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Message Publié : 31 Mars 2016 22:07 
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Quand on regarde coté "préhistoire", on note presque partout que la société se structure et que des territoires limitrophes s'unissent. L'interprétation des traces archéologiques n'est pas toujours facile, mais globalement, il existe une espèce de structuration clans, chefferies, royauté avec une cité centrale ou plusieurs cités plus ou moins indépendantes. On voit l'émergence presque généralisée de ce schéma, mais on ignore souvent comment cela s'est fait dans le détail, car avant la naissance de la civilisation, il n'y a pas d'écriture. Effectivement, historiquement, on trouve un tas de contre-exemple de telle ou telle situation. On sait que des territoires ont été réunis. Dans certains cas, la conquête suivie d'une occupation avant intégration ne fait aucun doute. C'est le cas pour l'Empire Romain. Rome a conquis tous les territoire qui ont fait partie de l'Empire. Il me semble qu'il y a quelques minimes exceptions, mais vous en connaissez plus sur la question.

Dans le cas égyptien, la conquête de la Basse-Égypte est une certitude. Comment s'est réuni le royaume de la Haute-Égypte ? Les archéologues ne décèlent pas des guerres unificatrices au sud du pays. Mais les rois de Nagada, qui deviendront les premiers pharaons se donnent depuis quelques génération une image guerrière déjà avant la conquête du nord du pays. Tout ce que l'on sait, c'est que le premier pharaon a conquis militairement la Basse-Égypte et qu'il a réuni les 2 couronnes.

Ce qui laisse à penser qu'il y avait une couronne de Basse-Égypte. Mais, les archéologues ont du mal à identifier quelle culture aurait exercé sa proéminence au nord... En fait, le nord donne l'impression d'un état plus égalitaire, car les tombes de l'époque ne montre pas de différentiation nette entre des morts appartenant à des classes différentes. Mais les rois de Nagada, qui deviendront les premiers pharaons se donnent depuis quelques génération une image guerrière déjà avant la conquête du nord du pays.

Dans la Chine antique, au Japon, en Mésopotamie, on pense déceler le schéma général : clans, chefferies, civilisation et des rois qui unifient assez vite des royaumes importants. En fait, à certaines périodes, à certains endroits, il y a un roi qui gouverne un royaume et une multitudes de chefs locaux qui gouvernent de manière plus ou moins indépendante les régions alentours qui ne sont pas intégrées au royaume. Comme s'il y avait un pays utile, civilisé et des pays annexes jouissant d'une indépendance toute relative. Le royaume principal ayant les moyens d'imposer sa loi s'ill décide de le faire, mais n'en éprouvant pas la nécessité dans la plupart des cas. L’agrégation au royaume principal se fait à certains moment par la reconnaissance par les chefs locaux que le roi est bien leur roi et ils acceptent de devenir leurs subordonnés, de payer un tribut et de fournir des soldats. Tandis que d'autres chefs préfèrent résister à la conquête.

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Message Publié : 31 Mars 2016 22:55 
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Jean-Pierre Vernant
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Narduccio a écrit :
Dans la Chine antique, au Japon, en Mésopotamie, on pense déceler le schéma général : clans, chefferies, civilisation et des rois qui unifient assez vite des royaumes importants. En fait, à certaines périodes, à certains endroits, il y a un roi qui gouverne un royaume et une multitudes de chefs locaux qui gouvernent de manière plus ou moins indépendante les régions alentours qui ne sont pas intégrées au royaume. Comme s'il y avait un pays utile, civilisé et des pays annexes jouissant d'une indépendance toute relative. Le royaume principal ayant les moyens d'imposer sa loi s'ill décide de le faire, mais n'en éprouvant pas la nécessité dans la plupart des cas. L’agrégation au royaume principal se fait à certains moment par la reconnaissance par les chefs locaux que le roi est bien leur roi et ils acceptent de devenir leurs subordonnés, de payer un tribut et de fournir des soldats. Tandis que d'autres chefs préfèrent résister à la conquête.


La mécanique semble en effet de cette sorte, je la compléterais simplement en y rajoutant un élément de "perturbation" pour éviter que l'on croit que la construction politique suit un schéma mathématique et inéluctable. On remarque toujours à travers l'Histoire de querelles plus ou moins vives entre le pouvoir central et des pouvoirs centrifuges. Le cas de la royauté française est assez éloquent ; au début de l'époque capétienne l'aristocratie a réussi a abattre la puissance de la monarchie carolingienne et se trouve avec un roi aux pouvoirs très limité qui doit énormément donner (abbayes par exemple) pour recevoir en retour une fidélité théorique et chancelante. Les monarques vont tenter de renforcer leur position et y parvenir durant le Moyen Âge, avant que les puissances aristocratiques ne profitent de l'affaiblissement de la monarchie durant la Guerre de Cent Ans pour reprendre de l'autonomie. Par la suite le renforcement de la royauté française se déroule avec toujours présente la "menace" de l'aristocratie qui s'exerce ponctuellement, comme lors de La Fronde. En clair, la déconstruction du modèle est possible et la centralisation n'est pas une "obligation".

