Il était question des "people", pas de ce forum, dont chacun peut apprécier la qualité !
je vous l'ai dit en toute simplicité : voulant faire un doctorat, et n'étant pas doué pour la littérature ni pour la grammaire "générative", on m'a proposé d'étudier les sectes chrétiennes au XVIIIè siècle, essentiellement en France et Allemagne. Si j'étais maçon, je suppose que j'en dirai plutôt moins que plus ? Mais c'est un fait, vouloir comprendre la maçonnerie, c'est se lancer dans un travail de longue haleine, et ne souhaitant pas passer mes étés dans la poussière d'archives à dépouiller les correspondances de ducs allemands et de mystiques-ésotéristes français, surtout lyonnais, je me suis arrêté. Bien sûr, j'ai rencontré longuement des maçons, faute de quoi je n'aurais pas compris grand-chose. On aurait cependant tort de penser qu'ils veulent à tout prix recruter le plus de monde possible.
Les maçons admettent qu'il y a des gens de moindre qualité, voire des brebis galeuses partout, donc chez eux également, malgré les filtres de la sélection. Il n'est pas exact de dire qu'un maçon va soutenir un autre maçon envers et contre tout dans la société : comme nous tous, ils ont leurs affinités et leurs choix ; certains se fréquentent en dehors des loges, d'autres jamais. L'entraide est donc loin d'être automatique ! On retrouve en fait chez eux quasiment les mêmes clivages socio-culturels que dans le reste de la société.
Il existe de bons bouquins sur le sujet (je n'en ai plus en tête). je me souviens avoir demandé un jour à des maçons si les révélations dans des revues concernant leurs signes de reconnaissance ou autres ne les gênaient pas (exemple : les trois points dans la signature pour se faire reconnaître), ce qui les a fait rire : ils ne s'en servent pas, en utilisant d'autres, plus subtils (qu'ils ne m'ont pas communiqués !)
En tout cas, pour ce XVIIIè siècle, celui des Lumières, on est étonné de découvrir à quel point l'ésotérisme à connotation mystique est au moins autant présent, en loges comme ailleurs, que la recherche sociale et politique. Une des grandes questions de la maçonnerie de l'époque est justement de savoir si les maçons "descendent" des templiers ou non ; le débat sera tranché en 1782 au convent de Wilhelmsbad, où il sera proclamé que les maçons dits spéculatifs sont la continuité des tailleurs de pierre, pas de néo-chevaliers du Temple (légende tenace).
Un dernier point : Ils ont un adage qu'ils répètent souvent : "le maçon libre dans la loge libre" : chacun est libre de penser ce qu'il veut dans la loge, pourvu qu'il respecte les codes maçonniques (loyauté, fraternité, travail), et la loge pense et fait quasiment ce qu'elle veut dans l'obédience. L'idée de "mots d'ordre" à suivre à grande échelle ou de "politique maçonnique globale" (et encore moins de complot !!) est totalement dénuée de sens. Comme chez les protestants, chacun parle en son propre nom, sachant que des sensibilités diverses existent. C'est dire à quel point les fantasmes de certains sites ultra-catholiques ou très droitistes sont loin du réel.
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