Hugues de Hador a écrit :
Peut-on dire que "la commune" est une sorte d'embryon des futurs "luttes sociales ouvrières" de la fin du 19ème siècle ??
Je pense au contraire que la Commune a considérablement gêné le développement des organisations ouvrières et limité le soutien que les Républicains auraient pu lui apporter.
Je veux dire que passée la Commune, le souci des Républicains est d'apparaître comme des partisans de l'ordre contre l'émeute, et en aucun cas de faire partie des agitateurs de drapeaux rouges et des pétroleurs.
Tous les débuts de la 3ème république en sont marqués, jusqu'en 1914, parce qu'il faudra attendre jusque là pour voir, par exemple, voter l'impôt sur le revenu.
Ce sont les socialistes qui soutiennent les mouvements ouvriers, et eux sont clairement marqués à l'extrême-gauche. Ce sont les "partageux", autant dire le diable pour la plupart des possédants, et d'abord des petits agriculteurs - qui ne possèdent pas grand chose, par ailleurs - qui forment les gros bataillons d'électeurs dans la France encore à majorité rurale de l'époque.
La révolution de 1917 ne fera qu'accentuer cette fracture.
Dans une certaine mesure, ce parti pris de l'ordre établi va servir les Républicains, en leur permettant de se présenter comme une alternative sans risques aux royalistes et aux bonapartistes. Mais pour le développement des revendications ouvrières, la Commune est une catastrophe, et les républicains, "radicaux" en tête, ne feront jamais de lois sociales que pressés et contraints par une frange très active de l'opinion publique, et le souci de ne pas se laisser doubler sur leur gauche au profit des socialistes.
Pensez par exemple à l'évolution de Clemenceau. (qui aura malgré tout le courage de soutenir l'amnistie pour les Communards.)
Il faut se rendre à l'évidence : pour la majorité des Français de l'époque, la Commune est un mouvement d'assassins, et ceux qui éprouvent de la sympathie pour eux ne suscitent que la méfiance.
Même un homme comme Charles de Gaulle, plutôt ouvert à des évolutions sociales prenant en compte les besoins des ouvriers (il y a quelques hommes de droite, et même des royalistes comme Lyautey, dans cet esprit là) remercie l'armée pour "l'ordre maintenu contre l'émeute" en 1871. - c'est dans "la France et son armée".
J'avoue que je n'ai pas lu cette citation sans surprise et un certain découragement : quoi ? Même lui ? - qui pourtant connaît assez son histoire de France pour savoir que la répression a été terrible et aveugle, et que le rôle joué par l'armée (et une armée vaincue, en prime) dans cet épisode de guerre civile est tout sauf glorieux. Et oui,même lui...