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Message Publié : 31 Mai 2007 14:42 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours
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Belle démonstration Bergame :) !

R.d. a écrit :
Or l'égalité est quelque chose de profondément contre-nature.

De fait, ça l'est puisque l'égalité (ou l'inégalité) est un jugement de valeur, un concept fabriqué par l'homme, qui effectivement n'existe pas dans la Nature. Mais en même temps, la caractéristique de l'Homme est d'être un animal culturel, c'est-à-dire qu'il introduit de la valeur, du moral, du sens, dans la Nature.

La justification des inégalités de fait dans une société, par des différences de fait dans la nature, c'est un discours fallacieux (puisqu'il mélange deux choses qui n'ont rien à voir : inégalité et différence) qui a beaucoup servi, notamment pour expliquer l'infériorité des femmes en droits, ou celle des Noirs, ou bien d'autres inégalités instaurées par les hommes.

J'ajoute que la liberté n'est pas plus naturelle que l'égalité. En effet, que fait la nature ? Elle nous donne des gènes qui nous déterminent physiquement, aucune liberté, aucun choix là-dedans, rien que du déterminisme (il faut bien se demander pourquoi les propos récemment tenus sur la "pédophilie génétique" ont tant choqué !). En revanche, l'être que nous sommes, nous le construisons tout au long de notre vie, dans une culture, où nous avons la possibilité de faire usage de notre libre arbitre, de notre responsabilité, etc... C'est quand ce libre arbitre ne peut plus s'exercer et que nous perdons notre liberté, que nous entrons dans un système de survie, comme les animaux, et non plus de vie.

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Message Publié : 31 Mai 2007 16:05 
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Philippe de Commines
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Je ne comprends pas "qui" est (ou serait) "la nature" qui aurait "fait" des choses. Donc, d'accord:
Citer :
il faut croire à un Créateur pour croire à l'inégalité de nature

Je ne crois pas à un Créateur, Majuscule ou minuscule.
Et je ne considère pas les mots "liberté, égalité, (et n'oublions pas) fraternité" comme des notions absolues, qui seraient soit totalement, soit pas du tout réalisées ou réalisables. C'est plutôt un ensemble de valeurs entre lesquelles il faut trouver un équilibre, et vers lesquelles il faut tendre.
Pour répondre à la question initiale: les deux valeurs liberté-égalité (et la fraternité) ont besoin chacune de l'autre (des autres)

exemple: Liberté d'aller et venir. Cette liberté n'est-elle pas limitée, tout simplement, par l'inégalité économique, qui fait que l'un peut se payer le billet d'avion, et pas l'autre ? Et l'inégalité économique ne peut-elle pas être atténuée par la fraternité ? Et l'égalité du droit d'aller voir sa vieille mère à l'autre bout du monde n'a-t-elle pas besoin de la liberté d'aller et venir ? Et cette rencontre de famille, n'est-ce pas le minimum de la fraternité ?

Autre remarque: On entend souvent cette "morale": "la liberté des uns s'arrête où commence celle des autres".
Ce n'est pas faux, et même difficilement contestable. Pourtant, une éducation qui met ce genre de morale en avant ne présente-t-elle pas "l'autre" comme un concurrent (mon espace vital est limité par le sien). Qu'y a-t-il donc, en général, derrière la tête des gens qui énoncent ce genre de phrase ? c'est peut-être plus important que la phrase elle-même.
Et si on disait "ma liberté a besoin de celle de l'autre pour exister, et réciproquement" , ne ferait-on pas un pas vers l'égalité ? c'est aussi juste, mais moins simple (simpliste)

Prendre ce genre de notion dans l'absolu n'est jamais dénué d'arrière pensée: il est aisé de monter qu'elle n'existent pas dans l'absolu, et donc de les rejeter en bloc.

