Cet enjeu m'interpelle beaucoup. Voici ce qui me fait réagir:
Dans la conscience de la plupart des gens, la distinction entre science historique et "histoire littéraire" ne s'effectue pas.
1.Qu'entends-je par "histoire littéraire"?
-D'une part, la littérature historique:
En effet, il n'y a pas que le "Da Vinci Code" (p-ê intéressant du point de vue littéraire, mais profondément infondé en ce qui concerne la vérité historique). C'est tout le problème de ce genre littéraire (auquel ont participé les Dumas, Jacq, Hugo [et même la chanson de Roland!] et bien d'autres).
Car comme l'a dit siriane, dans la lecture de fictions nous cherchons une proximité, une analogie avec notre vécu actuel, pour en tirer quelque chose de personnel. Et donc revêtir une apparence de vérité historique pour se rapprocher du vécu du lecteur participe de ce mécanisme.
La dérive est que les lecteurs prennent pour vrai ce qui ne se veut que fictionnel.
-D'autre part, il y a tous les documents réels, certes intéressants, mais anachroniques:
Je ne comprends pas qu'on puisse prendre au sérieux des éléments qui ne sont pas contemporains pour les faits qu'on étudie. Je mets dans cette catégorie toutes les représentations et interprétations postérieures au fait concerné (d'une décennie à plusieurs siècles). J'y mets aussi tout élément légendaire pris pour un fait véritable. Je pense aussi par exemple à tous les récits étiologiques a posteriori, pour les dirigeants ou autres, cherchant à légitimer leur pouvoir en inventant une filiation, en transformant les faits, en romançant leurs actions, etc.
La dérive est que les gens prennent pour contemporains ou réels des éléments qui sont postérieurs, ou transformés, ou inventés, etc, bref qui n'ont pas grand'chose à voir avec la vérité des faits.
2.En fait, par science historique, je comprend strictement tout ce qui se base sur des preuves vérifiables: artefacts archéologiques et documents officiels, seules sources précises et fiables.
Du fait de son éloignement temporel par rapport à ce qu'il étudie, si l'historien se veut vraiment scientifique, il doit agir avec précaution et méthode, et ne pas se laisser emporter par tous les discours ou les éléments susceptibles de mal influencer son jugement et de le faire dévier du projet scientifique.
C'est juste, l'historien regarde en arrière, mais il doit avoir de bonnes lunettes s'il ne veut pas jouer au "grand méchant flou".
Donc, ne mélangeons pas les torchons et les serviettes, comme on dit.
Est-ce que cette réflexion tient-la route?