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Message Publié : 14 Mars 2015 13:29 
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Jean-Pierre Vernant
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Et puis bon l'esclavage est encore bien présent dans le commerce triangulaire puis aux USA alors que les idées libérales ont bien pénétré dans les sociétés... Il faut faire attention avec les concepts et leur application réelle. Je crois que dans ce file de discussion c'est le problème principale. On se retranche dans les vertus des textes sur le papier et on les calques sur l'Histoire. On l'a déjà abondamment fait avec le marxisme mais maintenant le libéralisme c'est plus "mode".

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Scribant reliqua potiores, aetate doctrinisque florentes. quos id, si libuerit, adgressuros, procudere linguas ad maiores moneo stilos. Amm. XXXI, 16, 9.


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Message Publié : 14 Mars 2015 13:36 
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Philippe de Commines
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Tout à fait exact.

On a donc l'illsutration que l'application de schémas théoriques préconcus, et qui plus est anachroniques, en dehors de toute vérification factuelle et même en contradiction avec les faits établis, ne peut conduire qu'à des conclusions erronées.

Et d'ailleurs, ce ne sont même pas des conclusions erronées. C'est le postulat de départ, faux, qui est qualifié de conclusion.

Bref, c?est un exercice de style idéologique ou moralisant, comme il y en a eu beaucoup jusqu'à Gibbon et au delà, mais ce n'est ni historique, ni scientifique.


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Message Publié : 14 Mars 2015 14:33 
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Pédro a écrit :
Et puis bon l'esclavage est encore bien présent dans le commerce triangulaire puis aux USA alors que les idées libérales ont bien pénétré dans les sociétés... .


Et c'est pour cela qu'il faut bien distinguer entre libéralisme économique et philosophique. Et la persistance de l'esclavage pendant les premiers temps du libéralisme philosophique ne signe pas une compatibilité mais bien le fait qu'une idée ne s'impose pas en un jour. Les débats sur l'esclavage ont commencé avant la révolution.



Citer :
On se retranche dans les vertus des textes sur le papier et on les calques sur l'Histoire. On l'a déjà abondamment fait avec le marxisme mais maintenant le libéralisme c'est plus "mode"


Je ne vois pas en quoi le libéralisme serait plus « mode » que le socialisme. Nombreux sont les historiens qui acceptent la crise Babouviste de 1797 comme un pré communisme.

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Message Publié : 15 Mars 2015 1:06 
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Jean-Pierre Vernant
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furtif a écrit :
Et c'est pour cela qu'il faut bien distinguer entre libéralisme économique et philosophique. Et la persistance de l'esclavage pendant les premiers temps du libéralisme philosophique ne signe pas une compatibilité mais bien le fait qu'une idée ne s'impose pas en un jour. Les débats sur l'esclavage ont commencé avant la révolution.


Il n'y a pas de distinction réelle ; l'un va avec l'autre et se bâti avec l'autre. Et puis bon, je le répète ce n'est pas une science, juste un point de vue politico-social qui, s'il décide d'être pris comme une vérité absolue me laisse quelques doutes quant à sa validité scientifique.

furtif a écrit :
Je ne vois pas en quoi le libéralisme serait plus « mode » que le socialisme. Nombreux sont les historiens qui acceptent la crise Babouviste de 1797 comme un pré communisme.


Parce que c'est le système dominent et si vous ne l'avez pas compris c'est que vous devez passer à coté de deux ou trois trucs dans l'actualité, dans les menées économiques actuelles, les pressions sur certains pays... Enfin bref, je ne vais peut être pas cracher frontalement sur ma carte pour vous faire comprendre que libéralisme a un peu plus le vent en poupe que le marxisme en ce moment...

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Message Publié : 15 Mars 2015 1:41 
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Salluste
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Pour parler purement théorie économique, il me semble bien que l'un des fondements de la théorie libérale est l'investissement : l'idée de la "main invisible" veut qu'une entreprise qui peut s'accroitre va s'accroitre.

Je me souviens d'un vieil exemple à base de pains au chocolat que m'avais donné un professeur en 3e : une boulangerie produit 30 pains au chocolat tous les matins. Ils sont tous vendus à midi, et dans l'après midi, ils doivent dire à des dizaines de clients "nous sommes désolés, mais nous sommes en rupture de stock". Dans la théorie libérale, le gérant de la boulangerie va calculer le montant de l'investissement nécessaire à produire le double de pain au chocolat : prix des matières premières, prix du temps perdu à les faire (qui n'est pas occupé à autre chose), prix de la main d’œuvre éventuellement nécessaire en plus, prix du four plus grand, etc... Si le prix de revient est, à terme, plus élevé que le coût de l'investissement, il fera cet investissement.

