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Message Publié : 22 Jan 2006 7:49 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours
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Inscription : 10 Mars 2005 16:29
Message(s) : 658
Avec tous les bouquins qui paraissent sur l'histoire des petites gens, je pense tout le monde peut y trouver son compte.
Et n'oubliez pas de consulter les revues locales d'histoire et de généalogie, elles sont remplies de sujets plus intéressants les uns que les autres.
Prenez contact avec elles, il y en a certainement dans votre coin.

Voici la "boutique" d'un site consacré aux généalogistes :
http://boutique.geneanet.org/catalog/pr ... 4d69e66bc5
(Vous trouverez plein de choix en tapant à gauche sur "catégorie")


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Message Publié : 22 Jan 2006 8:34 
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Fustel de Coulanges
Fustel de Coulanges

Inscription : 09 Août 2005 17:34
Message(s) : 3661
Localisation : Marseille
Vivianne cita Satie :
Citer :
"Se mettre à plat ventre, c'est bien. Toutefois cette position est incommode pour lécher la main de celui qui vous donne des coups de pied dans le derrière." (Satie)

... qui me rappelle cette mise en garde : "Méfiez-vous des gens qui vous passent la main dans le dos par devant et vous crachent au visage par derrière!".


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Message Publié : 22 Jan 2006 11:27 
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Polybe
Polybe

Inscription : 30 Mars 2005 10:28
Message(s) : 93
autre mise en garde, tirée cette fois du picard :

"L' langue ed chés gins c'est comm'el keuw ed ces kiens, ett'pourro pon l'impêcher ed balincer." (la langue des gens est comme la queue des chiens, tu ne pourras pas l'empêcher de se balancer) :lol:

_________________
"Se mettre à plat ventre, c'est bien. Toutefois cette position est incommode pour lécher la main de celui qui vous donne des coups de pied dans le derrière." (Satie)


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Message Publié : 29 Juil 2007 9:19 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Inscription : 23 Oct 2004 9:14
Message(s) : 1903
Localisation : village des Pyrénées
J'ai fait connaissance hier soir de Joséphine, à Avezac dans les Pyrénées. (En fait, c'était ma voisine de table). Joséphine a 75 ans, et est très bavarde ... heureusement pour les gens curieux comme moi. Je la cite de mémoire une très courte partie de deux heures de discours (en essayant de traduire la simplicité du langage, et en traduisant - hélas - de l'occitan au Français, pour les parties en patois) [et mes propres commentaires entre crochets] .