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"La vie des hommes qui vont droit devant eux, renaitraient-ils dix fois en dix mondes meilleurs, serait toujours semblable à la première. Il n'y a qu'une façon d'aller droit devant soi." (Pierre Mac Orlan)


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Message Publié : 01 Juin 2007 7:52 
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Thucydide
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Belle démonstration philosophique. Je ne peux que capituler ! :D

Je ne suis même pas certain de saisir toute les subtilités de la question. Tout ceci est très complexe, et n'éclaire pas vraiment les problèmes auxquels nous sommes confrontés, moi, mes collègues, vous peut-être, dans les recherches historiques. Pourtant je suis sûr qu'il y a bénéfice à en tirer. Nous tombons nez à nez avec l'éternelle question de faire correspondre diverses théories et variété infinie d'observations. Alors que faire avec la liberté et l'égalité, tout en considérant que ces deux notions ont toujours beaucoup évolué ? Parce que pour reprendre Dédé, qui ne croit pas au créateur (pas plus que moi), il n'en a pas toujours été ainsi. Le libre-arbitre assez largement développé par les jésuites a longtemps porté son empreinte dans les conceptions de la liberté, et notamment chez les libéraux classiques. Ce n'est qu'un exemple. Plus on grossit l'échelle d'observation, plus nous en trouvons. Comment s'y retrouver ?

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Message Publié : 01 Juin 2007 8:33 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Dans l'histoire des idées, ce "paquet indissociable" liberté, égalité, fraternité n'est-il pas tout simplement un raccourci de l'apport essentiel des Lumières, à savoir l'existence de l'individu en tant que tel, et l'établissement de valeurs codifiant sa relation au groupe ?
Car si l'individu n'existe pas en tant que tel, s'il n'existe que pour le groupe et par le groupe, ces notions sont inutiles.
Il est d'ailleurs des "exceptions", dans l'histoire récente et même dans l'actualité, où ces valeurs sont balayées par d'autres (prétendument) nécessaires à la vie du groupe (la discipline, la hiérarchie, l'obéissance): c'est le contexte militaire (pas seulement en période de guerre), et les autres contextes imbéciles style bizutage.

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Message Publié : 01 Juin 2007 11:51 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 23 Avr 2005 10:54
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Oh, il n'y aucun mérite, je travaille cette question depuis longtemps. Et comme vous le dites, R.d., on ne peut, de toutes façons, en faire le tour.

La seule chose qui me paraisse véritablement importante, c'est de prendre conscience du fait que c'est toujours avec ses propres valeurs qu'on analyse les faits. Et nos valeurs ne sont pas nécessairement celle des autres -surtout pas dans nos société modernes, libérales et pluralistes.
Dès lors, il est toujours tentant de contourner cette nécessaire subjectivité par un recours à l'objectivité. Auparavant, Dieu, en tant que créateur du monde, était l'argument objectiviste idéal : "Dieu l'a voulu." Evidemment, ce que Dieu avait voulu pouvait changer selon les interprètes de sa Parole. Depuis le début de la période de sécularisation que connait l'occident, on se réfère plus facilement à un autre argument objectiviste, jugé plus en phase avec les valeurs dominantes (scientifiques), et donc plus convaincant : La Nature. Les multiples interprétations de la théorie de l'Evolution sont là pour en témoigner. Naturellement, tout cela est fait de façon totalement inconsciente, on cherche simplement les moyens d'avoir raison, et voila tout.

Mais au fond, tout cela sont des discours humains, tout ce qu'il y a de plus humain. Il s'agit, comme le dit Aspasie Mineure, de justifier un certain nombre de choses qui peuvent apparaitre, de façon récurrente, inacceptables aux yeux des hommes, tel que, par exemple, l'inégalité sociale. Bien entendu, l'inégalité sociale est inévitable, puisque par définition, les ressources sont râres. Mais il est inévitable également que cette inégalité ne soit pas du goût de ceux qui en pâtissent le plus, surtout si elle les repousse au-delà de certains seuils qui mettent potentiellement en danger l'intégrité physique ou morale des individus ou de leurs enfants. Et quiconque ne comprend pas cela, je le pense sincèrement, ne comprend pas grand-chose aux hommes et à l'histoire.

