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Message Publié : 05 Jan 2013 17:58 
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Polybe
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Bonjour !

le vote de la loi en faveur du mariage gay et les manifestations que cela suscite m'ont fait penser à de grandes lois sociales : l'abolition de la peine de mort, Neuwirth sur la contraception (1967), la loi Weil sur l'avortement et l'IVG (1975)
J'aimerais pouvoir décider sur la question suivante : ces différentes lois qui ont modifié notre société avaient elles auparavant la faveur de la majorité de l'opinion populaire. Ou bien n'est-ce pas le vote de la loi par l'assemblée qui a aboutit à ce qu'elle soit acceptée par la population ? Maintenant la plus grande partie des personnes sont favorables à ces lois, mais n'a t-il pas fallu à l'époque les faire passer en force ?
En fait pour que je puisse répondre moi-même à ces questions il faudrait savoir quelles étaient les statistiques à l'époque pour montrer le pourcentage de la population qui était favorable. Quelqu'un connaît il les statistiques où sait-il sur quels sites se les procurer ? Merci

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Message Publié : 05 Jan 2013 19:35 
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Il est très compliqué de répondre. Certaines de ces lois, si elles avaient été soumises à référendum ne seraient pas passés. D'autres seraient passées peut-être plus tôt. Certains parlementaires se sont parfois présentés comme le fer de lance de l'opinion publique. Très belle image, puisque le fer de lance est tout à l'avant de la lance. Mais, si on prend le cas de la loi sur la mariage homosexuel, les sondages montrent qu'une majorité des français y serait favorable. Ce qui ne veut pas dire qu'elle passerait un référendum, tant de choses entrent en ligne de compte dans un référendum.

Alors parfois la loi devance les faits de société, c'est assez rare, mais ça arrive. D'autres fois, on constate l'état de fait et on ajuste la loi pour correspondre à la réalité. D'autres fois, on constate qu'il ne sert à rien de changer une loi tombée en désuétude ou non appliquée. Par exemple, régulièrement des esprits malins disent que le règlement interdisant le port du pantalon par les femmes n'a toujours pas été abrogé. Donc, en France, il serait interdit de porter un pantalon pour une femme. Croyez-vous qu'il soit nécessaire de créer une loi pour en autoriser le port ?

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Message Publié : 06 Juin 2013 11:38 
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Georges Duby
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Lecielmetombesurlatête a écrit :
J'aimerais pouvoir décider sur la question suivante : ces différentes lois qui ont modifié notre société avaient elles auparavant la faveur de la majorité de l'opinion populaire. Ou bien n'est-ce pas le vote de la loi par l'assemblée qui a aboutit à ce qu'elle soit acceptée par la population ?i
Cette problématique n'est pas dans l'essence de la production de normes des démocraties.
Les lois sont justifiées en elles-mêmes, par une volonté d'agir, pour produire des effets, inciter ou interdire et pas pour confirmer ou infirmer des opinions ou des sondages. Toute proposition ou projet de loi est précédée pour cette raison par un exposé des motifs détaillé qui précise les raisons de légiférer.
La pratique est effectivement parfois différente mais c'est une perversion du système.
Si on suivait l'opinion, on aboutirait à des lois souvent inappropriées.

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Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.


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Message Publié : 06 Juin 2013 12:06 
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Grégoire de Tours
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Narduccio a écrit :


Alors parfois la loi devance les faits de société, c'est assez rare, mais ça arrive.


Un des exemples les plus marquants serait, à mon sens, le droit de vote aux femmes.

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Message Publié : 06 Juin 2013 17:18 
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Inscription : 15 Avr 2004 22:26
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Localisation : Alsace, Zillisheim
Adulith a écrit :
Narduccio a écrit :


Alors parfois la loi devance les faits de société, c'est assez rare, mais ça arrive.


Un des exemples les plus marquants serait, à mon sens, le droit de vote aux femmes.


Compliqué de répondre ...

