Dhu shara a écrit :
Et ils se sont basés sur quoi?
Vous avancez des "conclusions" un peu hatives.
Comme je donne mes arguments et mes sources, je ne vois pas où vous voyez de la hâte.
Le propos des islamologues n'est pas que les hadith soient faux, mais qu'ils témoignent plus des perceptions de la communauté musulmane à une certaine époque qu'à une parole du personnage historique appelé Mahomet.
Dans cette optique, aucun n'est à rejeter a priori, puisque le fait qu'ils aient été recensé montre que certains musulmans leur accordait une part de vérité.
Le dit cité par Goldziher a une qualité : il explique le fait historique mieux le fait historique de l'explosion de la quantité de paroles de Mahomet. Il faut donc qu'il ait été tenu pour authentique par certains Musulmans à certaines époques.
A mon tour, je crains que vous condamniez sur une bien faible base, avec une vitesse excessive.
Citer :
Le travail, justement, du Mouhaddith (je n'aime pas trop ce terme de Traditioniste que vous utilisez) c'est de "recouper" les sources.
Là encore, à notre époque, c'est la tradition qui nous indique qu'ils l'ont fait correctement.
Je résume pour que vous y voyiez plus clair sur le côté "auto-référentiel" :
- La Tradition affirme que les musulmans de la première heure mémorisaient pieusement les paroles de Mahomet
- La Tradition affirme que les musulmans de la génération suivante, atteints d'une frénésie de blasphème , ont inventé toutes sortes de paroles apocryphes
- La Tradition affirme que les traditionistes ont appliqué avec rigueur et sans aucun parti pris des méthodes scientifiques pour distinguer les vrais hadith des faux, restaurant ainsi l'islam quasiment dans sa pureté originelle.
(Soit dit en passant, on retrouve le processus apparition-foisonnement de doctrines-fixation du canon orthodoxe dans toutes les religions, à commencer par le christianisme).
Donc, un historien (j'aurais dû préciser : un historien moderne) en est réduit à cette Tradition unique, a priori sans autres sources : archéologique, administrative, écrits établis dans un autre but, récits d'observateurs extérieurs...
Si quelqu'un, de nos jours, affirmait : "Grégoire de Tours était considéré comme un grand historien à son époque. Il a utilisé une méthode fiable pour obtenir ses informations. Donc : il faut accepter ces informations sans réfléchir. Qu'en penserions-nous ?"
Citer :
Est ce qu'au moins vous avez une petite connaissance des fondements des sciences du hadiths ?
Antinéa en a fait un
ici exposé très précis (je la remercie au passage).
Les limites des méthodes (toute méthode en a...) sont faciles à voir :
Antinéa a écrit :
5- Les spécialistes du hadith ( muhaddithi) exigeaient :
- Une honnêteté exemplaire des transmetteurs la notoriété et la réussite entrent facilement en ligne de compte pour cela. Quel crédit apporter à des amis s'ils sont client du transmetteur ? D'autre part, le terme "ennemi" est bien vague dans un milieu agité aux alliances changeantes. Il aurait fallut établir l'honnêteté de ces amis et ennemis, et l'honnêteté des amis et ennemis de ces derniers...
- Le hadith doit être rapporté par de multiple source D'une part, les variantes signifient qu'il y a réinterprétation et non apprentissage par cœur. D'autre part, l'argument ne tient que si ces chaînes sont indépendantes, c'est-à-dire que des membres des deux chaînes n'ont pas été en contact (ou pire, en relation politique) pour que l'un puisse influencer les autres
- La ligne des transmetteurs doit être cohérente On aboutit encore à l'établissement des biographies précises pour chaque transmetteur, sachant que nous sommes dans un milieu dans lequel l'administration est encore fruste.
De plus, qu'un seul des membres de la chaîne ait adhéré à la conception citée plus haut : parole juste = parole vraie, et toute la chaîne est par terre (il peut avoir falsifié tous ses prédécesseurs). - Le vocabulaire utilisé Si un transmetteur connaît le dialecte de la Mecque, n'est-il pas capable de traduire une phrase dans ce dialecte ? S'il ne le connaît pas, peut-il rapporter la parole sans l'altérer ?
Avec la classification des hadiths par degré d'irrecevabilité, nous sommes bien dans le cadre d'une orthodoxie établie, qui rejettent les dits qui la contredisent.
Avant de balayer toutes ses critiques d'un revers de main, il serait intéressant de voir comment était effectué le travail des traditionistes sur les isnad. Quelqu'un peut-il en citer un échantillon ?
Les islamologues qui ont critiqué les hadiths n'ont pas utilisé des hadiths les uns contre les autres : cela aurait été une méthode de traditioniste. Ils ont essayé dans la mesure du possible de trouver des informations dans les matériaux à leur disposition.
Ainsi, la méthode de Goldziher, pour autant que je puisse en juger, consiste à comparer les hadiths avec les ouvrages (fiqh, etc.) des personnes faisant partie de la chaîne de transmission. Si une querelle théologique a eu lieu, qu'une telle personne est impliqué, et que le hadith règle la question, mais n'est pas cité dans la querelle, on peut en déduire que la personne n'avait pas connaissance du hadith (ou qu'elle avait une très mauvaise mémoire...)
Ceci dit, comme je ne me contente pas de savoir une personne digne de confiance pour prendre aux mots ses dires, je souhaite consulter l'ouvrage de Goldziher pour juger de sa méthode.
Une autre piste, suivie par AL de Prémare, est de considérer les akhbar, fragments d'histoire rassemblés dans un but historiographique. Selon l'auteur, certains hadiths ne sont que des akhbar combinés entre eux, l'isnad étant la résultante de leurs chaînes de transmissions fragmentaires.
Je suis en train d'essayer de contacter le professeur de Prémare pour obtenir plus de détails.
Dhu Shara a écrit :
Hadith = Parole de Mahomet
Tradition, à la limite pourrait admettre dans son acception communément admise, le sens de "Sunna"
Je pense, Dhu Shara, que vous vous laisser abuser par la polysémie du mot tradition en français, et par le fait que les traductions de "Hadith" et de "Sunna" ne sont rendus qu'imparfaitement en français.
D'après mes lectures, le terme "tradition" s'applique aux deux concepts. Mais parler de sunna insiste plus sur les coutumes et obligations, en relation avec le fiqh qui aboutit aux lois composant la charia (le sens est plutôt "loi orale"). Parler de hadith insiste plus sur la relation de ces coutumes avec Mahomet et ces disciples (le sens est plutôt "histoire transmise par les "anciens") .
Boukhari, Muslim, Abu Dawud, Malik, et leurs confrères sont les savants versés dans la science du hadith, les grands traditionnistes, traduction usuelle de muhadith.
Je pensais, en m'appuyant sur
Wikipedia, que les membres de la chaîne était eux-mêmes des muhadith et que les traditionistes n'étaient que le dernier maillon de la chaîne. Mais il se peut que vous ayez raison et que le terme de muhadith s'applique uniquement aux savants.
Et attention, certains maillons de la chaîne ont pu être eux-mêmes des traditionistes.