Isidore, je pense entre autres, au traité dit "centenaire" qui a été signé entre la Régence d'Alger et la France en 1689. D'autres traités ont été conclus entre les deux pays après des périodes de rupture relativement courtes. La Régence d'Alger (mais aussi celles de Tunis ou de Tripoli) a signé des traités avec d'autres puissances bien sûr: l'Angleterre, les Pays Bas (les Provinces Unies, disait-on alors), les pays scandinaves (Suède, Danemark), Venise etc.
Alain g., j'aimerais reprendre ce que tu as dis.
Sur ton premier point: Le Sultan ottoman nommait effectivement des pachas à la tête des régences de Tunis et d'Alger (et non pas des beys) pour une période de trois ans, en général. Mais il faut savoir que ce régime a fonctionné à partir de la fin du XVIe siècle, pas avant. En outre, les pachas ont progressivement perdu tout pouvoir réel dès les premières décennies du XVIIe siècle. Le véritable détenteur du pouvoir était la Milice des janissaires (du moins au XVIIe siècle). Au XVIIIe siècle, le bey de Tunis et le dey d'Alger ont beaucoup plus de pouvoir et le Sultan se trouve acculé à leur accorder la dignité de pacha sans participer en rien à leur nomination, autrement dit, l'autonomie bien réelle des régences "barbaresques" au XVIIe siècle devient une quasi indépendance au XVIIIe siècle. Merouche appelle justement les régences, des Etats d'Empire.
Sur ton deuxième point: Le janissaires font la loi. Il faut se référer à ce que j'ai dis au point précédent. Ce n'était pas aussi simple. Il faut savoir également que les Ottomans ne dominaient pas seulement la côte mais aussi dans une bonne partie de l'intérieur du pays (Constantine, Mascara, Médéa, Sétif, Mila, Tlemcen, Biskra, Kairouan, etc.)
Sur ton troisième point: Il faut attention à ne pas utiliser le concept de féodalité qui s'applique bien à l'Europe (à une époque donnée) pour des régions qui ont des traditions historiques différentes. Dans l'Empire Ottoman, la terre appartient nominalement à Dieu (ou au sultan/calife, le vicaire du prophète sur terre). Dans les faits, dans la Régence d'Alger, par exemple, la terre appartenait collectivement à la tribu (du moins, c'est le régime le plus fréquent) et non pas à un quelconque seigneur qui serait à la tête de vassaux. Ceci étant dit, une partie des terres appartenait tout simplement à l'Etat (Beylik) et d'autres à des particuliers mais ce n'étaient pas les régimes les plus répandus. La majorité de la population était constituée de tribus semi-nomades (agro-pastorales). Dans ces conditions, il était exclu de diviser la terre, d'autant plus que la culture la plus répandue était la culture de céréales (une culture extensive).
Sur ton quatrième point: Les Barbaresques avaient leur propre flotte qu'il ne faut pas confondre avec la flotte stationnée en Turquie. Les deux flottes agissaient souvent de concert au XVIe siècle, à l'époque du grand affrontement turco-espagnol. Mais dès la fin du XVIe siècle, la flotte du sultan se retire du bassin occidental de la Méditerranée qui devient le domaine des flottes barbaresques. Dès lors, ces flottes avaient leurs propres amiraux et leurs propres capitaines. Dire que ce flottes menaient une guerre contre l'Occident, c'est accorder trop vite une importance trop grande au jihâd. En fait ces "guerres" (en fait, la course) ne concernaient que les puissances européennes qui n'avaient pas de traité de paix avec les régences. Il faut savoir par exemple que la course algérienne a épargné la France durant la longue paix "centenaire" de 1689-1798. Ce n'est qu'un exemple. Je pense que l'on doit éviter de caricaturer. Le "choc des civilisations" n'a jamais été à l'ordre du jour: la reine Elisabeth avait par exemple proposé au Sultan ottoman de lutter ensemble contre les Habsbourgs au nom du monothéisme! (protestant et musulman). De même Louis XIV a essayé de se rapprocher avec le shah de Perse pour lutter contre les Ottomans. Une guerre insatiable entre islam et chrétienté, voilà ce qui relève du fantasme. Je donne un dernier exemple: pendant la campagne de 1543/1544, les Français et les Algériens se sont alliés pour bombarder Nice (qui n'était pas française, rappelons-le). La politique, encore la politique, toujours la politique. enfin, quand tu dis que les flottes barbaresques comprenaient des centaines de bâtiments, c'est plus qu'excessif. A son apogée (1580-1640), la flotte algérienne ne comprenait qu'environ 70 bâtiments propres à l'activité corsaire.
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