Solduros_390 a écrit :
Un aspect de Charles Quint m'a toujours étonné et j'ai du mal à me l'expliquer. Son but (son rêve) était d'unir la chrétienté sous la bannière impériale pour ensuite aller combattre les Ottomans et reprendre les lieux saints de Palestine. Il fait figure dans ce sens de dernier empereur mû par un idéal médiéval. Pourtant, on sent qu'il sait que l'Eglise est corrompue et qu'il faut la réformer, lui rendre sa pureté d'avant.
C'est son rêve ou votre interprétation ? Et ce rêve étrange et pénétrant est tiré de quelle biographie ?
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Or quand Luther commence à faire parler de lui, Charles s'y intéresse et le fait venir à la diète impériale.
Ah bon, je n'avais pas compris les choses ainsi. Je croyais que c'était Luther qui était prié de se bouger pour expliquer son point de vue. Bref de prendre congé de Frédéric III de Saxe -déjà convaincu à ses idées- et d'être entendu, éventuellement écouté. Luther attendait beaucoup de ce jeune empereur.
Cependant, si l'on commence à saper la hiérarchie à laquelle Dieu a donné tout pouvoir, si l'on prêche que "il suit donc de l'écriture que nous sommes libres...", que "Une uniformité de religion imposée confond le civil et le religieux..." ; "... que chacun peut émettre des doutes..." etc. on est proche de s'interroger sur d'autres hiérarchies , d'ailleurs on s'interroge et on admet l'idée qu'il ne faudra pas attendre l'au-delà pour que peut-être les "derniers" soient soudain propulsés au rang de "premiers"(dixit les Ecritures)...
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Mais rapidement il prend ses distances avec lui et le met au ban de l'empire.
Je n'ai pas souvenance que tout ce soit passé ainsi mais je dois me tromper très certainement...
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J'ai du mal à comprendre l'attachement de l'empereur au catholicisme romain alors qu'en tant que "champion" de cette cause, le pape lui a si souvent mis des bâtons dans les roues.
Charles Ier-V n'est champion de rien et de personne. Il a été élu pour un travail et il le fait, si d'aventure le pape lui met des bâtons dans les roues, on recadre. Ceci a toujours été fait par certains rois, prêcheurs et autres (Philippe le Bel avec Boniface, Savonarole avec Alexandre VI, Les Médicis avec Paul III etc.).
Si l'Autriche (donc les possessions habsbourgeoises) se farcit un siège à en manger du rat, on peut comprendre que la famille Habsbourg n'a nulle envie de laisser un m² de ses possessions aux Ottomans, non parce-qu'ils sont "infidèles" -c'est assez secondaire- mais parce-qu'en général on aime garder ce que l'on possède même si le slogan christique est de tout partager... Si encore les Ottomans étaient mués par cette belle phrase : "voir Naples et mourir", ce serait OK mais non ; c'est plutôt "tous les chemins mènent à Rome" et s'installer serait du plus bel effet. C'est donc le choc de deux mondes. Pour la foi, je demande à réfléchir...
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Il a raté l'occasion "d'améliorer" l'Eglise et du même coup
Améliorer, améliorer...
Au final, les thèses seront reprises autrement avec les Lumières (c'est le côté "vintage" de Montesquieu, Voltaire, Rousseau et autres).
Quant à la scission, au départ Luther s'inscrivait dans un débat sur les "indulgences" : mauvaise voie selon lui pour l'absolution mais bon plan selon le pape pour construire St Pierre de Rome (Cf. :
"Dispute sur l'efficacité des indulgences" - Luther (1517) /
"Le petit mot "Seigneur" signifie tout simplement "rédempteur"" ("Le grand cathéchisme"-1529) /
"Il suit donc de l'Ecriture que nous sommes libres...").
Donc moyennant monnaie sonnante et trébuchante, bakchich à chaque niveau, arrivée au pape pour achat et commande de matériaux en vue de belle cathédrale avec appartements de fonction, on se voyait absout des péchés commis. En ajoutant au jackpot, les péchés commis par certains trépassés pouvaient aussi s'effacer ce qui entraînait un stage moins long au purgatoire (ridicule lorsque l'on connait la longueur de l'éternité). Cependant comment faire pour ceux qui ne peuvent cracher au bassinet ? Nous sommes donc loin des paroles énoncées par les Ecritures.
Côté papauté, le travail a été d'un amateurisme ahurissant (là est le péché). Il aurait fallu propager un système de péréquation, à mon avis. Mais papauté et comptabilité = certaine paresse... Le bancal du système démontré puis enseigné, il est vrai que le doute peut s'installer. Ce que propose Luther :
1/ "Dieu seul est Dieu" (monopole du sacré, exit les sanctuaires, les pèlerinages, les saints, les ex-voto et autres chemins de traverse) ;
2/"Je suis devant Dieu" (exit les passeurs, confesseurs, référents mais "Tua res regitur") ;
3/"Dieu me parle par la Bible" (au croyant donc de réfléchir et à lui de s'imprégner des mots stricto sensu ou comme il se sent apte à le faire : les comptes seront rendus directement à Dieu).
Evidement l'Eglise, propice à l'urticaire si névrose d'abandon a fait une grosse crise et est devenue radicale. En face, on s'est aussi figé car il y avait du beau linge. Il faut dire que les thèses de Luther dépassaient le niveau du best-seller pour l'époque. Bonne idée de traduction latine et allemande, ainsi chacun pouvait s'informer et débattre...
Pour "l'amélioration de l'Eglise" via l'écrasement des idées de Luther, j'ai comme un doute...
Maintenant que l'on s'étripe au nom d'une religion, il faut bien de temps en temps insuffler un peu de spirituel dans sa manière d'occire son prochain.
Le sujet est traité ailleurs sachant que tout reste une question de pouvoir.