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Scribant reliqua potiores, aetate doctrinisque florentes. quos id, si libuerit, adgressuros, procudere linguas ad maiores moneo stilos. Amm. XXXI, 16, 9.


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Message Publié : 31 Mars 2016 23:31 
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Pédro a écrit :
La mécanique semble en effet de cette sorte, je la compléterais simplement en y rajoutant un élément de "perturbation" pour éviter que l'on croit que la construction politique suit un schéma mathématique et inéluctable. On remarque toujours à travers l'Histoire de querelles plus ou moins vives entre le pouvoir central et des pouvoirs centrifuges. Le cas de la royauté française est assez éloquent ; au début de l'époque capétienne l'aristocratie a réussi a abattre la puissance de la monarchie carolingienne et se trouve avec un roi aux pouvoirs très limité qui doit énormément donner (abbayes par exemple) pour recevoir en retour une fidélité théorique et chancelante. Les monarques vont tenter de renforcer leur position et y parvenir durant le Moyen Âge, avant que les puissances aristocratiques ne profitent de l'affaiblissement de la monarchie durant la Guerre de Cent Ans pour reprendre de l'autonomie. Par la suite le renforcement de la royauté française se déroule avec toujours présente la "menace" de l'aristocratie qui s'exerce ponctuellement, comme lors de La Fronde. En clair, la déconstruction du modèle est possible et la centralisation n'est pas une "obligation".


C'est pour cela que j'utilise beaucoup de conditionnel. Le seul schéma qui semble se dérouler sans anicroches conformément au modèle est l'Empire Égyptien. On connait des cultures qui en sont resté au niveau des chefferies pendant des millénaires. Dans certaines régions où, aux époques historiques, on n'a que la connaissance de systèmes de chefferies, on a trouvé des traces archéologiques de civilisations.

En Europe occidentale au sens large, on a plusieurs exemples archéologiques de cultures, de sociétés pré-civilisationelles qui semblent se structurer et qui n'arrivent pas à concrétiser. La plupart du temps cela conduit à une période de récession. Il y a quelques decennies, on expliquait ces cas par la survenue d'une invasion externe. Or, dans certains cas, l'écroulement semble être endogène. Il me semble qu'il y a un cas assez bien documenté dans la plaine du Danube d'une telle érection suivie d'un écroulement. Dans certaines régions françaises, on suit sur quelques centaines d'années, parfois un millier d'années, à certains endroits, des cycles récurrents de structuration d'une culture qui semble aller vers le niveau supérieur et qui s'écroule.

En fait, d'après les articles que j'ai lu il y a 3 explications souvent avancées. La première est l'arrivée de perturbations externes (météorologiques, ou invasions). La seconde serait que la société en question n'arrive pas à exploiter pleinement le potentiel agricole de la région qu'elle exploite. Donc, à un moment, il y a surpopulation, puis famine, troubles, écroulements de la population et tout redémarre. La troisième explication pourrait être que les dirigeants n'arrivent pas à mettre en place un modèle pérenne. En fait, souvent les dirigeants trouvent leur légitimité dans le système du don-contredon. Un des exemple pourrait être, j'assure la protection de ton exploitation et de ta famille, en contrepartie, tu me rétrocède une partie de ta production. Mais, si les dirigeants accaparent trop des richesses de leur population celle-ci finit pas se révolter et refuser de financer le système. D'où écroulement du système. Mais en fait, la protection apportée servant au bien-être de la population, la disparition de la protection entraine la récession.

Et là où on rejoint la question initiale, c'est que l'un des moyens de gagner en légitimité pour le dirigeant suprême est d'assoir une partie de cette légitimité sur un statut sacerdotale différent du reste de la société, c'est le cas des rois-prêtres, mais c'est encore plus le cas des rois qui arrivent à avoir le statut de dieu-vivant. Dans ce cas, les échecs successifs dans certains cas pourraient se résumer dans le fait qu'il est facile d'être un héros, mais plus compliqué de devenir un dieu. Et ce serait ce passage qui ferait trébucher certaines cultures.

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Message Publié : 31 Mars 2016 23:58 
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Jean-Pierre Vernant
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Narduccio a écrit :
En fait, d'après les articles que j'ai lu il y a 3 explications souvent avancées. La première est l'arrivée de perturbations externes (météorologiques, ou invasions). La seconde serait que la société en question n'arrive pas à exploiter pleinement le potentiel agricole de la région qu'elle exploite. Donc, à un moment, il y a surpopulation, puis famine, troubles, écroulements de la population et tout redémarre. La troisième explication pourrait être que les dirigeants n'arrivent pas à mettre en place un modèle pérenne. En fait, souvent les dirigeants trouvent leur légitimité dans le système du don-contredon. Un des exemple pourrait être, j'assure la protection de ton exploitation et de ta famille, en contrepartie, tu me rétrocède une partie de ta production. Mais, si les dirigeants accaparent trop des richesses de leur population celle-ci finit pas se révolter et refuser de financer le système. D'où écroulement du système. Mais en fait, la protection apportée servant au bien-être de la population, la disparition de la protection entraine la récession.


