Inscription : 05 Juil 2011 14:39 Message(s) : 1623 Localisation : Armorique
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Bonjour,Duc de Raguse a écrit : Il faudra le dire aux trois auteurs ayant écrits ces ouvrages dans les années 1990 et 2000, psychiatres de profession. Vous citez deux auteurs : de Neuten et Rauchs. de Neuten est un psychanalyste non un psychiatre mais n'ayant pas le goût d'asséner j'ajouterai, il me semble. Rauchs s'il est psychiatre de formation, lui-aussi s'est tourné vers la psychanalyse. Son fameux livre sur Louis II (le seul qu'il ait fait) fut très bankable, d'ailleurs le titre est assez racoleur : "Louis II et ses psychiatres, les gardes fous d'un roi", le ton est donné. [.... Présentation de l'éditeurCe livre raconte la rencontre et la mort commune du roi Louis II et de son psychiatre von Gudden. S'y trouve retracée l'histoire de la Bavière, puis la vie de ce roi excentrique, et sa fin tragique, et enfin l'oeuvre et la vie du psychiatre Bernhard von Gudden. Nous découvrons alors un documentaire charnière de l'histoire de la psychiatrie qui fait de la maladie de Louis II le prototype de ce que Kraepelin appellera démence précoce.Attention ! "... Nous découvrons alors un documentaire charnière de l'histoire de la psychiatrie..." Eh oui, comme tout la psychiatrie a une histoire et comme il est dit une petite partie du livre traite de l'histoire de la psychiatrie qui bien sûr évolue comme toute science... J'aimerais pouvoir écrire à Kraepelin mais ce pauvre homme, élève de Gudden est décédé en 1926 et depuis, comme toute médecine, la psychiatrie a quelque peu évolué. Il fut d'ailleurs l'élève de Gudden, ce qui n'augure rien de bon quant au diagnostic ! Ce que s'empresse de démontrer Rauchs en y ajoutant une grosse touche de petite histoire d'orientation sexuelle et sur le tout un jugement d'Historien.Pour un psychiatre qui donne dans la psychanalyse et devrait donc être dans tout (ce qu'il fait assez maladroitement) sauf dans le jugement (ce qu'il fait grossièrement). La suite vaut son pesant d'or, dans tous les sens du terme : [...Quatrième de couverture Roi des opéras de Wagner plutôt que roi d'opérette, atteint de folie plutôt que d'excentricités romantiques, le roi Louis II de Bavière continue, plus d'un siècle après sa mort mystérieuse, d'attiser les passions. Le Bavarois de la rue s'obstine à voir dans le " dernier roi du siècle ", comme le disait Verlaine, une victime politique de la Prusse de Bismarck ; les âmes romantiques et révolutionnaires vénèrent son sacrifice sur l'autel d'une société pudibonde et hypocrite ; les détracteurs de la psychiatrie enfin dénoncent le scandale de l'expertise médico-légale à travers le " forfait " de von Gudden. Ce livre raconte la rencontre et la mort commune du roi Louis II et de son psychiatre von Gudden. S'y trouve retracée l'histoire de la Bavière, de la dynastie des Wittelsbach, de la très libérale mais contradictoire Constitution de 1848 qui, à la manière du fameux double-lien, porte en germe quelques-uns des futurs malheurs de Louis II...]Eh bien oui ! Les passions sont attisées dans la mesure ou finalement s'annonce une chouette analyse de Louis II, bien évidemment épaissie par l'histoire remâchée des Wittelsbach : on allait pas se priver d'un tel sésame. Et nous voici dans "La contradictoire Constitution de 1848" qui tel une arme maléfique fait chavirer l'esprit du pauvre Louis II.Mais le plus comique est que Louis II n'a que quelques années lors de cette constitution et deviendra roi en 1864. Nous voici renvoyés aux écrits d'un pseudo historien tout en étant psychiatre avec une touche de littérature française (le sonnet de Verlaine). J'admire le sérieux ! La moindre des choses étant tout de même de faire un parallèle qui tienne la route entre le malade et l'Histoire. Le meilleur reste à venir :[... L'auteur décrit ensuite avec empathie et humour la vie de ce roi excentrique, son amitié sulfureuse avec Richard Wagner, son amour platonique pour sa cousine " Sissi " et son aversion pour sa fiancée Sophie, sa passion de construire des châteaux espagnols en Bavière,...]Ceci, pour vous qui trouvez "Gala" détestable (voir le fil sur Marie-Antoinette) aurait dû vous mettre la puce à l'oreille. Nous voici en pleine logorhée historico-galaienne : amour platonique, aversion pour sa