Narduccio a écrit :
Pédro a écrit :
La mécanique semble en effet de cette sorte, je la compléterais simplement en y rajoutant un élément de "perturbation" pour éviter que l'on croit que la construction politique suit un schéma mathématique et inéluctable. On remarque toujours à travers l'Histoire de querelles plus ou moins vives entre le pouvoir central et des pouvoirs centrifuges. Le cas de la royauté française est assez éloquent ; au début de l'époque capétienne l'aristocratie a réussi a abattre la puissance de la monarchie carolingienne et se trouve avec un roi aux pouvoirs très limité qui doit énormément donner (abbayes par exemple) pour recevoir en retour une fidélité théorique et chancelante. Les monarques vont tenter de renforcer leur position et y parvenir durant le Moyen Âge, avant que les puissances aristocratiques ne profitent de l'affaiblissement de la monarchie durant la Guerre de Cent Ans pour reprendre de l'autonomie. Par la suite le renforcement de la royauté française se déroule avec toujours présente la "menace" de l'aristocratie qui s'exerce ponctuellement, comme lors de La Fronde. En clair, la déconstruction du modèle est possible et la centralisation n'est pas une "obligation".
C'est pour cela que j'utilise beaucoup de conditionnel. Le seul schéma qui semble se dérouler sans anicroches conformément au modèle est l'Empire Égyptien. On connait des cultures qui en sont resté au niveau des chefferies pendant des millénaires. Dans certaines régions où, aux époques historiques, on n'a que la connaissance de systèmes de chefferies, on a trouvé des traces archéologiques de civilisations.
En Europe occidentale au sens large, on a plusieurs exemples archéologiques de cultures, de sociétés pré-civilisationelles qui semblent se structurer et qui n'arrivent pas à concrétiser. La plupart du temps cela conduit à une période de récession. Il y a quelques decennies, on expliquait ces cas par la survenue d'une invasion externe. Or, dans certains cas, l'écroulement semble être endogène. Il me semble qu'il y a un cas assez bien documenté dans la plaine du Danube d'une telle érection suivie d'un écroulement. Dans certaines régions françaises, on suit sur quelques centaines d'années, parfois un millier d'années, à certains endroits, des cycles récurrents de structuration d'une culture qui semble aller vers le niveau supérieur et qui s'écroule.
En fait, d'après les articles que j'ai lu il y a 3 explications souvent avancées. La première est l'arrivée de perturbations externes (météorologiques, ou invasions). La seconde serait que la société en question n'arrive pas à exploiter pleinement le potentiel agricole de la région qu'elle exploite. Donc, à un moment, il y a surpopulation, puis famine, troubles, écroulements de la population et tout redémarre. La troisième explication pourrait être que les dirigeants n'arrivent pas à mettre en place un modèle pérenne. En fait, souvent les dirigeants trouvent leur légitimité dans le système du don-contredon. Un des exemple pourrait être, j'assure la protection de ton exploitation et de ta famille, en contrepartie, tu me rétrocède une partie de ta production. Mais, si les dirigeants accaparent trop des richesses de leur population celle-ci finit pas se révolter et refuser de financer le système. D'où écroulement du système. Mais en fait, la protection apportée servant au bien-être de la population, la disparition de la protection entraine la récession.
Et là où on rejoint la question initiale, c'est que l'un des moyens de gagner en légitimité pour le dirigeant suprême est d'assoir une partie de cette légitimité sur un statut sacerdotale différent du reste de la société, c'est le cas des rois-prêtres, mais c'est encore plus le cas des rois qui arrivent à avoir le statut de dieu-vivant. Dans ce cas, les échecs successifs dans certains cas pourraient se résumer dans le fait qu'il est facile d'être un héros, mais plus compliqué de devenir un dieu. Et ce serait ce passage qui ferait trébucher certaines cultures.
Narduccio, un grand merci pour vos contributions, qui éclaircissent mes questions d'une manière élaborée.
J'ai parcouru la semaine passée l'internet cherchant une réponse à mes questions et pour être honnête je n'ai pas trouvé grand chose, hors de ce que vous avez déja mentioné...même cherché chez la démocratie germanique du "thing", les societés contemporaines "primitives", les tribus indiens de l'Amérique du Nord...(là bas j'ai appris de la matriliniarité de la société...)
Mais peut-être dans toute ma lecture je pense d'avoir appris:
Les premières sociétés sont en contact avec leur environnement, un environnement qu'ils ne comprennent pas et qu'ils craignent. Et ils voient que leur survie dépend de la nature, comme la pluie, le soleil, les saisons...Et ils contemplent ces élements comme des "dieux". Dieux qu'ils devont plaire pour n'avoir pas des catastrophes, pour avoir une chasse réussie, une récolte opulente...et là au bout du temps on avait des "shaman", qui pretendent d'avoir une relation avec les "dieux" ou peuvent interpréter les désirs des "dieux"...
Et là j'ai des difficultés: Est-ce que le "chef" émergant ètait un gerrier qui d'abord assurait la sécurité et ça en collaboration avec le "prêtre" ou est-ce que dès le début les deux fonctions sont mixtes? J'ai aussi lu d'une sorte de démocracie primitive où la "réunion des ainés" avait la parole décisive...
Une deuxiéme remarque et c'est maintes fois abordé dans le livre que j'ai mentioné en haut "Kings and gods" et que j'ai parcouru une deuxième fois pour les questions de ce fil:
On ne doit pas avoir une perception moderne de la réligion des anciens. Pour eux leur "roi" intermediaire entre eux et les dieux ou même apartenant à ces dieux mêmes, était d'une valeur prémordiale et ils étaient prêts à des tâches exorbitantes tout pour gagner la faveur des dieux qui résultait dans leur bien-être.
Une dernière remarque:
Je suis séduis par la theorie dans le livre que j'ai justement mentioné, où l'auteur pointe vers le lien supposé pour la Mésopotamie et l'Egypte entre la religion et l'environnement, la nature.
Pour la Mésopotamie avec sa nature imprévisible une réligion de peur ou rien n'était stable où les rois, comme intermediaire avec les dieux, n'étaient jamais sûr de ce qui va-t-arriver. Et l'Egypte où les crues du Nil étaient presque constantes avec les saisons, d'où une réligion stable avec un encadrement fixe avec même déification du monarch...
Cordialement, Paul.