Je suis d'accord et si vous avez des références bibliographiques, surtout archéologiques je suis preneur, parce que jusque là mes connaissances de ces mécanismes sont surtout dues à l'Histoire et à l'Ethnologie. J'ai lu quelques travaux sur l'âge du bronze mais ils ont un peu datés et le dernier que je me suis procuré particulièrement mal écrit.

Narduccio a écrit :
Et là où on rejoint la question initiale, c'est que l'un des moyens de gagner en légitimité pour le dirigeant suprême est d'assoir une partie de cette légitimité sur un statut sacerdotale différent du reste de la société, c'est le cas des rois-prêtres, mais c'est encore plus le cas des rois qui arrivent à avoir le statut de dieu-vivant. Dans ce cas, les échecs successifs dans certains cas pourraient se résumer dans le fait qu'il est facile d'être un héros, mais plus compliqué de devenir un dieu. Et ce serait ce passage qui ferait trébucher certaines cultures.


Toute la question, à mon sens, est de savoir si dans le cas des "rois prêtres" des origines on est bien dans le cas d'un moyen de légitimation du pouvoir, simplement parce que leur autorité est médiocre. On le voit chez les Germains dans la citation que j'ai indiqué plus haut, de même qu'à Rome ; on conserve la royauté primordiale dans sa fonction mais on se dote de chefs plus efficaces.
Pour les régimes déjà structurés par contre l'ancrage dans le divin est effectivement sans doute une recherche de la légitimité et plus encore d'inviolabilité. A Rome c'est très net ; au sortir d'une période troublée où les Princes se sont succédé sur le trône à un rythme d'enfer le premier travail de la Tétrarchie et de Dioclétien est "d'orientaliser" le pouvoir en lui donnant un patronage divin et une étiquette de cour complexe.

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Message Publié : 01 Avr 2016 9:58 
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Par hasard, ce matin je trouve dans ma boite mail un lien vers une conférene de l'Inrap sur la spécificité égyptienne à cette période. http://www.inrap.fr/l-unification-culturelle-de-la-vallee-du-nil-au-ive-millenaire-9209

Citer :
Le prédynastique - parfois appelé aussi civilisation de Nagada - est marqué par une inflexion sociale qui n'a guère de parallèles au sein des autres âges du cuivre méditerranéens. Se mettent alors en place les structures qui conduisent à l'émergence de la « plus ancienne civilisation historique de la planète ». La question de l'unification culturelle est corrélée à celle de l'émergence de l'État. Tout semble en effet commencer par une bipartition géoculturelle, au IVe millénaire, entre la Haute et la Basse-Égypte. Puis, au début du IIIe millénaire, l'ensemble du pays apparaît unifié sous la houlette d'un pharaon porteur de la double couronne de Haute et de Basse-Égypte. Dans les années 1960-1970, sur la base des textes et d'une documentation ancienne, le schéma explicatif d'une « expansion nagadienne » soumettant les populations du Nord - sous-entendu par la force - prévaut. Les données issues des fouilles menées depuis, notamment dans le delta du Nil, ont conduit certains chercheurs à nier toute expansion et, d'autres, à reconsidérer l'unification du point de vue d'un processus d'acculturation.

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Message Publié : 01 Avr 2016 22:26 
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On aime un hasard si opportun :mrgreen: .

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Message Publié : 01 Avr 2016 22:54 
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Il apparait bien que le cas égyptien est spécifique car il semble y avoir un lien direct qui mène d'une seule culture, celle de Nagada, vers la civilisation égyptienne qui semble en plus culturellement très unifiée. Alors que dans la plupart des autres cas, on détecte des assimilations, des conquêtes, des regroupements, mais aussi des écroulements et des reprises. Bref, la plupart des civilisations se sont créées de manières assez chaotique.

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Message Publié : 01 Avr 2016 23:33 
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Pédro a écrit :
Narduccio a écrit :
En fait, d'après les articles que j'ai lu il y a 3 explications souvent avancées. La première est l'arrivée de perturbations externes (météorologiques, ou invasions). La seconde serait que la société en question n'arrive pas à exploiter pleinement le potentiel agricole de la région qu'elle exploite. Donc, à un moment, il y a surpopulation, puis famine, troubles, écroulements de la population et tout redémarre. La troisième explication pourrait être que les dirigeants n'arrivent pas à mettre en place un modèle pérenne. En fait, souvent les dirigeants trouvent leur légitimité dans le système du don-contredon. Un des exemple pourrait être, j'assure la protection de ton exploitation et de ta famille, en contrepartie, tu me rétrocède une partie de ta production. Mais, si les dirigeants accaparent trop des richesses de leur population celle-ci finit pas se révolter et refuser de financer le système. D'où écroulement du système. Mais en fait, la protection apportée servant au bien-être de la population, la disparition de la protection entraine la récession.


Je suis d'accord et si vous avez des références bibliographiques, surtout archéologiques je suis preneur, parce que jusque là mes connaissances de ces mécanismes sont surtout dues à l'Histoire et à l'Ethnologie. J'ai lu quelques travaux sur l'âge du bronze mais ils ont un peu datés et le dernier que je me suis procuré particulièrement mal écrit.


