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Ce sont surtout des historiens américains qui ont écrit sur le sujet, donc ce que l'on connaît en Europe provient de leurs travaux.
Ce qui est plutôt normal pour un sujet aussi spécifique. Le chercheur cité précédemment est suisse.
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Dans un premier temps, Custer a largement sous-estimé le nombre de ses adversaires. Au dernier moment il est par contre vrai qu'il a eu une estimation plus juste du nombre de guerriers qu'il avait en face de lui grâce à ses éclaireurs indiens (dont certains, effrayés par ce qu'ils avaient vu, lui conseillèrent de stopper et d'attendre des renforts). Il a surtout surestimé sa capacité à pouvoir gagner malgré son énorme infériorité en nombre.
Il me semble qu'il y a contradiction entre la première et la dernière phrase. Si Custer a fait une estimation plus juste le jour de la bataille, on ne peut pas affimer qu'il a sous-estimé l'ennemi. Et un rapport de force de 2.3 contre 1, comme à Little Bighorn, était un standard pour l'époque dans les guerres indiennes.
Les éclaireurs indiens n'ont jamais cherché à retenir Custer. Sur Crow's nest, les scouts arikaras ont au contraire encouragé Custer à attaquer tout de suite, croyant avoir été découverts par des éclaireurs sioux. Le mythe des éclaireurs avertissant Custer du danger est né sur les cendres de la défaite et n'a pas de réalité historique. Certes les éclaireurs étaient anxieux du combat à venir, mais à aucun moment ils n'ont conseillé à Custer de faire demi-tour ou d'attendre les renforts.
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Pas convaincu. Beaucoup d'historiens remettent en cause les chiffres officiels qui minimisent les pertes subies par Crook. La bataille de la Rosebud n'est en effet pas une victoire indienne, mais c'est un rude coup porté par Crazy Horse et ses guerriers aux régiments de Crook. Le demi-tour de Crook après la bataille de la Rosebud est certainement dû au fait qu'il a jugé ses troupes trop affaiblies pour continuer à avancer en territoire hostile.
Les pertes de Crook ont été enregistrées au Ministère de la Guerre, et sont confirmées par les témoins ce jour-là. Je n'ai pas connaissance de données qui pourraient faire penser à de lourdes pertes fédérales. Dans "The Battle of the Rosebud" (Neil Mangum, Utpon & Sons, 1998), on parle d'une grande escarmouche, sans plus. D'ailleurs ce sont les éclaireurs shoshones, 300 hommes, qui ont retenu les premiers assauts sioux.
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Ensuite, accuser Crook de lâcheté car suite à son demi-tour il n'a pas pu intervenir à Little Big Horn, ce sont guère que des élucubrations. A moins d'être devin, Crook ne pouvait pas se douter que quelques jours plus tard le 7ème de cavalerie serait décimé. On peut sûrement trouver des déclarations de soldats ou de généraux qui lui sont défavorables, mais Crook est considéré par beaucoup aujourd'hui encore comme le meilleur spécialiste des guerres indiennes de l'armée américaine.
Crook était le soldat le plus expérimenté de la guerre contre les Indiens, jusqu'à l'émergence du général Miles.
La controverse porte surtout sur l'inexplicable retraite de Crook après la Rosebud. L'implication de cette manoeuvre sur la bataille de Little Bighorn, que le général Sherman a évoquée, est un sujet secondaire.
Il faut dire que les historiens sont plutôt gênés lorsque l'on évoque la bataille de la Rosebud. En effet, Crook, loin de réorganiser ses troupes, passa une semaine dans le Wyoming à chasser et à pêcher avec son état-major... Je dois dire que son comportement est incompréhensible. D'ailleurs je n'ai jamais lu d'explications satisfaisantes sur ce sujet, à l'exception que Crook était un personnage timoré et prudent à l'extrême (à l'image d'un McClellan pendant la guerre civile américaine), dont les erreurs de jugement continueront à porter préjudice à l'armée américaine dans sa poursuite de Géronimo.
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Méfions-nous de ces phrases "emblématiques". Il n'y a pas eu de survivant parmi les compagnons de Custer, donc personne côté américain n'est en mesure de raconter précisément comment s'est déroulée la fin de Custer et de ses hommes. Le restant du 7ème de cavalerie (Reno et Benteen) se trouvait à l'autre bout de la vallée, ne voyait pas Custer et ne savait absolument pas ce qu'il devenait.
Il ne s'agit pas raconter ici la fin de Custer et ses hommes mais de se pencher sur le comportement du major Reno et du capitaine Benteen. Un escadron, sans ordres, a progressé pour reconnaître le terrain. Etabli sur la colline des Weir Peaks, la compagnie D du capitaine Weir est resté près d'une heure jusqu'à ce que Benteen et Reno commencent à bouger en direction du front. Après un seul kilomètre, les troupes américaines - 2/3 du 7e de cavalerie - ont fait demi-tour.