- A Avezac, il y avait des riches. Nous, nous étions pauvres. Un jour (je devais avoir six ou sept ans) [donc les années 30] on est allées demander du lait dans une ferme, avec ma copine Maria (le père de Maria avait épousé une espagnole). Ils nous ont dit "non, on en a besoin pour les cochons". Regardez-les, ils sont là-bas, ils n'ont pas changé [elle me montre les descendants, à une autre table]. Remarquez, on était malines, avec Maria. Le soir, on est allées dans leur jardin, on a tout arraché, on n'a rien laissé en terre. On était coquines, comme quoi ceux qui critiquent les jeunes aujourd'hui n'ont pas beaucoup de mémoire. [Mais il ne vient à l'idée de personne de critiquer les jeunes d'aujourd'hui :wink: ]
- Le lendemain, le "monsieur" [sic] est venu demander à mon père ce qu'on avait fait la veille. Et papa : "Elle est restée toute la soirée avec nous". Le monsieur : "c'est donc cette espagnole qui a fait ça" . Alors, moi : "elle est aussi française que vous". Papa m'a mis la main sur la tête.
- Ils jetaient des os avec de la viande autour, s'ils l'avaient pas salie, on l'aurait bien mangée.
- Pendant la guerre [donc adolescente], un jour que j'allais garder les vaches au bois, j'ai trouvé un homme mort. Le maire a dit que c'était le maquis qui avait tué un espion, et a interdit qu'on l'enterre dans la partie bénie [?] du cimetière. On l'a mis dans un coin près du mur, sans cercueil. J'ai fleuri ce coin toute ma vie. Il y a environ dix ans, le maire de maintenant a fait faire des travaux dans ce coin, ils ont trouvé des os. Je suis allée voir le maire et le curé pour qu'on mette ces os dans une caisse, et dans une vraie tombe. Ils voulaient pas trop, mais croyez moi, quand je veux quelque chose, je l'obtiens. [oh oui, José (tout le village l'appelle José), je vous crois ! ]
- à vingt ans, je suis allée travailler à Paris, chez des gens bien, faire la cuisine. Là, j'ai été bien. On mangeait dans la cuisine, mais la même chose qu'eux. Quand ils avaient Champagne, on avait Champagne.
- Voyez mes deux petits-fils, là bas. Ils sont beaux, hein ? Le grand, [la quinzaine] c'est un feignant, mais c'est mon préféré. Moi : "pourquoi c'est un feignant ?" - Parce que c'est son frère qui m'a aidée à ramasser mes patates". - Alors, il n'est pas feignant "toujours". - Oh non, juste aujourd'hui, et il n'est pas feignant à l'école, c'est le principal.
- C'est bien ces fêtes, mais la musique est un peu forte. Mais bon, il faut vivre avec son époque. Remarquez, c'est quand même mieux qu'à la télé.
-----------------
Comme quoi il y a des soirées où on va en traînant les pieds (j'étais fatigué), et qui finalement sont formidables. Je pense que nous allons revenir à Avezac, cet après midi, c'est encore la fête, et il y aura peut-être José.
Ce qui est remarquable aussi, c'est la ressemblance avec ce que m'a raconté mon propre père (jusqu'au jugement des descendants de ceux qui ont mal agit).
PS : un feignant, c'est encore moins vaillant qu'un fainéant, alors SVP ne critiquez pas ce mot, c'est le mot employé chez nous, où les feignants le sont vraiment. Ne critiquez pas non plus l’absence du « ne » de négation, je transcris une discussion festive entre gens de culture occitane.

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"La vie des hommes qui vont droit devant eux, renaitraient-ils dix fois en dix mondes meilleurs, serait toujours semblable à la première. Il n'y a qu'une façon d'aller droit devant soi." (Pierre Mac Orlan)


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Message Publié : 29 Juil 2007 9:40 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Inscription : 23 Oct 2004 9:14
Message(s) : 1903
Localisation : village des Pyrénées
Joséphine (autre souvenir):
- La religieuse [au catéchisme] voulait qu'on embrasse les pieds de Saint-Pierre (de la statue). J'ai dit à Maria : "si tu le fais, t'es plus ma copine, moi je le ferai jamais". On a refusé toutes les deux. On a eu des coups de règle sur les doigts, mais on a toujours refusé. Alors elle nous a envoyées chez la mère supérieure, qui a dit qu'on avait raison, que c'était un rite païen. Ensuite, on a toujours été tranquille avec cette religieuse, toutes les deux.

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Message Publié : 31 Juil 2007 12:29 
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Polybe
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Inscription : 21 Juil 2007 21:21
Message(s) : 106
Citer :
Un voisin m'a raconté une autre histoire de facteur à vélo, le jour de l'enterrement dudit facteur:
Le village de Peyriguère est situé tout en haut de la colline, une sacrée cote à monter à vélo. Le facteur avait gravement manqué de respect à quelqu'un. Ce quidam, pour se venger, avait abonné pendant des années un vieillard de Peyriguère, illettré, à La Dépêche du midi, pour obliger le facteur à monter là-haut tous les jours.


Excellentissime.

Une commission de trente-six fonctionnaires travaillant durant trois ans, n'aurait pas trouvé vengeance plus fine ... ni plus légale !


