "roi des rois", des Japonais si j'ai bien compris.
En tant que grand spécialiste de ce pays, je suis content de voir que vous avez enfin compris ce que je cherchais à vous dire lors de mes longs débats sur le Japon. Mais je ne vais pas m’attarder sur ce sujet de peur de vous exaspérer avec mon Japon …
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Je m'embrouille et je me rends compte que cette histoire d'empire est vraiment très complexe...
[…]
Ce sujet est en train de devenir d'une extraordinaire complexité, avec trois sujets qui avancent parallèlement sur la même question et plutôt rapidement, ce qui montre bien la difficulté qu'il soulève.
Effectivement, ce sujet commençait à devenir très compliqué, mais vous avez très bien résumé toues les notions d’empire et je pense donc que cette histoire d’empires est terminée… à moins que vous souhaiteriez continuer sur le thème de la « notion d’empire tel que nous le connaissons, sous sa forme occidentale »
- 8) Je clos enfin ma copie en vous rappelant, cher Keikoz, que vous n’avez pas répondu à deux questions :
- êtes vous d’accord avec moi sur ma dernière analyse de la Chine ?
- êtes vous d’accord avec moi sur ma dernière analyse du pays d’Akkad ?
César