Et le nom "Brujassou" m'a remémoré ça :
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Brujassou (enfant des bruyères, en patois limousin)
Cette histoire là, je la connais depuis toujours, je crois que je l’ai entendue depuis mon berceau, et je l’ai vécue de près …
Maman, jeune fille, passait tout son temps de libre à garder les brebis. C’était la mode, alors, en Limousin comme dans toutes les régions pastorales. Et l’occupation des garçons, le dimanche après-midi, était de « courir les bergères ». Les chansons, d’ailleurs, le racontent abondamment ; la célèbre « Il pleut Bergère » :
Citer :
Il pleut, il pleut, bergère, / Presse tes blancs moutons,
Allons sous ma chaumière,/ Bergère vite, allons.
Et celle-ci, des « radieuses Pyrénées »:
Citer :
Bergère qui sautille / Tes grands yeux noirs pétillent
Comme l'eau qui jaillit / D'un recoin de granit
Et « Etoile des neiges »:
Citer :
Hélas soupirait la bergère/ Que répondront nos parents ?
Comment ferons nous nous n’avons pas d’argent /Pour nous marier dès le printemps?
Jusqu’à cette cruelle qui envoyait son amoureux « siffler sur la colline » :
Citer :
C'est de'rouler dans la rosée qui rend les bergères jolies
Mais quand j'ai dit qu'avec elle je voudrais y rouler aussi…
Oui, on en trouverait des dizaines, de ces chansons, comme quoi mon histoire est banale.
Mais c’est la mienne. Et la voici. Donc, maman, bergère. Et papa, coureur de bergères. Se sont rencontrés ;
Citer :
Gentille bergère si tu veux m’aimer
Viens dans la bruyère viens donc m’embrasser…
… et ce qui devait arriver arriva, et me voilà.
Hors, pendant ces galipettes (involontairement) procréatrices, les brebis vivant librement leur vie de brebis, seraient allées manger le blé noir du vieux voisin « Nôna » (ses cousins parisiens l’appelaient « cousin Léonard », tout le monde se moquait d’eux, car tout le monde savait que son vrai nom était « Nôna »).
Plus tard, la situation ayant été « normalisée » devant maire et curé, Nôna, rencontrant papa à la foire, lui répétait inlassablement : « Tu me dois un sac de blé noir ». Ce qui fait qu’un jour, mes parents sont partis à pied (par le même chemin que celui de la course aux bergères, d’ailleurs) porter ce sac de blé noir à Nôna. J’étais bien sûr présent, dans leurs bras. La rumeur (qui fait bien les choses) a fait arriver en même temps quelques amis, et le sac de blé noir est vite devenu crêpes (ces fameux « galétous » limousins). La cave de Nôna a un peu souffert de cette veillée, on a joué à la belote, on a raconté des histoires, et on a ajouté celle-ci à la tradition.
Mais ce n’est pas fini : en repartant, sous les effets sans doute du contenu de la cave (ou peut-être aussi de la malice…) , papa a oublié le sac vide. Bien sûr, ensuite, à la foire : « Nôna, vous me devez un sac vide ». Et donc, un autre jour, le sac vide est venu chez nous, accompagné des mêmes amis. Et c’est notre cave qui a souffert.
Et bien, cet aller-retour annuel a duré une dizaine d’années, jusqu’au décès de Nôna. En écrivant ça, je vois son visage, j’entends son rire …
C’était la première fois que des amis se rencontraient grâce à moi …
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Ce nom de "brujassou" qui était l'expression du mépris de ma grand-mère, si je devais changer de patronyme, je le prendrais en hommage au courage de ma mère.