Voici une conférence (de l'Inrap encore) qui aborde la naissance de l’État : http://www.inrap.fr/naissance-des-inegalites-et-premisses-de-l-etat-9104

Citer :
La révolution néolithique dans le monde. Aux origines de l'emprise humaine sur le vivant
Rise of Inequalities and Birth of the State
par Jean-Paul Demoule
Dans la plupart des foyers originels d'invention de l'agriculture et de l'élevage se sont développées au bout de quelques millénaires des sociétés inégalitaires, puis des sociétés étatiques et urbaines, qui elles-mêmes ont étendue ensuite leur emprise territoriale. Toutefois leur rythme d'apparition a été très différent selon les régions, et certaines ont connu aussi des retours en arrière, sinon des effondrements. Il n'y adonc pas eu de développement linéaire et forcément inévitable de tels types de sociétés. On peut alors se demander si l'inégalité est « naturelle », inscrite dans le destin de l'humanité, et s'interroger sur son apparition. Celle-ci demande un certain nombre de conditions de possibilité, notamment écologiques et environnementales - tout comme, d'ailleurs, le Néolithique lui-même. Mais il faut aussi qu'un groupe social se donne les moyens idéologiques de prendre le contrôle de l'ensemble d'une société, et de le garder durablement. Les recherches archéologiques de ces dernières années, au Proche-Orient comme en Europe, suggèrent quelques pistes.


J'ai mis une phrase en gras. La question posée par Paul rejoint cette problématique. L'invention des divinités et d'un cérémorial compliqué n'est-il pas une réponse idéologiques au contrôle de l'ensemble de la société. On note dans certains cas une réticence de la part d'une partie des populations à l'évolution vers plus d'état.

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Message Publié : 02 Avr 2016 22:46 
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Philippe de Commines
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Narduccio a écrit :
Pédro a écrit :
La mécanique semble en effet de cette sorte, je la compléterais simplement en y rajoutant un élément de "perturbation" pour éviter que l'on croit que la construction politique suit un schéma mathématique et inéluctable. On remarque toujours à travers l'Histoire de querelles plus ou moins vives entre le pouvoir central et des pouvoirs centrifuges. Le cas de la royauté française est assez éloquent ; au début de l'époque capétienne l'aristocratie a réussi a abattre la puissance de la monarchie carolingienne et se trouve avec un roi aux pouvoirs très limité qui doit énormément donner (abbayes par exemple) pour recevoir en retour une fidélité théorique et chancelante. Les monarques vont tenter de renforcer leur position et y parvenir durant le Moyen Âge, avant que les puissances aristocratiques ne profitent de l'affaiblissement de la monarchie durant la Guerre de Cent Ans pour reprendre de l'autonomie. Par la suite le renforcement de la royauté française se déroule avec toujours présente la "menace" de l'aristocratie qui s'exerce ponctuellement, comme lors de La Fronde. En clair, la déconstruction du modèle est possible et la centralisation n'est pas une "obligation".


C'est pour cela que j'utilise beaucoup de conditionnel. Le seul schéma qui semble se dérouler sans anicroches conformément au modèle est l'Empire Égyptien. On connait des cultures qui en sont resté au niveau des chefferies pendant des millénaires. Dans certaines régions où, aux époques historiques, on n'a que la connaissance de systèmes de chefferies, on a trouvé des traces archéologiques de civilisations.

En Europe occidentale au sens large, on a plusieurs exemples archéologiques de cultures, de sociétés pré-civilisationelles qui semblent se structurer et qui n'arrivent pas à concrétiser. La plupart du temps cela conduit à une période de récession. Il y a quelques decennies, on expliquait ces cas par la survenue d'une invasion externe. Or, dans certains cas, l'écroulement semble être endogène. Il me semble qu'il y a un cas assez bien documenté dans la plaine du Danube d'une telle érection suivie d'un écroulement. Dans certaines régions françaises, on suit sur quelques centaines d'années, parfois un millier d'années, à certains endroits, des cycles récurrents de structuration d'une culture qui semble aller vers le niveau supérieur et qui s'écroule.

En fait, d'après les articles que j'ai lu il y a 3 explications souvent avancées. La première est l'arrivée de perturbations externes (météorologiques, ou invasions). La seconde serait que la société en question n'arrive pas à exploiter pleinement le potentiel agricole de la région qu'elle exploite. Donc, à un moment, il y a surpopulation, puis famine, troubles, écroulements de la population et tout redémarre. La troisième explication pourrait être que les dirigeants n'arrivent pas à mettre en place un modèle pérenne. En fait, souvent les dirigeants trouvent leur légitimité dans le système du don-contredon. Un des exemple pourrait être, j'assure la protection de ton exploitation et de ta famille, en contrepartie, tu me rétrocède une partie de ta production. Mais, si les dirigeants accaparent trop des richesses de leur population celle-ci finit pas se révolter et refuser de financer le système. D'où écroulement du système. Mais en fait, la protection apportée servant au bien-être de la population, la disparition de la protection entraine la récession.

