Je voudrais quand même apporter un autre son de cloche… Effectivement il est souvent dit que la priorité des omeyyades allait à l'arabisation plutôt qu'à l'islamisation car la
djizya aurait été plus rentable que la simple
zakāt . Mais c'est faux… En fait on semble même comprendre que dans la mesure où les protégés restaient dans leurs contrées, le pacte était qu'ils prennent les armes en cas de guerre et pas vraiment de payer des taxes plus que de raison car cet acte a une dimension purificatrice ; et donc réservée aux musulmans. Ils doivent payer la djizya uniquement pour s'humilier.
Par contre, s'ils s'amusent à aller commercer à l'étranger alors ils ne sont plus disponibles en tant que réservistes et donc dans ce cas, ils devront s'alléger de 10 % de leurs transactions au profit des dominateurs musulmans. Nous avons des traces écrites de ceci la meilleure étant un texte de Malik ibn Anas très ancien qui date du huitième siècle ; du moins un rapport de ses propos.
Il faut bien prendre conscience que l'imam Malik est le père fondateur de l'une des quatre écoles juridiques de l'Islam donc une autorité incontestée (du moins l'intérieur de son école) et même jusqu'aujourd'hui. En clair, texte ô combien normatif.
Citer :
وحدثني يحيى عن مالك أنه بلغه أن عمر بن عبد العزيز كتب إلى عماله أن يضعوا الجزية عمن أسلم من أهل الجزية حين يسلمون. قال مالك مضت السنة أن لا جزية على نساء أهل الكتاب ولا على صبيانهم وأن الجزية لا تؤخذ إلا من الرجال الذين قد بلغوا الحلم وليس على أهل الذمة ولا على المجوس في نخيلهم ولا كرومهم ولا زروعهم ولا مواشيهم صدقة لأن الصدقة إنما وضعت على المسلمين تطهيرا لهم وردا على فقرائهم ووضعت الجزية على أهل الكتاب صغارا لهم فهم ما كانوا ببلدهم الذين صالحوا عليه ليس عليهم شيء سوى الجزية في شيء من أموالهم إلا أن يتجروا في بلاد المسلمين ويختلفوا فيها فيؤخذ منهم العشر فيما يديرون من التجارات وذلك أنهم إنما وضعت عليهم الجزية وصالحوا عليها على أن يقروا ببلادهم ويقاتل عنهم عدوهم فمن خرج منهم من بلاده إلى غيرها يتجر إليها فعليه العشر من تجر منهم من أهل مصر إلى الشام ومن أهل الشام إلى العراق ومن أهل العراق إلى المدينة أو اليمن أو ما أشبه هذا من البلاد فعليه العشر ولا صدقة على أهل الكتاب ولا المجوس في شيء من أموالهم ولا من مواشيهم ولا ثمارهم ولا زروعهم مضت بذلك السنة ويقرون على دينهم ويكونون على ما كانوا عليه وإن اختلفوا في العام الواحد مرارا في بلاد المسلمين فعليهم كلما اختلفوا العشر لأن ذلك ليس مما صالحوا عليه ولا مما شرط لهم. وهذا الذي أدركت عليه أهل العلم ببلدنا.
