Tonnerre a écrit :
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Mais le titre d'Emir des Croyants a été porté officiellement au Maroc par Youssef Ibn Tashfin
Quoiqu'il en soit, dire que la dimension religieuse du monarque et le charisme qui en découle sont intrinsèques à la monarchie de ce pays dès les origines relève de l'èvidence.
Je suis tout à fait d'accord avec vous sur ce point, au Maroc le souverain est commandeur des croyants et cette dimension religieuse a été mise en évidence dès le règne du deuxième souverain alaouite, Moulay Ismail, qui avait entrepris de restaurer le mausolée d'Idriss II et avait accordé d'importantes prérogatives spirituelles à la famille des chorfas idrissides.
Par ailleurs, l'Islam au Maroc, officiellement de rite sunnite et malékite, est également riche de traditions populaires qui mettent à l'honneur les confréries soufies dont certaines ont un rayonnement international.
Je connais l'ouvrage de Bernard Lugan mais personellement je le trouve incomplet. Concernant Idriss Ier, la coalition des Awrabas originaires des Aurès dans l'actuelle Algérie (c'étaient donc des descendants de Numides ?) s'étendait surtout sur la région de Volubilis (antique cité romaine de Maurétanie Tingitane) et était très loin d'englober l'ensemble du Maroc actuel. Par exemple, la puissante confédération berbère des Berrhouattas contrôlait les plaines occidentales (la région de Casablanca aujourd'hui) et son originalité résidait dans le fait que les Berrhouattas professaient une religion particulière, syncrétisme d'islam et de christianisme. Et puis dans les oasis du Tafilalt se situait l'émirat de Sijilmassa, où le courant kharijite de l'islam était de rigueur, Sijilmassa qui s'enrichissait du commerce de l'or avec le royaume du Ghana.
Il convient aussi de parler de l'émirat de Nokour, sur la côte méditerranéenne du Maroc, qui gravitait dans l'orbite des Omeyyades de Cordoue. Comme vous le voyez les Idrissides devaient cohabiter avec d'autres entités politiques, parfois concurrentes.
Idriss Ier est enterré à Moulay Idriss, une petite ville sainte élevée à proximité immédiate des vestiges de Volubilis. Quant à son fils et successeur Idriss II, son tombeau se trouve à Fès.
Fès, qui fut peuplée d'Andalous, et de Kairouanais aux lointaines racines orientales arabes et perses, fut en quelque sorte le premier foyer réel d'arabisation au Maroc, avant l'arrivée des tribus bédouines hillaliennes aux XIIèmes et XIIIèmes siècles.
La fondation de l'université Qaraouiyine (l'une des plus anciennes au monde) en 857 a assuré à Fès un grand prestige intellectuel d'autant plus que des philosophes et des savants tels qu'Ibn Bajja, Maïmonide ou Ibn Khaldoun y ont étudié.
Il faut distinguer traditionnellement deux Fès : Fès al Bali (l'Ancienne), de fondation idrisside du début du IXème siècle, et Fès al Jadid (la Nouvelle) créee par les émirs mérinides en 1276 afin d'abriter leur résidence officielle et les services de leur administration. Fès fut la capitale du Maroc (en alternance avec Marrakech) jusqu'à l'établissement du protectorat français en 1912, date à laquelle Rabat fut choisie pour capitale et l'est encore actuellement.
Je vous conseille la lecture de l'ouvrage de Charles-André Julien, "Histoire de l'Afrique du Nord des origines à 1830", collection Payot