Quant à la liberté, c'est peut-être effectivement un problème plus vaste encore, car l'égalité et la similarité sont des concepts suffisamment clairs en soi. Cad, ils sont empiriquement difficiles à concevoir -on l'a vu- mais ils sont conceptuellement aisés à définir.
Ce n'est pas le cas de la liberté, qui est, déjà, un concept très vague. Il existe une multitude de définitions de la liberté, et c'est au moins l'une des raisons pour lesquelles il y a des définitions très différentes du libéralisme. Par exemple, R.d., je suis parfaitement de votre avis lorsque vous dites qu'une certaine tradition libérale emprunte sa définition de la liberté à la tradition chrétienne -je préciserais même pour ma part, "à la scolastique"- mais il est clair que cette assertion fait hurler bon nombre de "libéraux"...
Sans compter que quelqu'un comme Lénine se réclamait lui aussi de la liberté, c'est dire si le problème est vaste !...


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Message Publié : 01 Juin 2007 13:59 
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Thucydide
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Effectivement la multitude de courants libéraux témoigne de la grande imprécision que recouvre ce mot. Sans parler des innombrables libre-penseurs. Le libéralisme classique a cependant eu cette habileté d'inventer ou de définir l'individu dans sa société (certes en s'inspirant des Lumières). Lénine, Marx peut-être avant lui, ont procédé dans le sens inverse : la société est définie par ses individus (regroupés en "classes") et toute liberté ne peut être que sociale et collective. Dans ce but précis l'égalité n'était-elle pas le meilleur prétexte pour parvenir à ce modèle ?

Citer :
Mais il est inévitable également que cette inégalité ne soit pas du goût de ceux qui en pâtissent le plus, surtout si elle les repousse au-delà de certains seuils qui mettent potentiellement en danger l'intégrité physique ou morale des individus ou de leurs enfants. Et quiconque ne comprend pas cela, je le pense sincèrement, ne comprend pas grand-chose aux hommes et à l'histoire.


Certes les inégalités matérielles se font souvent ressentir dans la douleur. Mais il est assez étonnant dans l'histoire de voir sans cesse les révolutions être le fait de personnes qui sont loin d'être les plus démunies : la Révolution française a commencé par le sommet de la hiérarchie sociale. Encore aujourd'hui, il est frappant de voir que les syndicats ouvriers français sont en réalité composés de fonctionnaires dont les emplois sont les mieux protégés du pays. Quant à des populations menacées d'être éliminées comme au Darfour, malgré leur nombre, elles ne se révoltent pas. Elles meurent en silence. Tout comme les plus nécessiteux en France ne sont jamais ceux qui se plaignent. Je ne sais pas s'il y a de réels points communs entre ces exemples, malgré les anachronismes, mais je pense que oui. Voilà des observations historiques, auxquelles les historiens n'ont jamais vraiment su apporter d'explications. Seraient-elles du domaine de l'inconscient, de "l'infra-social", ou que sais-je encore ?

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Message Publié : 01 Juin 2007 14:30 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 13 Jan 2007 20:12
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Localisation : Région parisienne
R.d. a écrit :
Certes les inégalités matérielles se font souvent ressentir dans la douleur. Mais il est assez étonnant dans l'histoire de voir sans cesse les révolutions être le fait de personnes qui sont loin d'être les plus démunies


En fait il y a une explication : une révolution serait une révolte qui a aboutit parce que les "révoltés" avaient les moyens de se faire entendre et de ne pas être réduits au silence.
Les moyens étant d'ordre économique, social et culturel ( par "culturel" j'entends le fait d'avoir accès à une base de savoir minimum).
Je suis bien certaine que les révoltes existent au Darfour, mais pour passer au-delà du simple cri de colère, même le plus légitime du monde, il faut avoir les moyens de proposer autre chose que le cri de colère.