Il faudrait donc voir si c'est le cas dans la Rome antique : j'ai l'impression -sans avoir étudié en détail l’économie de cette période, je peux donc me tromper- que les bénéfices, à cette époque, étaient principalement employé à l'achat de nouvelles terres. On est dans une économie où la possession de terre est le signe de la richesse, plus qu'il n'en est le moteur.
Je m'explique : le commerce est sans doute bien plus rentable que l'agriculture. La possession d'une fabrique de garum est sans doute plus lucratif que l'emploi de ces terres pour la culture. Cependant, le réflexe premier, naturel, de l'homme riche de cette époque, noble ou pas, marchand ou non, est d'acheter des terres. Non pour accroitre ses revenus, mais pour "être plus riche".

Dans le cas de mon boulanger, plus haut, au lieu de réfléchir à comment vendre plus de pains au chocolat, il fera plaquer à la feuille d'or son comptoir : ça "fait plus riche", il est effectivement plus riche car détenteur d'un bien extrêmement couteux. Mais il ne réfléchit pas en "vrai libéral" dont le seul but est de répondre à l'ensemble de la demande.

En cela, il me semble que Rome n'est jamais libérale.


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Message Publié : 15 Mars 2015 2:29 
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Pendant des siècles, la possession de terres a été le but ultime des hommes. Celui qui possède la terre gouverne des hommes, possède un pouvoir que le commerce ne lui donnait pas. Le bourgeois du MA ne procédait pas autrement, parallèlement à son commerce, il achetait des terres, puis ses enfants abandonnaient le commerce pour gagner une autre classe sociale. Ce fut moins vrai à Rome où la terre ne valait pas grand chose, mais aux périodes de grosse inflation, celle-ci était une valeur refuge.

Ce n'est pas une question de libéralisme, c'est une question de pouvoir.

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Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer (Guillaume le Taciturne)


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Message Publié : 15 Mars 2015 16:23 
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La mentalité Romaine était quand même assez différente de la nôtre.
Dans la Rome Antique, la possession de la terre était un signe de noblesse, le vrai Romain est celui qui exploite une terre (après la cultiver par lui-même c'est encore autre chose)- c'est la seule tâche jugé digne à exercer dans les hautes sphères de la classe politique- du moins sous la République, après je ne sais pas si ca change, avec la transformation de l'Italie en plaine latifundiaire et les changements politico- économie- le but est moins de faire du profit que de tenir son rang et d'être détaché des contingences matérielles. On est pas dans une mentalité capitaliste- ou alors c'est assez rare. Les activités commerciales et industrielles sont assez mal vus- c'est bon pour les affranchis et les esclaves.


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Message Publié : 16 Mars 2015 9:38 
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Philippe de Commines
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Ce n'est pas seulement qu'une question de valeurs aristocratiques antiques. C'est aussi de la gestion patrimoniale de bon sens.

Caton l'ancien et ses congénaires ne font rien moins que du conseil en investissement pour les grandes fortunes. Warren Buffet n'a rien inventé quand il dit qu'il faut investir dans des actifs solides et dans la vieille économie.

Le bon sens, quand on a une ambition de perpétuation familiale dynastique, c'est d'investir dans des actifs sûrs à long terme et d'optimiser la rentabilité de ces actifs solides.

La terre est l'actif le plus sécurisé qui soit. Elle ne peut pas être détruite, ni par une tempête, contrairement à des navires de commerce au long cours et sa cargaison à la merci d'une tempête ou de pirates, ni même comme un bâtiment qui peut être brulé.

Les investissements sur une terre peuvent certes être ravagés (abattage des arbres fruitiers), mais ils sont reconstituables.

Le phénomène d'endettement de la noblesse, ce n'est pas tant le signe d'un appauvrissement de celle-ci que l'illustration du fait que les nobles ont relativement peu de liquidités parce qu'ils tiennent à garder l'essentiel de leur fortune en biens fonciers, même s'ils se font construire de belles villas, s'ils acquièrent des œuvres d'art hors de prix, ou qu'ils thésaurisent une partie de leur richesse dans des objets de luxe (vaisselle en métaux précieux).


