Y a t'il en général correspondance entre les limites des peuples gaulois de la période pré-romaine et les limites des parlers (patois) du XIX° siècle ?
Dans les Alpes, il y a une limite assez nette entre les parlers occitans et les parlers franco-provençal. Par exemple à La Mure on parlait un franco-provençal analogue à celui de Savoie, voire du val d'Aoste, alors qu'à 10 km au sud, à Saint Laurent en Beaumont ou Saint-Jean d'Hérans, on parlait occitan.
J'ai découvert ces jours ci qu'au Freney d'Oisans, en aval du barrage du Chambon on parlait un franco-provençal, alors qu'à Mizoen ou Besse, en amont du barrage, on parlait un dialecte occitan.
Ce qui et curieux est que cela n'évoque à priori pas des frontières entre peuplades gauloises. La Mure, Mens, Saint-Laurent en Baumont faisaient à priori partie du territoire des Tricores. Le Feney d'Oisans, Mizoen et Besse de celui des Ucènes.
Dans le premier cas, une hypothèse : suite à leur défaite face à César, le territoire des Tricores aurait été démantelé. Le sud aurait viré dans l'orbite des Catoriges, la partie médiane (Trièves, Beaumont, Valgaudemar) serait devenu un territoire d'implantation de colonies de vétérans des légions romaines, le nord (Matheysine) serait tombé dans l'orbite des Allobroges. On retrouve plus ou moins cette séparation aujourd'hui entre les départements de l'Isère (ex territoire des Allobroges) et les Hautes Alpes (centré sur le territoire des Catoriges).
Dans le second cas, une hypothèse : il y aurait eu deux peuplades gauloises distinctes dans la vallée de la Romanche, les habitants du sud du verrou du Chambon étant Ucènes et ceux du sud étant... ?
Un historien local, Bernard François, émet l'hypothèse que tout le haut de la vallée de la Romanche était peuplé par une ethnie apparentée aux Vénètes. Il se fond sur des arguments linguistiques, de culture technologique (ils étaient d'habiles forgerons) et de morphologie crânienne, ce qui fait sourire certains. Sans compter qu'on retrouve aujourd'hui la limite Isère-Hautes Alpes à peu près à cet endroit là, les habitants de la haute vallée ayant, pour des raisons traditionnelles, préféré être rattachés au briançonnais lors de la création des départements, en dépit de la barrière naturelle que constitue le col du Lautaret.
Il est un fait qu'il y a, sur la frontière entre ces deux territoires, un curieux monument : la "porte de Bons". Sa présence en ce lieu est assez inexplicable, quoique Bernard François en donne une explication intéressante : le peuplade située en amont (les "Vénètes") auraient été soumis au royaume de Cottius et, lorsqu'Auguste aurait confié à ce dernier l'administration (sous protectorat romain) de son royaume, il en aurait marqué les limites sur cette voie de communication en érigeant cette porte monumentale.
On pourrait alors se poser la question : jusqu'où allait le royaume de Cottius plus au sud, à savoir autour du massif des Ecrins ?
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