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Message Publié : 31 Juil 2007 13:46 
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Marc Bloch
Marc Bloch
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Inscription : 09 Août 2006 6:30
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Localisation : Allemagne
Je viens de lire tous ces témoignages émouvants. Alors , moi aussi j'apporterai ma pierre à l'édifice. Mon père , enfant naturel en 1905, fut élevé par sa mère ,repasseuse , qui dans l'année travaillait en atelier et en été faisait des "saisons" dans les grands hôtels de Biarritz ou de Cauterets. A 12 ans mon père entra comme employé aux écritures dans l'étude d'un notaire, à l'époque toutes les copies d'acte se faisaient à la main. Puis plus tard, par son courage, son talent et sa sobriété il s'est fait une modeste place au soleil : il fut pendant plus de trente ans le seul dessinateur publicitaire entre Toulouse et Bordeaux.Du côté de ma mère ce n'est pas plus brillant. Famille de dix enfants , avec un père à présence variable . Ma grand-mère était si pauvre qu'elle ne pouvait pas nourrir ses enfants et les filles furent recueillies par un orphelinat religieux , quant aux garçons ils étaient placés à 7 ans comme valets de ferme. Ma mère resta à l'orphelinat jusqu'à 21 ans (c'était la règle) pour ensuite être placée come femme de chambre chez des bourgeiois , qui étaient d'ailleurs corrects.
Je ne raconte pas souvent cette histoire de crainte que les gens ne croient que j'en remet une couche. Mais je n'en éprouve aucune honte et je suis même fier de voir ce qu'a pu faire de moi "l'ascenseur républicain".
Mais vous pouvez imaginer mes sentiments quand je vois les jérémiades revendicatrices des nantis et des fatigués de naissance.

_________________
" Je n'oublie pas le Colonel Arnaud Beltrame "


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Message Publié : 22 Fév 2008 9:10 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Inscription : 23 Oct 2004 9:14
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Localisation : village des Pyrénées
J'écris ce que j'entends, ou ce dont je me souviens. Mais je ne sais pas qui le lira un jour, étant trop paresseux pour le mettre vraiment en forem et chercher à le publier.
Je poste ici une de ces pages, car je pense qu'elle y a sa place.
Si ce n'est pas le cas, un "delete" ne me vexera pas.
================================================
Et maman m’a raconté …

Quelqu’un qui a lu l’histoire de mon pépé (http://a-daude.monsite.wanadoo.fr/index.jhtml) s’est étonné : « Dédé, pourquoi ne parler que d’un de tes grands-parents, tu en avais bien quatre comme tout le monde ». Bien sûr. Enfin, trois, parce que l’épouse du pépé, je ne l’ai pas connue.
Nous allions voir mes grands-parents maternels, parfois, mais ils ne venaient quasiment jamais à la maison. Il a fallu attendre cette année pour que maman en parle. Et maintenant, je sais pourquoi je n’ai jamais été battu.

- Quand j’étais enceinte de toi, on n’était pas mariés. « Elle » était tellement méchante que je n’osais pas le lui dire. Elle savait qu’on devait se marier, mais il y avait toujours quelque chose à attendre : « quand Albert sera revenu du régiment », puis « quand on aura ramassé les patates » (parce qu’il lui fallait de la main d’œuvre)
- Mais, maman, tu étais majeure ?
- Oui, mais je la craignais. Tu sais, elle était vraiment méchante. Alors, je lui ai pris les linges de ses règles (de toutes façons, c’était moi qui les lui lavais) pour les lui montrer comme si c’était les miens. Et puis, je t’ai serré, mon pauvre Dédé (tu vois, tu as bien profité quand même). Enfin, on s’est mariés, par force. Mais quand tu es né, elle a mis à la porte ton père qui venait le lui annoncer.

Je comprends pourquoi, dans mon souvenir, ma grand-mère m’appelait « brujassou ». C’est en patois « l’enfant fait dans les bruges, (les bruyères) ».

- Mais ton père, maman, comment était-il ?
- C’était un brave homme, mais il avait peur d’elle, lui aussi. Par exemple, il devait se cacher pour fumer, et lui voler l’argent pour acheter son tabac, comme un gosse.
- Elle était tellement méchante ?
- Si vous saviez ! j’ai tellement d’histoires ! En rentrant de l’école, je devais partir garder les brebis, sans goûter. Mais je lui volais un œuf, ou un bout de pain. Je n’étais pas trop maline, et elle s’en rendait compte. Alors elle me battait, avec un bâton. Si vous saviez comme j’ai été battue ! Et ma sœur, la pauvre ! (le mot "pauvre" est employé ici car Raymonde vient de décéder) A chaque fois, elle lui disait : « attends, maman, je dois aller pisser, tu me battras après ». Mais elle attendait patiemment, et elle la battait froidement, ensuite. Elle aurait quand même pu se calmer, pendant ce temps. Et bien non. Elle ne nous aimait pas. Elle ne nous a jamais embrassés, ses quatre enfants. On était ses esclaves.