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Message Publié : 01 Juin 2007 15:27 
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Bonjour,

Je viens de découvrir ce fil qui traite d'un concept qui m'est cher.
Le sens d'"Egalité" de notre devise, ne serait-il pas devenu source d'"Inégalité" ?
Je m'explique par un cas fictif. Soit 2 familles identiques en nombre. L'une touche le smic et l'autre 10 000 euros par mois. Au nom de l'égalité on va verser à chacune une prime de la même valeur. Est-ce moralement juste ?
Ne vaudrait-il pas mieux, au XXIè siècle, choisir l'Equité ?

Autre sujet de réflexion, l'égalité n'existe pas par nature. Il y aura toujours des grands et des petits, des costauds et des chétifs, des intelligents et des imbéciles, etc. Autant de points que la société est incapable de corriger. Elle peut tout au plus compenser de façon ... équitable.

Cordialement

Jean (philosophe de café de commerce à ses heures)


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Message Publié : 01 Juin 2007 15:43 
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Grégoire de Tours
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Effectivement, c'est le paradigme dit "de la mobilisation des ressources" : Il ne suffit pas d'une "cause", ni d'une "volonté" fut-elle "collective" pour que se développe une mobilisation sociale, et encore moins pour quelle réussisse, il faut qu'elle sache et puisse mobiliser les ressources nécessaires (matérielles, mais aussi morales selon certains auteurs) à son action. Or, les ressources, par définition, elles sont plus difficilement mobilisables par les défavorisés.

En élargissant un peu, on peut aussi dire que si les plus nécessiteux ne se plaignent pas, c'est aussi parce qu'il n'ont pas les moyens de le faire. L'accès aux médias, ou plus simplement à ce qu'on appelle l'espace public, est aussi une ressource. En la matière, il faut quand même faire attention à ne pas confondre cause et conséquence par inadvertance parce qu'on risque alors de tomber dans des discours circulaires et auto-justificateurs : Si les pauvres ne se plaignent pas, c'est qu'ils ne sont pas si malheureux que cela, alors tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. :) On n'est pas obligé de se porter volontaire pour le Darfour, mais la moindre des choses me semble tout de même de reconnaitre que, même si les populations ne s'y "plaignent pas", elles meurent quand même.
Enfin, cela nous éloigne peut-être de la question préalable.


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Message Publié : 01 Juin 2007 15:46 
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Grégoire de Tours
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Une petite phrase de Carlo Rosselli (1899-1937), théoricien d'un socialisme libéral, à méditer dans ce fil, car elle témoigne de l'effort de ces penseurs qui cherchèrent à dépasser la contradiction apparente entre égalité et liberté:

"Le socialisme, c'est la liberté qui arrive dans la vie des gens les plus pauvres."


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Message Publié : 01 Juin 2007 16:00 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 23 Avr 2005 10:54
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"L'égalité n'existe pas par nature", cela, on l'a traité, maintenant, je crois. Ce n'est pas l'égalité qui n'existe pas par nature, c'est la similarité.
Ensuite, vous avez raison de parler d'équité, Jean.D. Si l'on était précis, c'est le terme qu'il faudrait employer lorsqu'on parle de justice sociale (la question de fond jusqu'à présent). Mais de ce point de vue, nos sociétés occidentales sont déjà basées sur le principe d'équité. En ce qui concerne l'allocation de ressources, économiques et politiques, la société française n'a jamais été fondée sur autre chose que l'équité. Et d'ailleurs, je suis toujours très étonné de lire ou d'entendre que la Révolution, de ce point de vue-là, était "égalitariste". On doit certainement confondre égalité et équité, effectivement.
L'égalité "arithmétique" n'a jamais été utilisée, en France, qu'en droit, où l'une des innovations de la Révolution est effectivement d'avoir décrété que tout citoyen est égal à tout autre devant la Justice.
Mais égalité juridique et égalité socio-économique, ce n'est évidemment pas la même chose.