Et là où on rejoint la question initiale, c'est que l'un des moyens de gagner en légitimité pour le dirigeant suprême est d'assoir une partie de cette légitimité sur un statut sacerdotale différent du reste de la société, c'est le cas des rois-prêtres, mais c'est encore plus le cas des rois qui arrivent à avoir le statut de dieu-vivant. Dans ce cas, les échecs successifs dans certains cas pourraient se résumer dans le fait qu'il est facile d'être un héros, mais plus compliqué de devenir un dieu. Et ce serait ce passage qui ferait trébucher certaines cultures.


Narduccio, un grand merci pour vos contributions, qui éclaircissent mes questions d'une manière élaborée.
J'ai parcouru la semaine passée l'internet cherchant une réponse à mes questions et pour être honnête je n'ai pas trouvé grand chose, hors de ce que vous avez déja mentioné...même cherché chez la démocratie germanique du "thing", les societés contemporaines "primitives", les tribus indiens de l'Amérique du Nord...(là bas j'ai appris de la matriliniarité de la société...)

Mais peut-être dans toute ma lecture je pense d'avoir appris:
Les premières sociétés sont en contact avec leur environnement, un environnement qu'ils ne comprennent pas et qu'ils craignent. Et ils voient que leur survie dépend de la nature, comme la pluie, le soleil, les saisons...Et ils contemplent ces élements comme des "dieux". Dieux qu'ils devont plaire pour n'avoir pas des catastrophes, pour avoir une chasse réussie, une récolte opulente...et là au bout du temps on avait des "shaman", qui pretendent d'avoir une relation avec les "dieux" ou peuvent interpréter les désirs des "dieux"...
Et là j'ai des difficultés: Est-ce que le "chef" émergant ètait un gerrier qui d'abord assurait la sécurité et ça en collaboration avec le "prêtre" ou est-ce que dès le début les deux fonctions sont mixtes? J'ai aussi lu d'une sorte de démocracie primitive où la "réunion des ainés" avait la parole décisive...

Une deuxiéme remarque et c'est maintes fois abordé dans le livre que j'ai mentioné en haut "Kings and gods" et que j'ai parcouru une deuxième fois pour les questions de ce fil:
On ne doit pas avoir une perception moderne de la réligion des anciens. Pour eux leur "roi" intermediaire entre eux et les dieux ou même apartenant à ces dieux mêmes, était d'une valeur prémordiale et ils étaient prêts à des tâches exorbitantes tout pour gagner la faveur des dieux qui résultait dans leur bien-être.

Une dernière remarque:
Je suis séduis par la theorie dans le livre que j'ai justement mentioné, où l'auteur pointe vers le lien supposé pour la Mésopotamie et l'Egypte entre la religion et l'environnement, la nature.
Pour la Mésopotamie avec sa nature imprévisible une réligion de peur ou rien n'était stable où les rois, comme intermediaire avec les dieux, n'étaient jamais sûr de ce qui va-t-arriver. Et l'Egypte où les crues du Nil étaient presque constantes avec les saisons, d'où une réligion stable avec un encadrement fixe avec même déification du monarch...

Cordialement, Paul.


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Message Publié : 04 Avr 2016 17:29 
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Pierre de L'Estoile
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PaulRyckier a écrit :
Les premières sociétés sont en contact avec leur environnement, un environnement qu'ils ne comprennent pas et qu'ils craignent. Et ils voient que leur survie dépend de la nature, comme la pluie, le soleil, les saisons...Et ils contemplent ces élements comme des "dieux". Dieux qu'ils devont plaire pour n'avoir pas des catastrophes, pour avoir une chasse réussie, une récolte opulente...et là au bout du temps on avait des "shaman", qui pretendent d'avoir une relation avec les "dieux" ou peuvent interpréter les désirs des "dieux"...
Et là j'ai des difficultés: Est-ce que le "chef" émergant ètait un gerrier qui d'abord assurait la sécurité et ça en collaboration avec le "prêtre" ou est-ce que dès le début les deux fonctions sont mixtes? J'ai aussi lu d'une sorte de démocracie primitive où la "réunion des ainés" avait la parole décisive...
....
Une dernière remarque:
Je suis séduis par la theorie dans le livre que j'ai justement mentioné, où l'auteur pointe vers le lien supposé pour la Mésopotamie et l'Egypte entre la religion et l'environnement, la nature.
Pour la Mésopotamie avec sa nature imprévisible une réligion de peur ou rien n'était stable où les rois, comme intermediaire avec les dieux, n'étaient jamais sûr de ce qui va-t-arriver. Et l'Egypte où les crues du Nil étaient presque constantes avec les saisons, d'où une réligion stable avec un encadrement fixe avec même déification du monarch...


il me semble qu'au contraire c'est la stabilité économique qui fait apparaitre ces civilisations des rois et des dieux. Il faut qu'il y ait croissance et concentrations des populations autour d'une sorte de miracle économique : en Egypte et Mesopotamie un fleuve avec des crues régulière, en amérique la production maitrisée du maïs. Le miracle économique attire les population aux alentours et les aggrège par acculturation. Le détenteur du pouvoir économique à l'instant de l'aggrégation devient le roi et le dieux ensuite.
C'est ça ou c'est trop marxiste comme vision :mrgreen:

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Lietz her heidine man. Obar seo lidan.
Thiot urancono. Manon sundiono.
(Il permit que les païens traversassent la mer, Pour rappeler aux Francs leurs péchés)


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Message Publié : 05 Avr 2016 22:23 
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Philippe de Commines
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Excuses cher Almayrac, mais pas eu le temps de rédiger une réponse élaborée par manque de temps.
Et même maintenant déja assez tard sur le péninsule européen...
Déja deux jours que je cherche sur le web concernant les conditions qui rendent possible la naissance d'une civilisation...
Si vous comprenez l'anglais cet article est peut-êter un résumé:
http://history-world.org/civilization,% ... s%20of.htm

Et vous pouvez avoir raison avec votre résumé:
"il me semble qu'au contraire c'est la stabilité économique qui fait apparaitre ces civilisations des rois et des dieux. Il faut qu'il y ait croissance et concentrations des populations autour d'une sorte de miracle économique : en Egypte et Mesopotamie un fleuve avec des crues régulière, en amérique la production maitrisée du maïs. Le miracle économique attire les population aux alentours et les aggrège par acculturation. Le détenteur du pouvoir économique à l'instant de l'aggrégation devient le roi et le dieux ensuite."

Mais de tout ce que j'ai lu maintenant "les dieux" étaient déja présent avant la civilisation structurée, déja dans les petites groupes nomades...et peut-être une sorte de "prêtres intermédiaires" aussi? Ce n'est qu'avec les plus grandes entités difersifiées, qui necessitent une plus grande organisation que le rôle d'un "monarch" est apparu. "roi" qui maintes fois cumule les deux fonctions, celle de gardien des lois et celle d'intermediaire avec les "dieux"?

Mais quand j'aurais temps je retourne demain sur votre question d'une manière plus supportée...

Cordialement, Paul.


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Message Publié : 08 Avr 2016 14:01 
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Pour éclairer ce débat, il y a la thèse de Jean Cauvin qu'il a exposé dans le livre : "Naissance des divinités, naissance de l'agriculture". Je sais, ce livre date de 1997, ce qui n'est pas tout jeune. Mais, cette thèse rejoint certaines des constatations faites sur le site de Gobeli Tepe.

Le postulat serait que les chasseurs-cueilleurs suivaient plutôt une religion chamanique basée sur des esprits. Il y a toutefois des signes d'un culte de la déesse-mère à travers de très nombreuses figurines appelées des "Vénus". Mais, certains préhistoriens prétendent que ces statuettes seraient surtout représentatives du désir sexuel de ces peuples. Avant le passage à l'agriculture, donc quelques millénaires avant la naissance des civilisations et de l'Antiquité, on note chez certaines civilisation la naissance de divinités. Divinités qui incarnent un rapport différent vis à vis de la nature et du monde. Dans certaines zones du futur Croissant fertile se met en place un culte d'un Dieu-Taureau fils de la déesse-mère et subordonné à elle. A Gobeli-Tepe, on note une évolution où certains totem animaux semblent devenir des dieux à part entière.

La différence ? L'Esprit est partout. Dans chaque animal réside une partie de de son espèce. Le dieu aspire en quelque sorte l'esprit de tous les animaux concernés et s'incarne dans ses représentations créés par les hommes. La représentation que les hommes font du dieu tend à devenir le dieu. L'esprit des renards était présent dans chaque renard et il fallait en tenir compte quand on voulait abattre des renards pour leur peau. Un dieu va s'occuper de la faune sauvage et il se charge de veiller à la bonne vie des renards et autres animaux. On fait des offrandes à ce dieu pour qu'il fasse prospérer les renards et que la chasse soit bonne. Donc, l'homme change sa place dans la nature. Avant la naissance des divinités, il se considérait comme faisant partie de la nature. Quand il invente les divinités, il devient celui qui exploite les ressources naturelles ou agricoles et les dieux veillent à ce que les récoltes ou les prélèvements soient bons si on leur rend le culte adéquat.

En fait, si on s'en tient à la thèse de Jacques Cauvin, c'est l'invention des dieux qui permet le changement de statut des hommes et le passage à l'agriculture. Dans le même temps, le sorcier va devenir un prêtre. Mais, il faudra plusieurs millénaires pour que le chef des prêtres devienne roi ou empereur. Quoique dans la plupart des cas, ce soit le chef des guerriers qui va s'imposer en tant que prêtre-suprême et interlocuteur principal entre son peuple et les dieux.

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Message Publié : 09 Avr 2016 22:26 
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Philippe de Commines
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Merci Narduccio pour aborder de nouveau le thème. Par hasard je voulais répondre à Almayrac ce soir avec un résumé de ce que j'ai trouvé de nouveau autour de la question et qui pointe dans une certaine direction.
Dans mon sens vous n'avez que partiellement raison, mais c'est trop tard ce soir pour commencer avec un commentaire élaboré. Excuses pour ça...
En remerciant de nouveau pour votre apport sur le sujet, cordialement, Paul.