Commentaire de l'historien Gregory Michno, dont les études font référence : "Les survivants du 7e de cavalerie ont eu bon dos de dire que le combat de Custer était court. Ce n'était pas dans leurs intérêts et dans ceux des officiers de carrière que l'on puisse démontrer qu'ils avaient traîné pendant deux heures alors que Custer se battait à mort". (Lakota Noon, p. 267)
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C'est la fameuse thèse de la "trahison" de Benteen
. Benteen a secouru Reno parce qu'il se trouvait non loin de lui. Il n'a par contre pas traversé le champ de bataille rempli de centaines de guerriers indiens pour tenter de savoir où en était Custer (car il ne savait pas si le général avait pu s'en tirer ni où il était exactement).
La trahison concerne les deux officiers en présence, aussi bien Reno que Benteen. Le champ de bataille était occupé par "des centaines de guerriers". C'est inexact. Le neveu de Custer, un civil nommé Boston, a de son propre chef quitté le train de ravitaillement et a rejoint le bataillon de Custer sans problèmes. Deux messagers ont fait le chemin inverse. Deux soldats, Peter Thompson et James Watson, ont vu leur monture succomber à la chaleur et ont rejoint les bataillons de Reno et Benteen à pied, traversant trois kilomètres, de Medicine Tail Coulee à Reno Hill. Enfin, alors que Custer était durement engagé, une compagnie de cavalerie a traversé un kilomètre au nord-ouest sans trouver âme qui vive et s'est établie sur une colline nommée Weir Peaks. Elle n'a pas engagé de combat.
Il est d'ailleurs faux de dire qu'il n'y a aucun témoin des derniers instants de Custer : des centaines d'Indiens ont rendu des témoignages qui permettent de suivre l'évolution du combat.
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Plus généralement, je ne comprends pas trop ce besoin récent de "réhabiliter" Custer et surtout de chercher à tout prix d'autres responsables (Crook, Benteen) à sa défaite. Il n'y a pas de honte à être battu quand on lutte, avec un courage exemplaire, à 1 contre 10.
C'est un peu le même débat qu'aux Etats-Unis. Les gens qui s'intéressent au combat et qui trouvent des preuves à l'encontre des deux subordonnés sont systématiquement taxés d'être pro-Custer. Interrogez-vous plutôt sur ce constat :
A 16h10, Benteen et le train de ravitaillement arrive sur Reno Hill. Avec le bataillon de Reno dépenaillé, il y a environ 380 hommes sur la colline. Les 2/3 du régiment. A 16h50, le capitaine Weir quitte la colline furieux, prend la tête de sa compagnie et, sans ordres, progresse au nord-ouest à la recherche de Custer, en s'étant exclamé : "si vous n'allez pas j'irai, et si on s'en sort, quelqu'un devra être au courant de cela!". Weir, avec une quarantaine d'hommes, s'établit sur une colline à 1km de Weir Point et à 4 des premières positions du bataillon de Custer.
30 minutes plus tard, alors que Custer est durement engagé, le capitaine Benteen ordonne à son bataillon de progresser. Il fait un kilomètre un une demi-heure, ce qui est extrêmement lent. Le major Reno le suit 10 mn plus tard.
A 17h50-18h00, le major Reno et le capitaine Benteen atteignent le Weir Peaks. A en croire les témoins, aussi bien soldats sur Weir Peaks qu'Indiens sur Custer Hill, 5 kilomètres plus loin, Custer est toujours en train de se battre. Benteen et Reno font retraite. Custer et ses hommes tiendront jusqu'à 18h20.
Il n'y a pas de pro-Custérisme ni de volonté à expliquer une défaite dans l'étude de la bataille. Les faits seuls parlent d'eux-mêmes. La commission d'enquête gouvernementale sur Little Bighorn n'a été rendue publique que soixante-dix ans après l'affrontement. C'est dans ces archives, en croisant les sources avec les témoignages des Indigènes, que la trahison de Little Bighorn a commencé à être évoquée. Depuis le sujet est de plus en plus repris.
En 1997, la chaîne History Channel a diffusé un documentaire "Trahison à Little Bighorn". En 2000, l'analyste du département de la Défense des Etats-Unis Larry Sklenar arrive à la même conclusion dans "To Hell with Honor". Ces conclusions, soutenues par les meilleurs historiens du sujet (Robert Utley, Brian Dippie, Jerome Greene), sont étayées par le plus grand collectionneur sur le sujet, Arthur Unger, qui publie en 2004 L'alphabet du Custer's last stand : Arrogance, Trahison et Lâcheté. En 2006 enfin, pour la première étude en français, l'historien David Cornut est parvenu aux mêmes conclusions.