Il y a beaucoup à dire sur le sujet, et je n'ai hélas pas le temps en ce moment, même si je reviendrais avec plaisir en discuter quand ce sera le cas.
Le problème des unités de cavalerie de 1914, c'est qu'elles sont plus vulnérables (unités plus compactes présentant de meilleures cibles et plus difficilement dispersables, poids logistique, puissance de feu moindre que l'infanterie) que l'infanterie aux armes nouvelles (mitrailleuses, canons à tir rapide). Elles ne peuvent donc espérer combattre une ligne d'infanterie avec succès, surtout si elle est valorisée et appuyée. En conséquence, elles sont employées dans les zones lacunaires du dispositif ennemi anticipé, là où elles ne rencontreront pas de ligne d'infanterie prête à les affronter dans des conditions favorables : soit pour l'éclairage ou la flanc-garde de formations en marche afin de contribuer à leur sûreté en déplacement, soit en couverture d'un intervalle.
Avec la linéarisation totale du front à la fin de l'automne 1914, il n'y a plus ni marche à éclairer ou flanc-garder, ni intervalle à couvrir. Elles deviennent donc inutiles.
A l'est, les espaces lacunaires sont nombreux, les pénétrations profondes, et la cavalerie joue donc pleinement son rôle de renseignement et de sûreté dans les deux camps.
Concernant le Corps de cavalerie Sordet, sa mission spécifique justifie pleinement son emploi : en Belgique, on sait qu'il y a de nombreuses formations allemandes, mais on ne sait ni quelle est leur puissance réelle, ni quels en sont les axes d'effort, ni même quel est leur rythme réel de progression. On envoie donc un groupement de plusieurs divisions de cavalerie afin a) d'établir le contact afin de dessiner le contour du dispositif offensif allemand ; b) jalonner ses têtes de colonne, éventuellement les freiner sur ordre. Il s'agit donc d'acquérir du renseignement, prioritairement sur l'ennemi, dans un espace de manoeuvre sur lequel on ne connaît rien. Par ailleurs, cela permet d'étendre le front défensif de la Ve Armée vers l'ouest, couvrant ainsi cette dernière sur sa gauche, tout en la liant avec la BEF.
Le problème, c'est que le soutien (ravitaillement, remonte) d'une telle grande unité ad hoc, qui n'a pas été prévu compte tenu de son caractère circonstanciel, manque associé à des élongations conséquentes, des conditions climatiques éprouvantes, a rapidement provoqué l'attrition des unités du corps, attrition aggravée par essence par la nature du combat retardateur mené par le Corps Sordet. Bref, l'existence d'un tel corps à cet endroit est parfaitement justifié, mais son engagement a été mal pensé, tant en raison d'une zone d'action trop importante que d'une logistique dédiée insuffisante dans le cadre d'une mission par nature très exigeante. Au bilan, une usure prématurée pour un résultat décevant.
CNE EMB
_________________ "Sicut Aquila"/"Ils s'instruisent pour vaincre"/"Par l'exemple, le coeur et la raison"/"Labor Omnia Vincit"/"Ensemble en paix comme au combat"/"Si Vis Pacem Para Bellum"/"Passe toujours !"
|