Je crois qu’il vaut mieux être prudent avec les hypothèses ; on peut théoriser à l’infini en plaquant sur le roman nos propres imaginaires, mais ce n’est pas de l’histoire, cela n’éclairera pas le document ni l’image du héros transmise. Je sais que j'y ai cédé également, mais c'était avant de trouver du matériel concret à exploiter, qui nous dispense depuis de trop spéculer à l'aveugle.
Alain a écrit :
Mais je me demande si ces yeux vairons ne sont pas plus simplement la marque de la dualité du héros macédonien bien visible dans sa personnalité ou encore un symbole de ses dons multiples, à la fois génial chef militaire comme son père et demi-dieu doté de pouvoirs magiques comme sa mère qui était prêtresse de Dionysos. Lui qui se définissait comme un nouveau Dionysos, le conquérant de l'Asie.
Pour toute cette partie, tu fais à mon avis une erreur d’interprétation, en confondant l’Alexandre historique et l’Alexandre du
Roman, en considérant que l’histoire et la personnalité propre du roi de Macédoine se retrouve dans le
Roman. Or c’est faux, le héros du roman a forgé sa propre histoire et définit ses propres valeurs et vertus. Il n’est pas ici le fils de Philippe, ni un demi-dieu, ni dionysien et sa dualité n’est pas mise en valeur, il est devenu au contraire un roi philosophe idéal. Donc aucun des éléments auquel tu penses ne peut justifier le portrait peint par le romancier.
Citer :
On peut suggérer aussi que le fils d'Olympias et de Philippe, a été investi de la double vue, il est celui qui voit au delà des autres. ce qui serait attesté par ses yeux différents.
Ici, je n’ai pas croisé le moindre parallèle dans les textes anciens, ce n’est donc que spéculation, d’autant plus anachronique que l’expression française « double vue » qui fait spontanément penser au dikoros n’a pas à ma connaissance d’équivalent antique. Pour les Antiques, la « double pupille » n’a pas la même nuance, voir le passage de Ptolémée Chennus cité plus haut : certes le regard du magicien change, il voir au-delà de celui des hommes du commun, mais d’une part la nuance est très fortement péjorative (contrairement à l’expression française), et de plus, il n’y a pas cette notion de don prophétique.
Je pense que l’expression française est bien issue de l’expression latine, elle-même issue du
dikoros grec, mais à chaque étape son sens a changé, a évolué, et son sens actuel n’a plus grands points communs avec celui antique. Bref, un faux ami trompeur.
Plus que des pouvoirs magiques actifs et conscient (qu’il a en parti, en particulier en tant que thaumaturge), l’hétérochromie d’Alexandre me semble davantage la marque d’une aura magique, passive, issue de son père égyptien Nectanebos. Un potentiel, plus qu’un pouvoir réel dont il serait conscient. A confirmer (faut que je relise sérieusement le roman, enfin un des romans).