Dans de nombreuses sociétés anciennes, il y avait un conseil des hommes et un conseil des femmes. Quand il y a un conseil des anciens, il arrive que certaines femmes en fassent partie. En fait, cela dépend de la structure de la société. Dans de nombreuses sociétés agricoles où les femmes participaient activement aux travaux des champs, elles avaient déjà droit à la parole. Dans d'autres sociétés qui se coulaient plus civilisées, la parole publique était réservée aux hommes et parfois, seulement à certains hommes. Il y a un double mouvement dans l'évolution de nos sociétés. Tout semble indiquer qu'on va de sociétés réduites où tous les avis peuvent s'exprimer, même si on ne tient pas compte de tout, vers des sociétés où parce qu'il y a de nombreuses personnes, on restreint le droit à la parole. Effectivement, essayez de mener une assemblée de 100 personnes quand il y a 1 ou 2 groupes d'opposants à la politique générale. Certaines assemblées d'associations sont très houleuses et pourtant, le nombre de participants est limité.

Les sociétés mettent donc en place des structure permettant la tenue des conseils, mais souvent en excluant certaines composantes de la société. Dans un second temps, le "bon sens" revient et on tente de mettre en place des solutions pour que toutes les composantes de la société participent.

Beaucoup s'étonnent que dans certains pays de colons, le droit de vote a été donnée très vite aux femmes. Or, on se retrouve dans des sociétés où chaque membre participe pleinement et directement à la vie de la société. Dans les sociétés plus structurées, ce droit a été plus difficile à obtenir, parce qu'il allait à l'encontre des solutions mises en place au fil des temps.

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Message Publié : 06 Juin 2013 19:23 
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Grégoire de Tours
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Localisation : Suisse
A vrai dire je pensais surtout à la période contemporaine, mais merci pour ces précisions « antiques ». Et il y a bien des entités qui ont accordé le droit de vote aux femmes au XVIIIe siècle déjà. Si l’on se penche sur le XXe siècle, on remarque que cette évolution a été refusée par plusieurs parlements, par exemple en France en 1906, 1919, 1922, etc. Le droit de vote des femmes sera ainsi accordé en 1944 par le Comité français de la libération nationale. (une chronologie ici : http://www.assemblee-nationale.fr/histo ... ologie.asp). Cet acquis s’est effectué sans votation populaire.

Il y a eu une vague d’acceptation de ce droit à la fin de la Grande Guerre, en 1918 et 1919. L’exemple le plus fameux est sans doute celui de la Grande Bretagne et son Representation of the People Act. Mais il faut également mentionner l’Allemagne, le Canada, les Etats-Unis (un peu plus tard je crois).

Dans la plupart des cas, ce sont les Parlements qui ont accordé ce droit sans votation populaire. Je ne sais pas s’il y a eu des études d’opinion parmi la population masculine pour savoir si les hommes étaient en faveur de ce droit. Mais il est clair qu’il y a eu des mouvements de contestations contre ces revendications ou contre les suffragettes, et ces mouvements comprenaient aussi des femmes. Il faut également mentionner les critiques faites envers les suffragettes par de nombreuses femmes (qui ne se reconnaissaient pas dans ce mouvement principalement constitué d’aristocrates). Il est ainsi très difficile de savoir si ce droit aurait été accordé dans ces pays si la demande en avait été formulée au peuple (ou plutôt aux hommes…)



D’un autre côté, en Suisse, il aura fallu attendre 1971 pour que le droit de vote aux femmes soit accordé au niveau fédéral. L’un des raisons avancées par les historiens pour expliquer ce retard par rapport aux autres pays occidentaux est celle de la démocratie directe. En effet, c’est une votation populaire qui, en 1971, a accordé ce droit.

Mais ce vote a été précédés d’autres votations cantonales (après la Grande guerre dans plusieurs cantons) et fédérales, en 1957, où les hommes avaient à chaque fois voté contre (il y a un petit historique des votations ici : http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F10380.php) Le cas de 1957 est intéressant puisque „En 1957, comme la controverse publique menaçait le projet de protection civile, le Conseil fédéral présenta un projet de votation sur le suffrage féminin. Avec le soutien des parlementaires opposés à celui-ci, qui voulaient provoquer un refus populaire, dont ils se sentaient assurés, le projet passa la rampe des deux Chambres en 1958.“ (ibid). Et en effet, le projet fut refusé par le corps des votants à presque 67%. Je me rappelle d’ailleurs d’une séance de séminaire où nous avions abordé quelques-uns des argumentaires présentés lors de ces différents scrutins. Et il est intéressant de les remettre dans le contexte de l’époque, de voir à quel point l’opposition venait aussi de milieux féminins, et à quel point la démocratie directe a été un frein.