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Message Publié : 16 Mars 2015 13:30 
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Pierre de L'Estoile
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Poirot a écrit :
Pour parler purement théorie économique, il me semble bien que l'un des fondements de la théorie libérale est l'investissement : l'idée de la "main invisible" veut qu'une entreprise qui peut s'accroitre va s'accroitre.

Etonnant! ce concept de "main invisible", pour vous il veut dire "ce qui peut s'accroitre va s'accroitre" concept emprunt de Darwinisme. Pour Adam Smith il s'agissait juste de la préférence nationale :
Adam Smith a écrit :
En préférant le succès de l'industrie nationale à celui de l'industrie étrangère, il ne pense qu'à se donner personnellement une plus grande sûreté ; et en dirigeant cette industrie de manière à ce que son produit ait le plus de valeur possible, il ne pense qu'à son propre gain ; en cela, comme dans beaucoup d'autres cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions ; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la société, que cette fin n'entre pour rien dans ses intentions.
En fait, en utilisant la réthorique puissante de la main invisible on a fait dire à Adam Smith beaucoup de chose qu'il n'a jamais dite et qui partage cette idée trenscendentale qu'on pourait traduire en simplfiant un peu par la phrase de Voltaire "tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles (je rajouterai des bisounours pour être méchant >:) )
Grampp a recensé neuf façons d'interpréter la main invisible http://fr.wikipedia.org/wiki/Main_invisible
tant le concept d'Adam Smith est flou.
Toute ces théories volent en éclat quand on s'interesse aux bulles spéculatives et au Krach boursier et la on ne fait nulle référence à la main du diable. J'ai vu au tout début de la crise des sub-prime des économistes trés serieux parler de l'excellente "résiliance du système" lol lol lol
pour en revenir à notre sujet une des interprétation de la main invisible est l'avantage mutuel à l'échange. Or cette idée se trouve déjà chez Cicéron. Ce concept n'était donc pas totalement étranger au romains.

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Lietz her heidine man. Obar seo lidan.
Thiot urancono. Manon sundiono.
(Il permit que les païens traversassent la mer, Pour rappeler aux Francs leurs péchés)


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Message Publié : 16 Mars 2015 13:56 
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Pierre de L'Estoile
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Jean-Marc Labat a écrit :
Pendant des siècles, la possession de terres a été le but ultime des hommes. Celui qui possède la terre gouverne des hommes, possède un pouvoir que le commerce ne lui donnait pas. Le bourgeois du MA ne procédait pas autrement, parallèlement à son commerce, il achetait des terres, puis ses enfants abandonnaient le commerce pour gagner une autre classe sociale. Ce fut moins vrai à Rome où la terre ne valait pas grand chose, mais aux périodes de grosse inflation, celle-ci était une valeur refuge.


Il y a aussi l'immobilier qui reste une valeur refuge encore aujourd'hui
A Rome le rapport locatif des insulae ou des boutiques étaient importants. Au moyen age, les moulins, les ponts à péages, les silos, les fermes forteresses, ont permis à des riches paysans de s'enrichir suffisamment pour accéder à la puissance seigneuriale.

Jean-Marc Labat a écrit :
Ce n'est pas une question de libéralisme, c'est une question de pouvoir.

Oui l'histoire est écrite par les vainqueurs.
Le titre est assez calamiteux : "Rome de la croissance économique à la crise" aurait été plus juste, l'auteur fait un raccourci idéologique libéralisme = croissance économique ou changement de main du pouvoir, et socialisme = système en crise d'un état totalitaire.
Il risque d'être complètement obsolète si dans 100 ans les chinois sont toujours communiste lol

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(Il permit que les païens traversassent la mer, Pour rappeler aux Francs leurs péchés)


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Message Publié : 16 Mars 2015 17:30 
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Jean-Pierre Vernant
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Almayrac a écrit :
Oui l'histoire est écrite par les vainqueurs.
Le titre est assez calamiteux : "Rome de la croissance économique à la crise" aurait été plus juste, l'auteur fait un raccourci idéologique libéralisme = croissance économique ou changement de main du pouvoir, et socialisme = système en crise d'un état totalitaire.
Il risque d'être complètement obsolète si dans 100 ans les chinois sont toujours communiste


Oh il suffit de lire sa prose ailleurs pour se convaincre que des prophéties existent sur la chute, obligatoire du modèle chinois, dans ce petit milieu d'idéologue. Pour eux les modèles divergents d'un iota du dogme libéral sont condamnés à la chute. Au delà du déterminisme et de l'absolue foi dans un modèle c'est une sympathique façon d'envisager l'Histoire... Je ne mets pas de liens mais vous devriez parvenir à trouver tout ça en suivant les liens de notre ami. C'est assez édifiant sur son objectivité. Moi personnellement un tel niveau de certitude me fait un peu peur...

