Zunkir a écrit :
On peut étudier le degré de divergence entre des langues apparentées, regarder comment elles ont évolué depuis qu'elles se sont séparées, d'elles-mêmes et au contact de langues non IE. On peut aussi voir combien de temps met une langue à évoluer. Certains traits, selon certains groupes de langue la simplification à l'extrême des morphèmes et de la grammaire, ou à l'inverse leur complexification veut dire que la langue est très ancienne. En gros on peut évaluer combien de temps il a fallut à une langue pour arriver au point où elle en est, et depuis combien de temps deux langues apparentées ont évolué séparément.
On évalue par exemple que les deux plus anciennes langues afro-asiatiques connues, l'akkadien et l'égyptien, avaient été séparées depuis environ 1000-1500 ans au moment où elles apparaissent dans les sources (vers 3000-2500 av JC). Cela est du au fait que l'on sait que ce type de langues évolue lentement, et que l'on voit en les étudiant que ces deux idiomes sont encore assez proches (du point de vue du linguiste, personnellement je ne vois pas des masses de points communs entre les deux).
Mais ça reste un ordre d'idée, une vague évaluation. Pour dater plus précisément les origines des IE et leurs migrations, on utilise surtout l'archéologie, pas vraiment la linguistique. Après je crois que certains utilisent des programmes informatiques pour étudier les origines des langues, mais je ne me souviens plus très bien. Je crois que les tenants de la thèse de l'origine anatolienne ont procédé ainsi.
Depuis une vingtaine d'années, deux hypothèses, fondées sur des indices linguistiques et archéologiques, partageaient la communauté des spécialistes. La première, développée par Marija Gimbutas, situait ce foyer dans les steppes eurasiennes et associait l'expansion indo-européenne à celle d'un peuple de cavaliers pasteurs appartenant à la civilisation dite des Kourganes (Ukraine). La seconde, défendue par Colin Renfrew, plaçait l'origine des langues indo-européennes en Anatolie (Turquie), et liait leur diffusion à celle des premiers peuples agriculteurs. Toutefois, la datation du début de cette migration ancienne (- 8 000 à - 9 500 ans) ne correspondait guère avec les évaluations des linguistes concernant l'âge de la langue-mère indo-européenne : tout au plus 5 000 à 6 000 ans.
Deux chercheurs de l'université d'Auckland (Nouvelle-Zélande) Russell Gray et Quentin Atkinson ont apporté de l'eau au moulin de la thèse anatolienne. Sur la base de 2 449 cognats lexicaux relevés dans 87 langues (dont trois éteintes), ils ont produit un nouvel arbre phylogénétique des langues indo-européennes. Or, cet arbre fait remonter la première divergence reconnue (celle du hittite) à - 7 800 ans, et peut-être plus tôt encore. Ce qui signifie que la langue-mère aurait pu être parlée en Anatolie il y a 8 000 à 9 000 ans, puis diffusée en même temps que l'agriculture dans toute l'aire actuellement occupée par la famille des langues indo-européennes, du Bengale à l'Islande.
La nouveauté de ce résultat ne tient pas au renouvellement des données, mais à l'application d'un algorithme généralement utilisé en génétique pour évaluer la proximité de différents génomes et situer leur divergence sur une échelle de temps.
Cette méthode de datation est considérée plus fiable que celle pratiquée par les linguistes (glottochronologie).
REFERENCE
R. Gray et Q. Atkinson, « Language-tree divergence times support the Anatolian theory of Indo-European origin », Nature, n° 426, 27 novembre 2003.
Voir également l'arbre des langues chez wiki:
http://upload.wikimedia.org/wikipedia/c ... anTree.svg