Si ma question était polémique, elle l'était en réaction à une objection péremptoire sur un point particulier alors que mon affirmation était d'ordre général, manière de dire que ce n'est pas ainsi qu'on débat intelligemment et sereinement.
Le sujet est d'ordre général : la démocratie en Angleterre. J'y ajoute, parce qu'elle me semble indissociable de la question de la démocratie en tant que régime politique, celle des libertés tant individuelles que collectives en Angleterre. Il convient de ne pas s'arrêter sur un point particulier en ignorant tout le reste mais de dresser un bilan et de le faire en comparaison avec le reste de l'Europe. Je maintiens que sur les dix-huitième et dix-neuvième siècle, ce bilan classe l'Angleterre dans le haut du classement pour ce qui concerne la démocratie et les libertés dans les différents pays d'Europe.
On ne peut certes ignorer que la conquête de l'Irlande par l'Angleterre a été tout sauf démocratique et respectueuse des individus. Mais c'est une autre question. Bornons-nous à observer les institutions anglaises ainsi que les droits des personnes sur le sol anglais.
En 1700, il est bien question de démocratie en Angleterre. Il en est pour preuve que le chapitre de l'
Esprit des lois de Montesquieu consacré à la démocratie est intitulé
De la constitution d'Angleterre. Selon les normes actuelle, l'Angleterre n'est encore qu'une démocratie très imparfaite, mais elle contient déjà les principaux ingrédients qui caractérisent une démocratie. Le pouvoir judiciaire est pleinement séparé des deux autres et le roi ne peut plus édicter de lois sans le consentement des deux chambres qui représentent le peuple même si cette représentation est loin d'être équitable.
Citer :
En revanche en 1800 comme en 1900 le sort des catholiques et en particulier des Irlandais est incontestablement un des plus défavorables d'Europe - il est en fait comparable à celui des Juifs russes.
Ce n'est pas vrai. Ne confondons pas le sujet du comportement des Anglais faisant main basse sur l'Irlande avec tout ce que cela a pu comporter comme violations des droits les plus élémentaires avec celui des libertés individuelles sur le sol anglais de même que la démocratie en France sous la Troisième République et la colonisation du Congo sont deux sujets à ne pas confondre même s'il est légitime de remarquer que les droits reconnus sur le sol métropolitain auraient logiquement dû s'appliquer aussi outre-mer.
Que je sache, le très catholique François-René de Chateaubriand fuyant la Révolution fut très bien accueilli sur le sol anglais et il ne lui fut aucunement cherché noise du fait de sa religion.
En fait, dès la fin du dix-septième siècle, l'Angleterre est tolérante, même à l'égard des catholiques. L'étude suivante est intéressante à lire :
http://www.erf-auteuil.org/conferences/cycle-2013-2014-5-lurbe.pdfUn extrait :
Par contre en Angleterre, même si les catholiques restent des citoyens de seconde zone, il n’y a pas de persécutions. Il y a évidemment pour eux, au XVIIIe siècle, un statut minoré, mais il était infiniment plus confortable et moins dangereux d’être catholique en Angleterre que d’être protestant en France. On peut parler pour l’Angleterre d’une répression anti-catholique, articulée à des raisons que Locke expose très bien. Mais dans un climat social de tolérance, les catholiques anglais peuvent, s’ils restent tranquilles, continuer à mener leur vie; les prêtres catholiques ne sont ni suppliciés ni mis à mort; les catholiques anglais ne s’enfuient pas de chez eux. Alors qu’en France, la persécution est active, féroce et brutale.Ce qui pose problème, ce n'est pas la foi des catholiques, c'est leur allégeance au Saint-Siège, puissance étrangère et la crainte que, s'ils parviennent au pouvoir, ils ne persécutent les non-catholiques comme le fait le roi de France. Mais un catholique qui se contente d'aller à la messe sans militer trop ouvertement ne gêne personne et on le laisse faire.
Citer :
Le fait est que le système politique britannique a été libéral bien avant d'être démocratique
Non, l'Angleterre est devenue progressivement à la fois libérale et démocratique et en avance sur la plupart des pays d'Europe.
D'ailleurs existe-t-il des démocraties non libérales ? Si le critère de la démocratie est le seul suffrage universel, alors l'Espagne de Franco et même l'Iran des mollah sont plus démocratiques que l'Angleterre de 1914. Si l'on veut... Pour ma part, j'en reste à Montesquieu pour qui démocratie et liberté sont indissociables. Une démocratie sans liberté n'est qu'une apparence de démocratie et une vraie tyrannie.