En voici la traduction…
Citer :
Yahya me rapporta que Mālik apprit que ʿUmar Ibn ʿAbd al-ʿAzīz avait écrit à ses gouverneurs : « Ne plus prendre de capitation (ğizya) aux tributaires (dhimmīs) qui ont embrassé l'Islam.» Mālik a dit : « Il est de la Sunna de ne pas imposer l'impôt de capitation aux femmes des gens du Livre ni à leurs enfants. Il est obligatoire pour les hommes pubères. D’autre part, la capitation n’est pas perçue de ceux qui sont protégés par les musulmans, ni des mazdéens, pour ce qu’ils possèdent comme biens tels les palmiers, les vignes, les plantations, les troupeaux, car l’aumône n’a été en principe demandée aux musulmans que dans le but de les purifier pour qu’ils la donnent aux pauvres. Et cette capitation a été imposée aux gens du Livre pour les humilier. Ils ne devaient, dans leurs pays, aucun tribut sur leurs propres biens, car ils ont conclu un pacte de soumission. S’ils font des transactions commerciales dans les pays des musulmans, qui est d’ailleurs leur fin, on perçoit le dixième de leurs transactions. En outre, la capitation leur a été imposée, et ils l’ont acceptée, afin qu’ils y demeurent et le défendent contre l’ennemi. Si l’un d’eux quitte son pays pour un autre où il pratiquera le commerce, il devra le dixième de ses transactions. Il en est de même pour ceux qui sont en Égypte et qui la quittent pour la Syrie, ceux de Syrie pour l’Irak, ceux d’Irak pour la Médine ou pour le Yémen ou pour d’autres pays (musulmans), tous ont à payer le dixième. Il est de tradition que les gens du Livre ne soient soumis à aucune zakāt (aumône légale), ainsi que les mazdéens, pour leurs biens, leurs troupeaux, leurs fruits et leurs plantations. Ils peuvent même garder leurs religions, sans qu’ils soient obligés de les renier. Mais, tant qu’ils ont à commercer dans les pays musulmans, ils doivent payer le dixième de leurs transactions, car cela ne forme pas une clause du pacte qu’ils ont conclu, ni une faveur qui leur a été accordée. C’est ce que j'ai appris des oulémas à Médine.»
Dans la pratique, nous avons même des traces de ce qui s'appelle purement et simplement une annulation de la djizya par Omar II (à ne surtout pas confondre avec le calife « bien guidé »). Mais bon précisons tout de suite qu'a chaque règle il faut une exception est ici nous avons clairement affaire à une exception :
Citer :
حدثَنِي شيخ من علماء أهل الكوفة قَالَ: جاءَ كتاب من عمر بن عبد العزيز رضِي اللهُ تعالَى عنه إِلَى عبد الحميد بن عبد الرحمن: "كتبت إلي تسألني عن أناس من أهل الحيرة يسلمون من اليهود والنصارى والمجوس وعليهم جزية عظيمة وتستأذنني فِي أخذ الجزية منهم، وإن الله جل ثناؤه بعث محمدا صلَّى اللهُ علَيهِ وسلَّم داعيا إِلَى الإسلام ولم يبعثه جابيا؛ فمن أسلم من أهل تلك الملل فعليه فِي ماله الصدقة، ولا جزية عليه، وميراثه لذوي رحمه إِذَا كان منهم يتوارثون كما يتوارث أهل الإسلام، وإن لم يكن لَه وارث فميراثه فِي بيت مال المسلمين الذي يقسم بين المسلمين، وما أحدث من حدث ففي مال الله الذي يقسم بين المسلمين يعقل عنه منه. والسلام. "
Et voici la traduction…
Citer :
Un vieillard parmi les savants de Kūfa m’a rapporté que ʿUmar b. ʿAbd al-ʿAzīz a écrit ceci à ʿAbd al-Ḥamīd b. ʿAbd al-Raḥmān: « Tu m'as interrogé au sujet d'habitants de Ḥīra, juifs, chrétiens et mages, qui professent [actuellement] l'Islam et sur qui pèse une lourde capitation, et tu me demandes l'autorisation de la percevoir. Or Allāh a envoyé Muḥammad en qualité de prédicateur de l'Islam, Il ne l'a pas envoyé en qualité de percepteur. L'adepte d'une de ces religions qui s'est converti doit payer la dîme aumônière (ṣadaqa) sur ses biens et ne doit pas de capitation personnelle; sa succession revient à ses parents s'il en a, et ces gens ont entre eux la même vocation héréditaire que les adeptes de l'Islam; à défaut d'héritier, la succession est versée au Trésor public musulman, qui opère la répartition entre les musulmans; le dommage que l'un d'eux vient à causer retombe sur les biens d'Allāh, qui sont répartis entre les musulmans et où est puisé, à la place du coupable, le montant de l'expiation ».