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Message Publié : 16 Mars 2015 20:59 
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Almayrac a écrit :
Jean-Marc Labat a écrit :
Pendant des siècles, la possession de terres a été le but ultime des hommes. Celui qui possède la terre gouverne des hommes, possède un pouvoir que le commerce ne lui donnait pas. Le bourgeois du MA ne procédait pas autrement, parallèlement à son commerce, il achetait des terres, puis ses enfants abandonnaient le commerce pour gagner une autre classe sociale. Ce fut moins vrai à Rome où la terre ne valait pas grand chose, mais aux périodes de grosse inflation, celle-ci était une valeur refuge.


Il y a aussi l'immobilier qui reste une valeur refuge encore aujourd'hui
A Rome le rapport locatif des insulae ou des boutiques étaient importants. Au moyen age, les moulins, les ponts à péages, les silos, les fermes forteresses, ont permis à des riches paysans de s'enrichir suffisamment pour accéder à la puissance seigneuriale.

Jean-Marc Labat a écrit :
Ce n'est pas une question de libéralisme, c'est une question de pouvoir.

Oui l'histoire est écrite par les vainqueurs.
Le titre est assez calamiteux : "Rome de la croissance économique à la crise" aurait été plus juste, l'auteur fait un raccourci idéologique libéralisme = croissance économique ou changement de main du pouvoir, et socialisme = système en crise d'un état totalitaire.
Il risque d'être complètement obsolète si dans 100 ans les chinois sont toujours communiste lol


Encore qu'on pourrait discuter du degré de communiste des dirigeants chinois actuels :mrgreen:
Mais là on est dans le HS absolu.

Le concept de Totalitarisme dans l'antiquité. Faut l'oser celle-là aussi. Comme si les Empereurs Romains étaient capables de contrôler les moindre aspects de la vie des individus dans un empire de 80 millions d'habitants avec des moyens de communications inexistants et des forces de police presque dérisoire. La plupart des Empereurs avaient déjà du mal à contrôler vraiment Rome, alors l'Empire.


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Message Publié : 16 Mars 2015 21:43 
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Jean-Pierre Vernant
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Lordblackadder a écrit :
Le concept de Totalitarisme dans l'antiquité. Faut l'oser celle-là aussi. Comme si les Empereurs Romains étaient capables de contrôler les moindre aspects de la vie des individus dans un empire de 80 millions d'habitants avec des moyens de communications inexistants et des forces de police presque dérisoire. La plupart des Empereurs avaient déjà du mal à contrôler vraiment Rome, alors l'Empire.


Ce genre de thèse a eu cours il fut un temps, les traumatismes des grands totalitarismes aidant, mais cela fait un bon moment qu'on est revenu vers de plus salubres pensées et en effet, contrôler de façon aussi étroite l'existence de tous les individus de l'Empire est une gageure. Pour s'en convaincre il n'est qu'à voir combien certaines régions peuvent être à tel point déconnectées de la civilisation "urbaine" de l'Antiquité, comme l'Isaurie, qu'elles produisent des brigandages incessants qui mobilisent rien de moins que l'armée... On a beaucoup glosé sur la "police politique" de certains empereurs mais l'écho qui nous en est parvenu est surtout le fait d'aristocrates, de gens proches des milieux politiques, et qui donc pouvaient faire l'objet de surveillance. Face à cela il y avait bien sûr la "paranoïa" de certains empereurs qui pouvait aider mais imaginer la noblesse romaine comme peuplée de gentilles petites brebis dénuées d'appétit de pouvoir serait une erreur.
On parlait beaucoup également de l'augmentation du nombre de fonctionnaires qui serait un indice de la volonté de tout contrôler par une administration tentaculaire. Or les chiffres sont largement inférieurs à ceux de la Chine de la même époque et plus encore évidemment de nos démocraties modernes, vis à vis desquelles il faudrait vraiment tourner au crack pour les considérer comme totalitaires...