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"La vie des hommes qui vont droit devant eux, renaitraient-ils dix fois en dix mondes meilleurs, serait toujours semblable à la première. Il n'y a qu'une façon d'aller droit devant soi." (Pierre Mac Orlan)


Dernière édition par Dédé le 22 Fév 2008 9:17, édité 1 fois.

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Message Publié : 22 Fév 2008 9:15 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Inscription : 23 Oct 2004 9:14
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Localisation : village des Pyrénées
Et le nom "Brujassou" m'a remémoré ça :
==============================================
Brujassou (enfant des bruyères, en patois limousin)
Cette histoire là, je la connais depuis toujours, je crois que je l’ai entendue depuis mon berceau, et je l’ai vécue de près …
Maman, jeune fille, passait tout son temps de libre à garder les brebis. C’était la mode, alors, en Limousin comme dans toutes les régions pastorales. Et l’occupation des garçons, le dimanche après-midi, était de « courir les bergères ». Les chansons, d’ailleurs, le racontent abondamment ; la célèbre « Il pleut Bergère » :
Citer :
Il pleut, il pleut, bergère, / Presse tes blancs moutons,
Allons sous ma chaumière,/ Bergère vite, allons.

Et celle-ci, des « radieuses Pyrénées »:
Citer :
Bergère qui sautille / Tes grands yeux noirs pétillent
Comme l'eau qui jaillit / D'un recoin de granit

Et « Etoile des neiges »:
Citer :
Hélas soupirait la bergère/ Que répondront nos parents ?
Comment ferons nous nous n’avons pas d’argent /Pour nous marier dès le printemps?

Jusqu’à cette cruelle qui envoyait son amoureux « siffler sur la colline » :
Citer :
C'est de'rouler dans la rosée qui rend les bergères jolies
Mais quand j'ai dit qu'avec elle je voudrais y rouler aussi…


Oui, on en trouverait des dizaines, de ces chansons, comme quoi mon histoire est banale.
Mais c’est la mienne. Et la voici. Donc, maman, bergère. Et papa, coureur de bergères. Se sont rencontrés ;
Citer :
Gentille bergère si tu veux m’aimer
Viens dans la bruyère viens donc m’embrasser…

… et ce qui devait arriver arriva, et me voilà.
Hors, pendant ces galipettes (involontairement) procréatrices, les brebis vivant librement leur vie de brebis, seraient allées manger le blé noir du vieux voisin « Nôna » (ses cousins parisiens l’appelaient « cousin Léonard », tout le monde se moquait d’eux, car tout le monde savait que son vrai nom était « Nôna »).
Plus tard, la situation ayant été « normalisée » devant maire et curé, Nôna, rencontrant papa à la foire, lui répétait inlassablement : « Tu me dois un sac de blé noir ». Ce qui fait qu’un jour, mes parents sont partis à pied (par le même chemin que celui de la course aux bergères, d’ailleurs) porter ce sac de blé noir à Nôna. J’étais bien sûr présent, dans leurs bras. La rumeur (qui fait bien les choses) a fait arriver en même temps quelques amis, et le sac de blé noir est vite devenu crêpes (ces fameux « galétous » limousins). La cave de Nôna a un peu souffert de cette veillée, on a joué à la belote, on a raconté des histoires, et on a ajouté celle-ci à la tradition.
Mais ce n’est pas fini : en repartant, sous les effets sans doute du contenu de la cave (ou peut-être aussi de la malice…) , papa a oublié le sac vide. Bien sûr, ensuite, à la foire : « Nôna, vous me devez un sac vide ». Et donc, un autre jour, le sac vide est venu chez nous, accompagné des mêmes amis. Et c’est notre cave qui a souffert.
Et bien, cet aller-retour annuel a duré une dizaine d’années, jusqu’au décès de Nôna. En écrivant ça, je vois son visage, j’entends son rire …

C’était la première fois que des amis se rencontraient grâce à moi …
=======================================
Ce nom de "brujassou" qui était l'expression du mépris de ma grand-mère, si je devais changer de patronyme, je le prendrais en hommage au courage de ma mère.

