En guise d'étrennes, un petit aperçu des quelques progrès enregistrés dans l'ameublement du palais, à la suite d'un second déplacement aux archives, avec la consultation de documents sur les travaux et l'ameublement de 1805-1808 et les inventaires de 1807 et 1816. Lors d'un troisième qui aura lieu mercredi, j'ai réservé les documents relatifs aux travaux de 1881-1852 qui devraient permettre de préciser la liste des batailles de la salle des maréchaux.
A la suite de la mention des dimensions du tapis de la chapelle impériale (6.80 m sur 2.60m) dans l'inventaire de 1807 j'ai tenté une évocation du tapis, dont la description de l'inventaire indique "Un tapis de pied pour l’autel en moquette fond vert dessin à mouches aurores et noires encadré d’une bordure sur 3 côtés elle est fond lilas et porte le chiffre de Sa Majesté", ceci pour restituer l'atmosphère de cette partie de la chapelle. A noter que c'est un tapis de ce type qui garnit le sol de Notre Dame dans le tableau "le Sacre" de David.
Vue depuis le sanctuaire
depuis la nef
et depuis la tribune impériale
J'ai également eu confirmation que le garde corps du premier étage est bien en pierre, dans le cadre d'un échange entre le duc de Cadore, intendant général de la Couronne et M. Demazis, administrateur du mobilier de la Couronne au sujet de l'ameublement de la chapelle en 1811. Il s'agit pour l'administrateur d'obtenir de l'intendant l'achat de genouillères, c'est à dire des "parties d'étoffes tendue de l'appui jusqu'à la banquette" tel que se plaît à le rappeler le premier au second. Je reproduis l'ensemble du passage qui confirme la nature des appuis et offre une anecdote pittoresque sur les dames de la Cour. Ces genouillères sont "nécessaires tant pour garantir les dames du froid de la pierre de la tribune que pour empêcher le frottement des vêtements contre cette pierre qui est très tendre et les blanchirait. Plusieurs fois on s'est plaint de ces inconvénients".
Les mémoires des fournisseurs offrent un éclairage intéressant sur la réutilisation des éléments mobiliers de l'Ancien Régime. Ainsi cette "napoléonisation" des portières aux armes royales de France. Je connaissais plutôt le procédé inverse (remplacement des symboles napoléoniens par les symboles royaux sous la Restauration).
"Budget 1807- dépense d’ameublement pour les Grands Appartements des Tuileries
11 janvier 1809
(...)
Second Salon : suppression à huit portières d’un grand écusson et remplacement dudit par l’aigle impérial 200fc
Suppression de toutes les fleurs de lys et remplacement desdits en attributs impériaux aux dites portières 800 fc
Pour retoucher les guirlandes de fleurs de quatre desdites portières dont les couleurs sont passées 350 fc
Doublure desdites quatre portières en toile rouge. Fourniture et façon à 126 fc
La soumission de Bellanger "fabricant de tapis" du 8 avril 1808 montre le souci d'économie dans cette opération, car il est question d'intervenir a minima sur les couronne car seules "Les fleurs de lys au nombre de cinq à chaque couronne doivent être évidées et les divers attributs qui les remplaceront seront faits en ouvrage de fabrication à l'aiguille".
Quelques vues du salon des Grands Officiers avec son ameublement quasiment achevé (manquent trois bronzes sur les cabinets Boulle et les reflets des miroirs, un peu étranges...) :
Une vue d'ensemble depuis l'entrée, avec les lustres qui sont à 8 lumières et de style "Louis XV" d'après la description de l'inventaire. Ils paraissent petits mais sont aux bonnes dimensions (1,42 m de haut sur 88 cm de diamètre)
Détail sur l'entrée : encadrant la colonne d'Austerlitz, deux bustes d'empereurs romains inconnus, (désignés ainsi en 1810 et encore aujourd'hui sur la base de la RMN ; présentés dans le salon de Vénus à Versailles), décrits comme "deux fûts de colonne en marbre Languedoc, les bases noires, supportant chacun un buste en marbre blanc et les draperies des dits sont en marbre de couleurs" ; dans l'embrasure, une consoles d'un modèle semblable à celui conservé maintenant dans la salle à manger des Porcelaines à Versailles, que je pense être utilisées comme des bureaux pour les huissiers, En effet il n'y a pas de table en bois noirci à cet usage comme c'est le cas dans les autres pièces et les tiroirs de ces consoles laissent entendre cette fonction. Dessus est posée une lampe bouillotte en cuivre argenté décrite dans l'inventaire.
Une évocation de la pendule de 3.15 m de haut qui marquait l'heure dans le salon, à partir de modèles de régulateurs de Lepaute et de Janvier (qui livre une pendule géographique au palais en 1806) et les éléments décrits de l'inventaire (notamment les 6 consoles supportant la pendule). La pendule tournante avec tête de serpent indiquant l'heure est d'un modèle qui m'a été fourni par le Mobilier National d'après l'inventaire
La cheminée, encadrée des bustes de Titus et Néron et garnie avec tous ses éléments : statuette de Marc Aurèle, vases en serpentine de la collection du duc d'Aumont (Louvre), chenêts, grille, balai et pelle dans une encoignure en fer blanc (la pince et le soufflet sont de l'autre côté) ; l'écran (au palais royal de Bruxelles) orné du chiffre de l'empereur ; à droite, une Vénus en bronze saisie chez la Du Barry en 1794, sur un fût de colonne de 95 cm de haut. Au centre, deux fauteuils de représentation à carreau pour l'empereur et l'impératrice.
J'ai également commencé la reprise de la salle du trône à partir de l'inventaire et d'un dessin de Percier. Les pentes du dais descendent plus bas que dans la précédente restitution ; les armoiries impériales sont de la bonne forme (circulaire) sur fond violet ; un galon d'or fin de 2 cm de haut à la base de chaque marche, et sur la cheminée un modèle de pendule proche de celui de l'inventaire.
Meilleurs voeux pour la nouvelle année!