Les la variétés des exemples donnés plus haut montre qu'il est impossible de faire la moindre généralisation : chaque cité a son propre mode de représentation, commun ou individuel, et dans la plupart des cité, surtout pour les hautes époques que tu envisages, chacun fait comme il veut, les motivations sont individuelles, et variées.
Quand l'emblème est commun à l'ensemble de la cité, le sens héraldique est assez évident en général : pour le lambda de Lacédémone ou le sigma de Sicyon, ils ne sont pas allé chercher bien loin, c'est l'initial de la ville ; simple, sobre, laconien. Ou alors ils se place sous la protection d'une divinité titulaires : le trident de Poséidon protège les hoplites mantinéens car Poséidon Hippios est la divinité poliade de Mantinée, tout simplement ; la massue des boucliers thébains fait référence à Héraclès, divinité martiale qui est née à Thèbes, et donc de manière très naturelle est amenée à poursuivre son devoir civique auprès de ses concitoyens.
Mais dès qu'on passe aux cas individuels, c'est impossible de cerner les motivations de chacun puisque leur histoire individuelle est méconnue. Ce peut-être des allusions à leur nom, ça peut-être un signe gentilice (certains veulent par exemple voir dans le triskèle, trois jambes blanches croisées, assez courant sur les boucliers athéniens, comme le blason de la famille Alcméonide, surnommée selon certains modernes "Les jambes blanches' d'après un vers d'Aristophane, mais je n'y crois pas, d'une part parce que le mot n'apparait pas, c'est une reconstitution, et d'autre part rien n'assure que ce soit une référence aux Alcméonides, mais une logique gentilice est néanmoins envisageable. Par exemple une famille qui bénéficie d'un culte héréditaire a de forte chance de marquer cette distinction ostensiblement sur son bouclier pour se placer sous la protection de son dieu protecteur et indiquer son statut social.
Ca peut aussi être lié à leur histoire intime : Ulysse par exemple selon une tradition locale a représenté un dauphin sur son bouclier, en référence à son fils qui fut sauvé dans son enfance par l'intervention d'un dauphin. Alcibiade provoque avec son Eros incongru dans ce contexte.
Les moins imaginatifs puisent dans l'inépuisable répertoire iconographique martial traditionnel : un animal agressif auquel ils cherchent à s'identifier, offrant aux yeux de l'adversaire un avertissement lourd de menace (un loup, un aigle, un taureau mugissant, un lion rugissant, un scorpion, un dauphin considéré considéré comme le roi des animaux, etc.), ou l'assimilation à un redoutable héros (s'abriter derrière un bouclier représentant un centaure qui tient une lyre, c'est faire référence à Chiron, l'éducateur de tous les grands héros de l'antiquité auxquels l'hoplite veut s'identifier) voir une promesse de mort (un oiseau de proie, un charognard, un corbeau, un chien ; on peut ajouter ces être hybrides inquiétants qui établissent des liens avec le monde des morts, comme le sphynx, un cheval anguipède, un pégase...). Ou au contraire, le symbole se veut protecteur (apotropaïque), soit une divinité qui combattra ainsi contre l'adversaire aux côté de l'hoplite (un trident, un cheval, un taureau pour Poséidon, une lyre ou une couronne de laurier pour Apollon, un Zeus foudroyant, une Athéna menaçante, etc. ; le personnage grimaçant que tu évoques est un gorgoneion, un tête de Gorgone, destinée à chasser le mauvais sort comme sur le tympan de certains temples, et à pétrifier l'adversaire comme l'original mythologique, d'où sa popularité). Ca peut-être un avertissement, pour montrer sa détermination comme Sophanès et son ancre : rien ne le fera céder, il sera comme un navire à l'ancre face à la tempête, inébranlable.
Et, ne l'oublions pas, il y aussi des dessins purement esthétique, qui sont là juste pour faire beau : un croix, un rosace, un carré... il est inutile de se torturer à chercher un obscur sens caché, c'est juste décoratif.
Maintenant, que penser du poulpe de la dernière image que j'avais poster, je n'en ai aucune idée, il faudrait connaître l'identité du personnage et son histoire personnelle, celle de sa famille ou la mythologie de la cité. Ou il aime le poulpe en salade.
Et chaque symbole peut avoir de multiples sens en fonction du contexte, inconnu. Par exemple, un hoplite qu'on ne connait pas et qui porte comme épisème un taureau a pu choisir ce symbole :
- parce qu'il est originaire du dème de Marathon, célèbre pour le taureau de Crète qui ravagea la plaine avant d'être tué par Thésée
- parce qu'il est Athénien, et veut faire référence à la glorieuse victoire de Marathon qui lui sert de référence
- parce que il exerce un sacerdoce de Poséidon, dont le taureau est un des symboles
- parce qu'un des ancêtres de sa noble famille remonte à Poséidon, comme les Eumolpides d'Eleusis
- parce qu'il s'appelle Tauron
- parce qu'il est Crétois
- parce qu'il est boucher (comme les Chicago Bulls !
)
- parce qu'il voulait prendre le sanglier mais que son voisin de palier l'a devancer alors il s'est rabattu sur le taureau...
On peut imaginer n'importe quoi, il n'existe aucune exclusivité.
[quote="]Je sais qu'il existe des épisèmes concernant les différentes cités (pour Athènes la lettre alpha, la chouette, pour Sparte la lettre lambda)[/quote]
Pour Sparte, c'est juste, par contre l'histoire de l'alpha Athénien, je n'ai pas la moindre idée d'où ça peut bien sortir, j'ai de gros doute sur la réalité de cette mention ; la chouette elle est un symbole d'Athéna, qu'Athènes a repris en particulier dans la frappe de sa monnaie, mais ce n'est pas un symbole d'Athènes sur les boucliers. Si elle apparait, c'est un choix individuel, non civique, et pas forcément lié à Athènes.