Pourtant, en Suisse comme ailleurs, la société avait évolué avec, par exemple, pendant la Première Guerre mondiale, non pas la mise au travail des femmes, mais un transfert vers des postes plus intéressants. La société avait donc autant évolué que dans les autres pays où ce droit a été accordé plus tôt.


D’où, en conclusion, ma comparaison. Dans le cas du droit de vote des femmes au XXe siècle, il est légitime de penser/supposer que les lois de nombreux pays ont devancé les mentalités et que, comme ce fut le cas en Suisse, le « peuple », du moins ceux qui avaient le droit de vote, n’était pas prêt à franchir le pas.

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Message Publié : 07 Juin 2013 8:38 
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Georges Duby
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Adulith a écrit :
Je ne sais pas s’il y a eu des études d’opinion parmi la population masculine pour savoir si les hommes étaient en faveur de ce droit.
Je redonne mon opinion et la complète: Jusqu'à une période récente l'état de l'opinion n' était pas à l'origine du vote des lois, en France. C'est un anachronisme que de le supposer.
Pour le droit de vote des femmes, par exemple, c'est en pensant "droits de l' homme" ou "droits naturels" que des hommes et femmes proposent que le droit de vote soit accordé aux femmes. Après-guerre, le sujet est à l'ordre du jour, notamment parce que les femmes ont tenu des emplois d'homme dans les usines pendant que les maris étaient au front, ont été infirmières de guerre ...
Les radicaux notamment s'opposent au vote féminin en supposant non pas que l'opinion n' était pas prête, elle ne l'était pas effectivement, mais que le vote des femmes serait à droite parce qu'elles auraient été influencé par les prêtres.
Thucydide-débats: " En 1919, les choses semblèrent se débloquer : la République ne pouvait demeurer muette face à cette dette patriotique et sociale à l'égard des femmes. A la Chambre des députés, la commission du suffrage universel rouvrit le dossier et proposa de donner le droit de vote pour les seules élections municipales à toutes les femmes de plus de trente ans. La Chambre des députés alla plus loin et accorda le droit de vote aux femmes sans aucune autre restriction que celles s'appliquant aux hommes.
Mais le Sénat bloqua obstinément le dossier. Clemenceau affirma ainsi que le droit de vote était un droit naturel, mais que les femmes étaient insuffisamment éduquées et qu'elles constituaient des proies trop faciles à manipuler (il pensait alors à l'influence de l'Eglise, surtout dans les campagnes). En 1935, le même schéma se produisit. "

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Message Publié : 07 Juin 2013 9:05 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 15 Août 2012 20:56
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Localisation : Suisse
Alain.g a écrit :
Je redonne mon opinion et la complète: Jusqu'à une période récente l'état de l'opinion n' était pas à l'origine du vote des lois, en France. C'est un anachronisme que de le supposer.


Je ne dis pas le contraire, la supposition étant d'ordre contrefactuel. En effet, puisque je compare avec un pays où le vote populaire est et était à l'origine de nombre de lois, il ne me paraît pas inutile de connaître l'opinion des citoyens en France pour essayer d'imaginer la réaction de ceux-ci s'ils avaient été consultés sur le sujet. Il s'agit certes d'un "si", avec tous les problèmes qu'il comporte, mais cette comparaison permet de mettre en relation les mentalités des citoyens de chacun de ces pays.

Et, si j'adopte le point de vue suisse, je dois me demander pourquoi ce pays a été très en retard dans l'acceptation de ce droit. Et à ce niveau, je suis obligé de faire preuve d'imagination car justement, l'une des grandes différences entre la Suisse et la France réside dans une culture et des pratiques politiques très différentes, avec d'un côté une démocratie représentative où le peuple (à l'époque les hommes) élit des représentants qui ensuite font les lois et une autre démocratie mélangeant représentativité et vote direct.

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