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Message Publié : 22 Fév 2008 10:51 
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Plutarque
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Inscription : 21 Mai 2007 15:20
Message(s) : 157
Localisation : Le Manoir d'Ebène
Je trouve quand même que depuis 30 ans l'histoire s'est quand même bien plus axée sur la vie quotidienne et la population "moyenne" avec la tendance des études “économie et sociale” en historiographie française.

Il suffit de voir que sur les quatre sujets de cette année au CAPES: trois sujets sont intitulés “économie et société” .
La recherche française actuelle est au contraire très axée là dessus, au point parfois de tomber dans l’excès et de créer un univers éthéré hors de l’évolution chronologique et des éléments politiques majeures et structurants la période.
Cette méconnaissance de l’aspect politique et “classique” de l’Histoire fut d’ailleurs évoquée par le jury du Capes dans son rapport 2007, en particulier pour la période Moderne où les candidats connaissaient bien plus le social que la période en elle même finalement.

Je vous conseil néanmoins une œuvre fondatrice de ce type d’histoire sociale très en vogue quoi qu’on en pense:

Le Fromage et les Vers de l’historien italien Carlo Ginzburg, qui narre avec une précision intimiste le quotidien d’un meunier italien nommé Menocchio au XVIe siècle.

Cette ouvrage est emblématique du courant historiographique italien de la microstoria qui justement cible l’histoire sur un aspect quotidien.

Je vous conseil également le récent livre Histoire de la Conquête amoureuse de Jean Claude Bologne, bien que celui-ci soit plus orienté vers l’histoire des mentalités ( JC Bologne 'nest pas historien de formation mais philosophe) rentre tout de même dans notre sujet car qu’est- qui est finalement plus quotidien à travers les âges que le sentiment amoureux?

Je terminerai mon sujet en évoquant néanmoins le problème historiographique qu’a créé cette multiplication de l’histoire sociale en plus de parfois constituer une image éthérée des périodes.
Le principal risque est également ce qui fut nommer “l’émiettement de l’histoire”, à savoir une histoire tellement morcelée car concentrée sur tout et n’importe quoi au final “histoire de la savonnette”, “histoire de la chaussette” elle a perturbée la définition de la discipline.

Il me semble personnellement qu’il faille trouver un compromis, c’est tout le choix à faire entre historie chronologique ou thématique car j’ai moi même assisté à un cours d’histoire médiévale à une époque sans entendre parler une seule fois des croisades, de chevaliers ou de la Guerre de Cent ans.

Je trouve que c’est réellement un abus dans un autre sens.

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"Lorsque vous avez éliminé l'Impossible, ce qui reste aussi improbable soit-il est nécessairement la Vérité"


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Message Publié : 22 Fév 2008 11:10 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Inscription : 23 Oct 2004 9:14
Message(s) : 1903
Localisation : village des Pyrénées
Je suis entièrement d'accord, Monte-Christo : toutes "ces histoires" doivent se situer dans "l'Histoire", comme des compléments, des illustrations. Un peu comme les "encadrés" dans des articles de revues. Ainsi, l'histoire de Joséphine sue je cite ci-dessus (celle de "l'espion" qu'elle a trouvé mort) n'a d'intérêt que si on connait un peu ce qu'a été la résistance, la vraie et celle des règlements de compte. Elle en est juste une illustration, partielle et partiale.
Je suis d'ailleurs souvent gêné, d'entendre parler "d'autrefois", en particulier par les groupes de danse folkloriques, par ailleurs incapables de dater précisément ce dont ils parlent, et souvent coupables d'anachronismes (certains vont jusqu'à danser en sabots, alors que justement, la danse était toujours un moment où on enlevait les sabots, sauf danses spécialement prévues pour utiliser le choc du sabot sur le sol).
Justement, hier, une amie à qui je venais de faire lire mon histoire de "brujassou", et auprès de qui je m'excusais de la banalité de ce récit, me disait que non, qu'il fallait raconter, toujours raconter. Mais ce n'est peut-être pas de l'histoire ...