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Message Publié : 10 Avr 2016 22:29 
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Philippe de Commines
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Narduccio,

"Le postulat serait que les chasseurs-cueilleurs suivaient plutôt une religion chamanique basée sur des esprits. Il y a toutefois des signes d'un culte de la déesse-mère à travers de très nombreuses figurines appelées des "Vénus". Mais, certains préhistoriens prétendent que ces statuettes seraient surtout représentatives du désir sexuel de ces peuples. Avant le passage à l'agriculture, donc quelques millénaires avant la naissance des civilisations et de l'Antiquité, on note chez certaines civilisation la naissance de divinités. Divinités qui incarnent un rapport différent vis à vis de la nature et du monde. Dans certaines zones du futur Croissant fertile se met en place un culte d'un Dieu-Taureau fils de la déesse-mère et subordonné à elle. A Gobeli-Tepe, on note une évolution où certains totem animaux semblent devenir des dieux à part entière"

Jai parcouru de nouveau les liens concernant la préhistoire et je soulligne que je n'ai retenu que des textes sérieux en controllant les sources et les auteurs...
Chez les chasseurs-cueilleurs on avait déja un certain culte des morts...dans les grottes des figures d'une sorte de rituelle d'abattre des animaux...une figure d'un sorcier, shaman engagé dans le domaine sacré...
Parce qu'on a pas des sources écrites on n'a que l'archéologie pour discerner l'état d'esprit de l'homme préhistorique et ça ne donne que des estimations...

Mais à un certain stade, peut-être avec la sédentarisation toutes ces choses de environnement, que l'homme primitif observe comme guidant sa vie, comme l'alternance de jour et nuit, le soleil, qui semble être nourissante pendant le printemps et aussi déstructrice pendant l'été, le vent qui peut provoquer des orages, le feu, le tonnerre, l'eau qui donne la vie aux plantes et aux animaux...et l'homme commence a donner à tous ces élements des pouvoirs de dieux...et peut-être un lien avec la culte des animaux d'antan avec la personification des dieux par des animaux mythiques...?
Mais on avait aussi déja des "déifications" plus générales comme le mariage de "la terre-mêre" avec "le ciel-mâle"...? "le Ciel" chinois, qui semble être l'hégémonie unique...? Aussi dans les croyances indiens...un pouvoir unique dominant le reste...?
J'ai lu par exemple pour la Chine l'article suivant:
http://www.jstor.org/stable/3269343?seq ... b_contents
Pour l'Inde:
https://ithihas.wordpress.com/2013/11/1 ... ent-india/
La Mésopotamie et l'Egypte sont déja discuté dans les liens dans les premiers messages de ce fil.

"En fait, si on s'en tient à la thèse de Jacques Cauvin, c'est l'invention des dieux qui permet le changement de statut des hommes et le passage à l'agriculture. Dans le même temps, le sorcier va devenir un prêtre. Mais, il faudra plusieurs millénaires pour que le chef des prêtres devienne roi ou empereur. Quoique dans la plupart des cas, ce soit le chef des guerriers qui va s'imposer en tant que prêtre-suprême et interlocuteur principal entre son peuple et les dieux."

Mon interprétation de ce que j'ai lu jusqu'à maintenant est plutôt que la sédentarisation et l'agriculture ont provoqués la naissance de "dieux". Avec la sédentarisation on avait une plus grande différenciation des tâches et un surplus de vivres et plus de temps à se consacrer à des liens avec les "dieux"...et ces grandes civilisations deviennent possibles par un environnement favorables à cet entreprises (je me souviens un fil de vous, ici dans le même rubrique concernant "la nature responsable pour la civilisation), voir l'exemple de l' Egypte, la Mésopotamie, la Chine, l' Inde...

Et l'émergence des "rois" était d'abord lié au "dieu" local du "city-state" où je ne sais pas comment le "roi" par ses compétences guèrrières?, par le consentement des "vieux"?, par son érudité? était élu comme "roi", un "roi" qui pour le peuple est intermédiaire avec les "dieux" ou même comme le cas en Egypte le Pharao, dieu lui-même...
Et ces "rois" locaux obtiennent par des guerres ou des coalitions un pouvoir plus étendu et ce pouvoir est aussi confirmé par l'absorbtion des "dieux des "villes" rendus sous la dominance du "dieu" central du royaume dominant...

Cordialement, Paul.


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Message Publié : 10 Avr 2016 22:46 
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Jules Michelet
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Narduccio a écrit :
En fait, si on s'en tient à la thèse de Jacques Cauvin, c'est l'invention des dieux qui permet le changement de statut des hommes et le passage à l'agriculture. Dans le même temps, le sorcier va devenir un prêtre. Mais, il faudra plusieurs millénaires pour que le chef des prêtres devienne roi ou empereur. Quoique dans la plupart des cas, ce soit le chef des guerriers qui va s'imposer en tant que prêtre-suprême et interlocuteur principal entre son peuple et les dieux.


