Le Portugal Musulman.
L'Occident d'al-Andalus sous domination islamique (sous-titre)
Le Portugal a appartenu au monde musulman pendant cinq siècles et demi. Cette période largement occultée par l’histoire officielle qui fait débuter l’histoire du Portugal au XIIe siècle et été peu étudié par les spécialistes de l’islam qui se sont focalisés sur la brillante Andalousie. Christophe Picard répare un oubli dans cette somme très fouillée, appelée à devenir un livre de référence.
« Entre Méditerranée et océan Atlantique, l'Occident ibérique, conquis par les Arabo-musulmans à partir de 711, a été largement imprégné par la culture de la dernière grande civilisation méditerranéenne et orientale présente cinq siècles durant dans la région. La conquête chrétienne - et non la reconquête - commencée dès les premières décennies du VIIIe siècle et achevée, dans la zone occidentale, en 1250, a donné naissance au Portugal et au royaume de Castille, tandis que disparaissait la domination de l'islam et que refluaient les élites musulmanes au profit de nouvelles forces dominantes qui conservèrent toutefois, de manière consciente ou non, de nombreuses marques de ce passé musulman dans leur patrimoine. Pourtant, jusqu'à une période récente, seule la zone centrale d'Al-Andalus et les grandes dynasties ont retenu l'attention des historiens. Les recherches sur l'Orient ibérique ont représenté la première étape dévoilant la diversité d'Al-Andalus et l'importance, pour son élaboration, de ses régions périphériques. Les travaux en cours, s'ajoutant à des sources écrites et matérielles partielles mais nombreuses, permettent de montrer à quel point l'Occident d'Al-Andalus, marqué par sa proximité avec l'océan Atlantique, a connu un épanouissement qui mérite un examen attentif et a pesé de tout son poids sur les transformations de la société d'Al-Andalus. La restitution de cette histoire régionale et des grands traits de la société luso-arabe permettent également de reprendre les grandes questions qui animent le débat scientifique sur Al-Andalus. » (présentation de l’éditeur)
« Par le biais d'une étude historique, puis d'une analyse géographique et sociale, l'auteur met en évidence les spécificités du Gharb al-Andalus. Parmi elles s'inscrit la double dynamique politique qui a forgé cette région. D'une part, la conquête arabe n'y a pas endigué une histoire dominée par les dissidences. Il a fallu deux siècles au clan omeyyade pour circonvenir l'Al-Andalus et les élites locales, arabes et berbères mais aussi les grandes familles wisigothes souvent converties, restent puissantes, toujours prêtes à profiter du moindre affaiblissement du pouvoir central. D'autre part, une force centripète accompagne un processus d'acculturation des élites traditionnelles. "Toutes les grandes familles qui prennent le pouvoir dans la région (...) se conduisent comme des potentats musulmans ayant assimilés les pratiques de l'islam dont elles se réclament." Dès le IXe siècle, le ciment d'une identité arabo-andalouse prend puis, de Cordoue aux provinces les plus reculées, un modèle politique arabo-musulman se diffuse. La ville, centre politique par excellence et symbole de la civilisation islamique, avec sa mosquée et ses bains publics, se développe, attirant élites, marchands et artisans. "L'espace urbain reflétant seul l'univers mental des intellectuels musulmans", ceux-ci délaissent l'étude des campagnes, dans cette société pourtant très majoritairement agraire. (…) Cette région, toujours en résistance face au pouvoir central, est marquée par la permanence de grands clans et la "durée de ses lignages au sommet de la hiérarchie sociale". Pour réduire la puissance des chefs de clan et contribuer au développement économique de ces régions, le pouvoir central avait pris le pari d'une vaste démilitarisation de la région, assurant ainsi une paix et une prospérité, mais induisant la propre faiblesse militaire d'Al-Andalus face aux troupes chrétiennes. » (extrait d’un article d’Agnès Devictor, Le Monde, 31 août 2001)
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