Edit pour préciser ceci :
S'il y a aujourd'hui abondance de ces livres souvenirs du XXe siècle, l'histoire des l'Antiquité, par exemple, serait bien plus riche s'il y en avait eu autant, à l'époque, non ?

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Message Publié : 22 Fév 2008 12:08 
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Plutarque
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Inscription : 21 Mai 2007 15:20
Message(s) : 157
Localisation : Le Manoir d'Ebène
Tout à fait! D'ailleurs pour l'Antiquité cela pose problème desfois bien que certains historiens comme Pierre Vidal-Naquet ont essayés de faire avancer cela.

Bon je confesse que je suis très friand de ce genre "d'anecdotes", qui sont ce que j'appelle les "petites histoires" qui finalement humanisent un peu l'Histoire voir la rende plus intime.

Je pense que tout cela peut faire partie de l'Histoire mais comme vous le soulignez très bien en le recontextualisant sinon ce n‘est plus historique mais folklorique.

Mais bon, le moderniste que je suis est toujours très friand de tout ces petits détails qui fourmillent et qui donnent toute une âme à une époque et qui sont d'ailleurs assez souvent une passerelle utile pour passer de la sobre histoire universitaire à la réalité historique humaine.

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Message Publié : 26 Jan 2016 18:25 
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Philippe de Commines
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Inscription : 23 Oct 2004 9:14
Message(s) : 1903
Localisation : village des Pyrénées
Comme déjà écrit ailleurs, tous les mardi j'ai deux heures à tuer, alors j'en profite pour relire de vieilles discussions. Je n'ai rien à rajouter à celle-ci, je souhaite juste la faire "remonter" pour en proposer la lecture à des "nouveaux", qui auront sûrement des choses à ajouter.

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Message Publié : 26 Jan 2016 21:32 
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Jean Mabillon
Jean Mabillon

Inscription : 16 Jan 2010 19:18
Message(s) : 2953
L'histoire des "petites gens" ? 'Vu le vécu familial plongeant chez moi dans la grande histoire et les relations qui m 'en ont été faites,je penche à croire qu'il y a des facettes tellement multiples qu'il existe davantage une multitude de cas d'histoires de vies plutôt uniques.Cette multitude de fils formant la trame de la grande histoire qui aurait sans doute été différente si toutes ces trames même les plus humbles n'avaient pas existé.......Des familles de" petites gens" poussées par le destin gravissent l'échelle sociale,d'autres stagnent,ou régressent ou bien aussi ,"maudites" par la destinée disparaissent totalement des composantes humaines.Le destin n'est que très rarement épris de tendresse envers les femmes et les hommes hélas.....


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Message Publié : 27 Jan 2016 8:24 
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Inscription : 27 Avr 2004 17:38
Message(s) : 10623
Localisation : Région Parisienne
Il existe bien des livres régionaux sur la vie des petites gens. Je vous en présente un qui concerne le Perche, qui m'a intéressé parce que le "héros" est un grand oncle de ma grand mère, qu'il est évident que je n'en avais jamais entendu parler et que seule un intérêt récent pour la généalogie m'a permis de découvrir.

Outre la vie du meurtrier, car cet individu a quand même assassiné cinq personnes, ce qui lui valut la guillotine en place publique à Chartres, l'auteur étudie la vie de ce qu'on appelait les journaliers, personnes au bas de l'échelle qui n'avaient que leurs bras à louer. Un aperçu de la justice de l'époque est aussi analysé, car la justice est rapide, arrêté en janvier, il est guillotiné en septembre.

C'est ce genre de livres, au détour d'un fait divers, qui nous fait voir la réalité sociale d'une époque.

https://criminocorpus.revues.org/2627

_________________
Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer (Guillaume le Taciturne)


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