Ce mythe fut forgé par les généraux allemands survivants, dont notamment Erich von Manstein, soucieux de se rebâtir une respectabilité dans le nouveau régime, alors qu'il contribuait à mettre sur pied la Bundeswehr.
Il profite de la différence entre la Wehrmacht, la SS, les Einsatzgruppen, pour exonérer la première. Je me demande d'ailleurs si la présence dans l'organisation nazie de multiples groupes aux attributions semblables n'étaient pas qu'un gigantesque outil de déresponsabilisation.
Le mythe s'articule autour de 3 volets, tous aujourd'hui battu en brèche.
- La Wehrmacht aurait moins adhéré à l'idéologie nazie c'est sûr, si on compare avec la SS, dont le recrutement était au début basé sur une adhésion sans faille et fréquemment contrôlée. En revanche, la vision politique des officiers de la Wehrmacht était déterminante pour leur avancement. Après l'attentat raté de von Stauffenberg, l'armée a été soigneusement épurée et il a été exigé une adhésion plus marquée, symbolisée par le salut nazi.
- La Wehrmacht n'a pas participé aux exactions gratuites contre les civils, ni aux génocides Comme cela a été dit, c'est tout simplement faux. c'est une reprise de l'affiche de propagande "Familles abandonnées, faites confiance au soldat allemand !"
- La Wehrmacht n'a pas effectué de représailles cruelles contre les mouvements résistants. Ici encore, c'est faux. C'est sur ce dernier point qu'on peut par contre relativiser l'aspect "barbare" des actes commis, en reconnaissant que dans le cadre d'un conflit asymétrique, il n'existe aucun moyen de rester propre - comme l'expédition militaire américaine en Irak l'a rappelé. Il n'en reste pas moins que les méthodes employées - massacres de villages entiers, viols industriels, torture systématique - étaient disproportionnées et inutilement cruelles.
Pour ce qui est de la reconstitution, je pense que c'est une démarche très intéressante, qu'il faut encourager. À condition, bien entendu, que ceux qui jouent les "Méchants" ne soient pas des nostalgiques ou des obsédés de l'uniforme Hugo Boss
, mais qu'ils soient soucieux de montrer les limites de l'armée qu'ils représentent : une armée semi-moderne à moitié mécanisée, volontairement désorganisée au sommet et portée par une idéologie criminelle sans lien avec la réalité.