En fait il est assez logique de chercher à rapprocher évolutions politico-sociales et évolutions religieuses, comme cela a été expliqué plus haut il y a sans doute un effort des gouvernants pour tenter d'assoir leur légitimité par une idéologie cohérente, en même temps qu'il y a toujours une recomposition de la religion en fonction des évolutions sociales, et on voit mal comment le passage d'une société essentiellement nomade à une société de plus en plus sédentaire et d'une économie non agricole à une société agricole, avec le début d'une forme de maîtrise de la nature (domestication des plantes et des animaux) n'aurait pas impacté la religion. D'ailleurs la découverte de Göbekli Tepe a mis en valeur l'intuition de Cauvin de façon spectaculaire, et inattendue. Après il est sans doute complexe de dire si l'évolution mentale/religieuse précède les transformations sociales ou l'inverse, souvent on observe des influences respectives (c'est le principe de la poule et de l’œuf). Mais n'empêche j'ai toujours pensé que la religion suivait avant tout les évolutions sociales plus qu'elle était une force de changement social, notamment parce qu'elle est plurielle : en général aux époques historiques il y a des penseurs proposent des solutions, les chefs vainqueurs en disposent suivant leurs besoins et leurs inclinations, leurs concurrents choisissent d'autres solutions par conviction et/ou opportunisme, etc.

Quant à l'idée d'un "roi-prêtre", il me semble que désormais elle n'a plus trop cours. En fait pour autant que l'on sache, aux débuts de l'époque "historique" on est en présence systématiquement de monarchies, il n'y a pas d'autres formes de gouvernement attestée ... mais il est vrai qu'il n'y a que trois cas de figure dont la forme de gouvernement est documentée : l’Égypte, la Mésopotamie et la Chine. La fonction royale a certes une fonction religieuse, elle place le souverain au-dessus des autres hommes, au contact direct des divinités, parfois on l'assimile à une divinité (en Égypte, un peu aussi en Mésopotamie), mais sans jamais en faire à proprement parler l'égal d'un dieu, c'est surtout une manière de bien souligner qu'il est plus qu'un homme (de la même manière en Chine les rois Shang et Zhou sont présentés comme des descendants de divinités) ; le roi a une fonction sacerdotale, mais il n'est jamais non plus un véritable spécialiste du culte comme le sont les membres du clergé, il se contente d'y jouer un rôle déterminé par d'autres et conduit au mieux des rituels d'offrande mais pas de divination, purification, exorcisme, etc. Sa fonction, garante de la stabilité des relations entre monde divin et monde humain, le soumet à des contraintes et l'expose à des menaces qui font qu'il doit accomplir de nombreux rituels, organiser le culte, présider les grandes fêtes collectives. Mais il n'y a pas de "roi-prêtre" comme on a pu l'entendre par le passé.

PaulRyckier a écrit :
Mon interprétation de ce que j'ai lu jusqu'à maintenant est plutôt que la sédentarisation et l'agriculture ont provoqués la naissance de "dieux". Avec la sédentarisation on avait une plus grande différenciation des tâches et un surplus de vivres et plus de temps à se consacrer à des liens avec les "dieux"...et ces grandes civilisations deviennent possibles par un environnement favorables à cet entreprises (je me souviens un fil de vous, ici dans le même rubrique concernant "la nature responsable pour la civilisation), voir l'exemple de l' Egypte, la Mésopotamie, la Chine, l' Inde..

Et l'émergence des "rois" était d'abord lié au "dieu" local du "city-state" où je ne sais pas comment le "roi" par ses compétences guèrrières?, par le consentement des "vieux"?, par son érudité? était élu comme "roi", un "roi" qui pour le peuple est intermédiaire avec les "dieux" ou même comme le cas en Egypte le Pharao, dieu lui-même...
Et ces "rois" locaux obtiennent par des guerres ou des coalitions un pouvoir plus étendu et ce pouvoir est aussi confirmé par l'absorbtion des "dieux des "villes" rendus sous la dominance du "dieu" central du royaume dominant...


En fait on fait un peu ce qu'on veut du monde divin. Dans le monde sédentaire il devait y avoir plutôt une religion liée aux forces de la nature animale, après on s'intéresse plus aux forces végétales, tout en ayant toujours un intérêt supérieur pour les forces cosmiques, célestes (le Soleil, la Lune, les autres astres, le Tonnerre). La religion antique a toujours un aspect panthéiste : il y a des dieux partout et pour tout, c'est très prononcé notamment en Chine. Les pouvoirs politiques valorisent ensuite certaines divinités qui sont en général conçues comme leur pendant divin, pour légitimer leur rôle, le rendre cohérent. Cela concerne certes les divinités dynastiques, souvent celles de la ville d'origine du pouvoir royal (mais pas toujours : le grand dieu mésopotamien Enlil était originaire de Nippur qui n'a jamais été la capitale d'un grand royaume), mais aussi les divinités locales des territoires conquis, c'est une manière de les "capter". En dépit d'un arrière-plan naturaliste (cycle des saisons, fertilité, catastrophes naturelles), la mythologie de ces civilisations est toujours repensée et composée suivant un programme politique assez évident qui montre bien ce phénomène. Et le fait que les programmes soient souvent différents montre bien qu'il y avait des débats et des luttes d'écoles religieuses (plutôt des luttes entre lieux de culte majeurs, c'est assez clair en Égypte et un peu aussi à Sumer), charge aux rois d'arbitrer.


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