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Message Publié : 01 Juin 2007 22:40 
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Thucydide
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J'aurais eu une autre hypothèse d'explication plus limitée mais plus perverse : ne faut-il pas voir dans les révoltes ou dans les révolutions le détournement d'arguments de pauvres à des fins politiques ? Les plus démunis le sont aussi, en général, par leur culture politique (ce qui provient d'un faible niveau d'instruction ou d'une faible syndicalisation). Je cite souvent Lamartine, il est plus connu pour ses poèmes que pour sa pensée politique, malheureusement : "si vous voulez rendre l'homme capable de liberté, qu'il soit instruit..." (Mémoires politiques).

J'aime beaucoup cette expression de "capable de liberté". Tous les hommes sont-ils capables de liberté (Lamartine l'entendant au sens civique et démocratique) ?

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Message Publié : 02 Juin 2007 12:40 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 23 Avr 2005 10:54
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Je ne sais plus quel auteur disait qu'on peut distinguer les systèmes philosophiques (et les systèmes d'idées) selon un critère très simple : a) ceux qui admettent comme premisse implicite que l'homme est naturellement mauvais ; et b) ceux qui admettent comme premisse implicite que l'homme est naturellement bon.
Là encore, ce sont deux jugements de valeur, donc il est impossible de démontrer la supériorité de l'une sur l'autre. Mais clairement, ces deux prémisses conduisent vers des conceptions très différentes du monde social, naturellement.

En l'occurence, l'explication que vous proposez ici sur la formation des mouvements sociaux présuppose que les hommes, lorsqu'ils expriment leurs opinions, leurs revendications par exemple, mentent systématiquement : Ils utilisent cyniquement de faux arguments pour parvenir à leurs fins. En bref : Ils sont naturellement "mauvais".

C'est une hypothèse plausible, naturellement. Mais par exemple, l'explication d'Aspasie Mineure part plutôt de l'hypothèse inverse : Pourquoi faudrait-il douter a priori, et avant toute vérification, de ce que disent les hommes ? N'ont-ils pas, dans certains cas, de bonnes raisons suffisantes de revendiquer plus de justice sociale, ou plus de libertés politiques, ou etc. sans qu'on doive les soupçonner immédiatement de mentir ?

Bon, mais c'est une question ouverte. Il apparait sans doute clairement que ma préférence personnelle va vers la seconde, mais il est tout aussi clair que ni l'une ni l'autre ne sont démontrables.

Quant à votre question sur la liberté, c'est aussi une question très intéressante. Mais avez-vous une proposition quant à ce qui pourrait faire que certains hommes soient capables de liberté et d'autres pas ?


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Message Publié : 02 Juin 2007 13:12 
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Inscription : 20 Juin 2003 22:56
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Localisation : Provinces illyriennes
Citer :
a) ceux qui admettent comme premisse implicite que l'homme est naturellement mauvais

Ce sont les lecteurs et "disciples" du Leviathan d'Hobbes.

Citer :
b) ceux qui admettent comme premisse implicite que l'homme est naturellement bon.

Ceux de Rousseau et du De l'inégalité parmi les hommes. :wink:

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Un peuple sans âme n'est qu'une vaste foule
Alphonse de Lamartine


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Message Publié : 03 Juin 2007 18:11 
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Thucydide
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Inscription : 21 Jan 2006 15:17
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Localisation : Paris
Je n'avais pas réfléchi à cette séparation entre bon et mauvais, qui me rappelle un peu le bien et le mal. Mais je me pose la question de la pertinence de cette approche en histoire. Puisque tout est affaire de subjectivité, pourquoi le fait de détourner des arguments des pauvres en faveur d'une révolution serait forcément mauvais, ou mal intentionné ? Ce fait est certainement vu comme un bien nécessaire par ses instigateurs, à moins qu'ils ne soient de fins psychopathes (l'histoire en compte bien quelques uns), et toute la question est de savoir pourquoi le bien des uns peut être perçu comme bien ou comme mauvais pour d'autres.

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