Ce site est bizarrement l'un des seuls à proposer un dossier sur la bête. Comme nous le notions sur le sujet dédié dans le forum "Grand Siècle", en fait, non seulement il n'y a aucune hypothèse vraiment satisfaisante, mais il ne semble pas que beaucoup de monde s'attelle sérieusement à chercher la clé de l'énigme, malgré les abondantes archives d'époque.
La Bête est exploitée sur le plan touristique, c'est une évidence, mais l'existence d'un être aux allures de mammifère carnassier ayant fait un grand nombre de victimes (une grosse centaine) dans cette région en ces années 1760 en est une aussi. Probablement deux même, puisqu'après la mort d'un animal - dont nous ne savons pas grand-chose, mal décrit, mal embaumé et donc non conservé - les attaques cessent, reprennent, maladroites, puis tristement efficaces, et cessent à la mort d'un autre animal... dont nous ne savons pas plus !
La thèse du loup ne tient en effet guère debout. Les attaques de cet animal contre l'homme, aux temps modernes, sont plus que rarissimes : on ne retient guère qu'un cas vers 1900. En Gévaudan en 1760, le loup fait partie du décor : c'est dans le pire des cas un emmerdeur, mais pas un danger. La preuve ? Tous ces gamins qu'on envoyait allègrement garder les troupeaux hors de vue de tout adulte !
Du reste, de nombreux témoins et survivants ont certifié qu'il ne s'agissait pas d'un loup.
D'autre part, ces mêmes témoignages attestent que la Bête agissait seule. Une meute affamée pourrait à la rigueur s'en prendre à un homme, mais certainement pas un loup isolé. Des siècles de chasse lui ont, à cette époque, depuis longtemps appris à fuir sa sinistre silhouette dressée comme la peste. Les "mangeurs d'hommes" n'existent que chez des espèces susceptibles de trouver que la viande humaine est facile à se procurer. Je vois mal le loup, surtout isolé, dans cette catégorie !
Quant aux Chastel, une petite remarque. S'ils sont coupables, le loup est pour eux un "coupable idéal" à désigner. En revanche, pour la société, eux-mêmes, les solitaires, les bizarres, sont des coupables idéaux. Ils incarnent à leur façon le mythe et la place du monstre dans l'inconscient collectif : anormal, asocial, donc dangereux, voire coupable de tous maux