fiancée, sulfureuse amitié avec, serait-ce un jeu de mot sur l'oeuvre majeure de Cervantes, je n'ose y croire ? "... Les châteaux espagnols en Bavière..." Faut le faire, vous me l'accorderez ! Vous disiez à propos de Marie-Antoinette et Fersen avec un détachement blasé voire une certaine condescendance que le "Cul" -sans doute qualifiant d'éventuels sentiments- fait vendre, en voici un bel exemple. Un roi "homosexuel" qui a une relation platonique, doublée d'une aversion féminine tout en ayant une amitié sulfureuse, c'est croustillant ! suivons un tant bon livre, recommandé :[...sa destitution romanesque et sa fin tragique...]Que chacun se rassure, il n'y eut rien de romanesque dans sa destitution, hélas. Là encore l'Histoire fait place au grand guignol...[...Parallèlement revit devant nous le psychiatre Bernhard von Gudden, sa vie quotidienne, mais aussi son oeuvre de neuroanatomiste et son engagement de clinicien, propagateur de nouvelles méthodes de traitement plus libérales et humanistes. L'expertise psychiatrique, reproduite et traduite ici avec quelques autres documents de l'époque, est interprétée et replacée dans le contexte de la psychiatrie allemande du XIXe siècle finissant. Au-delà du scandale déontologique des conditions très particulières d'une expertise non moins particulière, nous découvrons alors un documentcharnière de l'histoire de la psychiatrie qui fait de la maladie de Louis Il le prototype de ce que Kraepelin, élève de von Gudden, appellera désormais démence précoce...]Et voici Gudden qui réapparait tel un lapin sortit d'un chapeau. On a droit à sa vie, son oeuvre (aïe, aïe, aïe...) le pauvre Rauchs se dépêche de replacer tout ceci dans le contexte d'un XIXème siècle finissant avec, pour le lecteur, le recul que ceci impose. Eh oui ! Ce diagnostic de Gudden fut un scandale déontologique, c'est pas nouveau ! Quand au pauvre Kraepelin, élève de Gudden à la déontologie à géométrie variable, ceci fait bien longtemps que la psychiatrie a continué d'évoluer sans lui. Ou l'art d'écrire des livres croustillants à but lucratif et pour ce faire teintés de "psycho-historico-analyse". Mettre "pseudo" devant n'aurait pas été de trop mais surtout aurait été plus honnête. Là on atteint des sommets dans le galvaudé, l'imposture et le fait de se décrédibiliser avec un grand talent.Vous comprendrez, je l'espère, pourquoi j'hésite toujours à lire des livres de "références historiques" donnés en exemple car souvent simplement piochés dans une quelconque bibliographie. Cet exemple seul (et je doute qu'il soit seul) tend à passer outre et les recommandations de lectures et les leçons données avec une certaine suffisance. Je repense à un intervenant à qui l'on a recommandé de revenir après avoir lu les bons livres... Bons ? Suivant quels critères ?Ceci pourrait rester de l'ordre de l'anecdote mais malheureusement donne à réfléchir quant à la démarche historique, les références sur lesquelles s'appuie une argumentation. Ici, un livre cité et l'affaire est jugée. Monsieur Rauchs semble un grand adepte de Jean des Cars cependant Jean des Cars à une petite longueur d'avance, sa biographie "Louis II de Bavière ou le roi foudroyé" est sortie en 1975 ; Rauchs, lui sort son bouquin fin des années 90. Sans vouloir m'avancer, ce livre sera le seul pondu par Herr Doktor Rauchs. On ne prendra pas même la peine -dans ce domaine à courants fluctuants- d'y répondre tant la partie pseudo-historique en est majeure et l'analyse de la personnalité du Roi l'exemple même de lieux communs rebattus. Amer constat, je vous l'accorde.
Je ne considère nullement ceci comme HS mais comme utile à tous, démontrant par là même qu'il faut souvent se méfier des vérités assénées, livres à l'appui et ceci quel que soit le fil. En général, les réponses assénées avec quelques mots réducteurs sont souvent prises comme des vérités et l'on ose guère "y revenir". Tourner l'autre en ridicule n'a jamais été une argumentation, tout au plus, une facilité. Ce fut dommageable pour certains sur certains liens. Qui disait déjà que "...L'Histoire est violée tant par les silences que par les mensonges..." ?
Bien à vous. Gaëte.
_________________ "... Et si je te semble avoir agi follement, peut-être suis-je accusée de folie par un insensé." (Sophocle)
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