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Message Publié : 16 Mars 2015 22:15 
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D'ailleurs en lisant Tacite hier soir, j'ai été surpris de découvrir le niveau de latitude que pouvait avoir les gouverneurs ou les préfets de province dans l'exercice de leurs fonctions, en allant parfois jusqu'à s'engager dans des expéditions aussi hasardeuses en Arménie ou en Germanie sans forcément trop demander l'aval du pouvoir central, j'ai peut-être tiré de mauvaises conclusions de ce que j'ai lu- mais les imbroglios Arméniens, Parthes ou Ibérniens sont assez édifiants de ce point de vue là- avec des chefs Romains qui se mêlent parfois de ce qui ne les regarde pas. Après ca ne marche peut-être que sous Claude- qui semble toujours être le dernier au courant de ce qui se dans sa Domus- et le rendu du texte de Tacite.

Citer :
Mais en 51, Pharsman Ier d'Ibérie trahit son frère Mithridate, pour lui substituer sur le trône d'Arménie son propre fils, Rhadamiste2. Mithridate vient alors se placer sous la protection de la garnison romaine de Gornae2, mais le commandant de cette garnison, Caellius Pollion, se laisse acheter par Rhadamiste. À l'instigation de Pollion, Mithridate commet l'erreur de sortir de la forteresse pour une entrevue avec son neveu. Aussitôt, Rhadamiste se jette sur lui et le fait arrêter par ses gardes. Peu après, il le fait étouffer et monte à sa place sur le trône d'Arménie.

En 52, le gouverneur romain de la Cappadoce, Julius Pelignus, acheté à son tour par Rhadamiste, donne son assentiment à cette révolution.

En plus pour aller plus en avant dans le concept de totalitarisme, il faudrait déjà qu'une quelconque doctrine politique centrée autour de la personne de l'Empereur existe- l'Empire est-il attaché à un nom ? à une famille ? à un ensemble plus large ? On a pas l'équivalent d'un big Brother à Rome.


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Message Publié : 16 Mars 2015 22:54 
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Jean-Pierre Vernant
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Lordblackadder a écrit :
D'ailleurs en lisant Tacite hier soir, j'ai été surpris de découvrir le niveau de latitude que pouvait avoir les gouverneurs ou les préfets de province dans l'exercice de leurs fonctions, en allant parfois jusqu'à s'engager dans des expéditions aussi hasardeuses en Arménie ou en Germanie sans forcément trop demander l'aval du pouvoir central, j'ai peut-être tiré de mauvaises conclusions de ce que j'ai lu- mais les imbroglios Arméniens, Parthes ou Ibérniens sont assez édifiants de ce point de vue là- avec des chefs Romains qui se mêlent parfois de ce qui ne les regarde pas. Après ca ne marche peut-être que sous Claude- qui semble toujours être le dernier au courant de ce qui se dans sa Domus- et le rendu du texte de Tacite.


Le pouvoir est de toute façon très lié à la personnalité du monarque. Avec Claude les auteurs prennent souvent un malin plaisir à le mettre dans une situation ridicule. Néanmoins la multitude d'affaires plus ou moins louches que l'on rencontre dans les sources est assez évocatrice de la relative liberté d'action dont jouissent les acteurs du pouvoir romain. Si l'on prend l'affaire du passage des Goths en 376 le moins que l'on puisse dire est que cet événement est assuré par des incompétents notoires et que ce qui se passe ensuite est largement leur faute. Et du coup point de contrôle de bureaux sur l'action des individus...

Lordblackadder a écrit :
En plus pour aller plus en avant dans le concept de totalitarisme, il faudrait déjà qu'une quelconque doctrine politique centrée autour de la personne de l'Empereur existe- l'Empire est-il attaché à un nom ? à une famille ? à un ensemble plus large ? On a pas l'équivalent d'un big Brother à Rome.


Il n'y a même pas de règles de succession clairement établie ; entre choisir le "meilleur" prétendant et faire confiance à la famille on ne sait jamais trop, d'autant que l'armée s'avère de plus en plus un moyen de désigner un chef ayant moissonné la Gloria sur les champs de bataille. En tout cas il apparaît de plus en plus clair dans certains esprits de la fin de l'Antiquité que l'armée se confond presque avec l'ancien peuple civique et réunie en "comice" acclame le nouvel empereur. Mais cela n'est jamais entériné par un quelconque texte et dès le Ve siècle la dignité impériale retourne à Rome et/ou ailleurs en Italie.
Ce qui est aussi assez remarquable c'est que même dans le recrutement des empereurs on ne peut que voir des tendances dans leur origine sociale. Des aristocrates on verra de plus en plus s'affirmer des gens de plus ou moins basse extraction venant de l'armée, sans que cela ne s'impose totalement comme règle.

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