Les Belles Lettres viennent de sortir quelques nouveautés intéressantes ce mois-ci :
Mais ils proposent surtout deux coups de cœur que je présenterai plus longuement :
Lucien de Samosate,
Comment écrire l’histoire, Coll. La Roue à Livre, 160p. 19€
Ce titre a trois raisons de me plaire. Tout d’abord l’auteur, Lucien, dont j’ai plusieurs fois eu l’occasion de vanter les qualités, original et léger. Ensuite le sujet, qui ne peut qu’interpeler chaque membre du forum, et qui donne la vision d’un érudit un peu blasé du IIe siècle après JC. Enfin, la collection, la Roue à Livre, relativement bon marché par rapport à sa prestigieuse aînée…. Bref, un texte original à petit prix, idéal pour les dilettantes qui voudraient découvrir l’auteur sans se ruiner.
Second coup de cœur, et un gros gros GROS celui-là :
Les
Scholies à Apollonios de Rhodes, Collection Fragments, 578p. 45€
A ma connaissance, elles n’ont jamais été intégralement traduites jusqu’à présent (mais une édition des
Argonautiques de 1892 en traduisait déjà de larges passages). Pour ceux qui l’ignoreraient, les scholies sont des petits commentaires insérés par des grammairiens souvent tardifs et anonymes, qui expliquent le texte, ligne après ligne. On trouve ainsi des scholies à Platon, des scholies à Homère, à Virgile, à Démosthène, à Euripide, j’en passe et des meilleurs. Ici donc, elles commentent les
Argonautiques d’Apollonios de Rhodes, un poème épique en quatre chants du IIIe avant JC racontant l’expédition de Jason à la quête de la Toison d’or.
En général, les scholies sont de qualités très variables, rarement passionnantes, souvent des points grammaticaux, des explications de phrases. Parfois très courtes, parfois aussi d’une longueur impressionnante : lecteur après lecteur, érudit après érudit, elles se complètent, s’enrichissent.
Mais si ces scholies à Apollonios sont particulièrement intéressantes, c’est par rapport à leur sujet principal : la mythologie, dont elles offrent une des plus importante compilation conservée. En leur compagnie, nous plongeons dans un déluge d’érudition où se trouvent confrontés une foule d’auteurs autrefois prestigieux mais disparus depuis, et dont le scholiaste nous transmet le souvenir : nous voilà entrainés dans une sarabande en compagnie de Chaméléon, de Timée, d’Ephore, d’Hélanicos, de Stésichore… Toute la richesse et la variété des mythes grecs vient nous éblouir ! Ces données, uniques, n’ont été préservées que grâce à ces savants anonymes, et ils lèvent une partie du voile de la genèse de bien des légendes, à travers leurs variations dans le temps et l’espace.