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Message Publié : 18 Avr 2016 17:38 
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Marc Bloch
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Localisation : Versailles
L'un de mes meilleurs amis vient d'écrire un petit texte sur la mort du roi soleil. Il n'est pas historien mais agrégé de philo. Je ne suis ni l'un ni l'autre et ne partage pas son pessimisme foncier sur notre temps. Mais je me dis que l'agora d'un forum historique peut être le bon endroit pour réfléchir à la place de la mort, de la médecine et de la culture dans une société, hier et aujourd'hui !

Voilà donc ce texte

"J’ai lu l’autre jour le récit, par ses deux valets, de l’agonie de Louis XIV. On mesure à lire ce texte la nature exacte de ce qui distingue notre époque de celle du Roi-Soleil. En peu de mots : la différence essentielle est que nous sommes devenus des barbares, mais que nous sommes bien soignés. Notre époque est comme un hôpital ultramoderne, peuplé d’hommes de Cro-Magnon, au milieu des ruines de la culture.

A la lecture, l’homme moderne occidental, qui a encore une petite idée de ce qu’était la civilisation, est nécessairement agité de sentiments contradictoires : d’un côté, il se réjouit de vivre à notre époque, où une boîte d’antibiotiques suffirait à soigner le mal du roi ; de l’autre, il est confondu par la supériorité écrasante et générale du XVIIème siècle : élévation des sentiments, piété, délicatesse de l’expression, hauteur de vue, beauté de la langue ; il faut imaginer aussi la splendeur des lieux où se déroule cette agonie poignante.

A-t-on idée de spectacle plus grandiose qu’un coucher de soleil sur les façades mordorées du château de Versailles ? Tout se passe comme si la somme immense d’intelligence et de sensibilité qui avait été investie dans l’Art et la Pensée, les mœurs et la conversation humaines, la spiritualité et l’agrément des manières s’était trouvée aspirée par la Modernité et projetée dans le développement de la seule technique. Nous nous retrouvons donc capables de vivre beaucoup plus longtemps, mais dans un monde qui n’offre plus rien qui vaille vraiment de vivre. Car entretemps, la civilisation proprement humaine a disparu."


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Message Publié : 18 Avr 2016 19:45 
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Tout cela est bel et bon, mais combien de Français bénéficiaient-ils du niveau culturel et de la hauteur de vue que l'on prête ici à la cour de Versailles ?

C'est aussi une époque d'une misère et d'une ignorance sans nom pour une grande part de la population. A-t-on vraiment perdu en humanité ? En solidarité ? En connaissances partagées ? En liberté de penser ?

Bref, je trouve que l'auteur de ce texte se noie dans le " c'était mieux avant. "

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Les raisonnables ont duré, les passionnés ont vécu. (Chamfort)


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Message Publié : 18 Avr 2016 19:50 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 18 Avr 2015 15:58
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Localisation : Kaamelott
Jerôme a écrit :
L'un de mes meilleurs amis vient d'écrire un petit texte sur la mort du roi soleil. Voilà donc ce texte

Réflechir sur la mort, la médecine et la culture, l'agonie de Louis XIV est peut-être un peu juste. Pour de plus y réfléchir via la philosophie il existe des textes -pour la mort- de Platon, Epicure, Sénèque, Confucius, Pascal, Camus...
Ce que vous présentez est dans un style narratif et les raccourcis un peu étonnants.
Citer :
la différence essentielle est que nous sommes devenus des barbares, mais que nous sommes bien soignés. Notre époque est comme un hôpital ultramoderne, peuplé d’hommes de Cro-Magnon, au milieu des ruines de la culture.

Rien de philosophique, un avis discutable tout au plus et un style ampoulé.
Pour les "sentiments contradictoires qui agitent l'homme" : rien de nouveau mais une évidence.
Citer :
où une boîte d’antibiotiques suffirait à soigner le mal du roi ; de l’autre, il est confondu par la supériorité écrasante et générale du XVIIème siècle : élévation des sentiments, piété, délicatesse de l’expression, hauteur de vue, beauté de la langue ;

"IL" fait une sorte de comparaison entre des antibiotiques et les sentiments élevés, la piété etc.
Je ne vois nulle philosophie. Louis XV aussi a eu un décès qui aurait pu être évité de nos jours comme bcp de souverains et dans ces moments j'ai comme un doute sur la beauté de la langue. Pour l'élévation, il est un peu temps car il va y avoir des comptes à rendre voici tout ce qui fait la différence.
Citer :
il faut imaginer aussi la splendeur des lieux où se déroule cette agonie poignante.
A-t-on idée de spectacle plus grandiose qu’un coucher de soleil sur les façades mordorées du château de Versailles ?

Je ne pense pas que ceci ait effleuré le moribond, pas plus que les courtisans présents un peu gêné par l'odeur. Tant qu'à trouver un chouette coin, perso Versailles n'aurait pas emporté la timbale, château mort à ce moment (une semaine d'agonie, tout le monde ou presque avait fichu le camp). Pour le mordoré du crépuscule, on repassera : le roi est DCD au matin vers les 8 heures passées ; ça la fiche un peu mal. Reste un sentiment de déjà lu.
Citer :
Tout se passe comme si la somme immense d’intelligence et de sensibilité qui avait été investie dans l’Art et la Pensée, les mœurs et la conversation humaines, la spiritualité et l’agrément des manières...

Rien de plus commun que la mort ; pour le reste le monde n'a pas attendu le décès de Louis XIV pour penser, pour se transcender dans les arts et le savoir vivre comme le savoir causer n'est pas né au XIIème.
Citer :
mais dans un monde qui n’offre plus rien qui vaille vraiment de vivre. Car entretemps, la civilisation proprement humaine a disparu."

Le fameux "c'était mieux avant" a déjà été optimisé par un journaliste dans un bouquin... Dommage que la civilisation ait disparu, je ne m'en étais pas rendu compte. C'était donc ça...
Il est vrai qu'avant il faisait bon vivre comme des manants, voire ses enfants passer, avoir peu de pitance, être taxés jusqu'à la moëlle, entravés comme des animaux, ignorants du mot "liberté" sans compter avec "solidarité".
Lors des chasses, voir ses champs dévastés, lors des conflits (ce que fut pour ainsi dire tout le règne de Louis XIV) un grand plaisir de voir des régions comme l'Alsace, la Lorraine et autres où il fallu plus d'un demi-siècle pour pouvoir replanter et récolter. Heureux temps que celui des dragonnades, celui où nos penseurs huguenots trouvèrent asile ailleurs, les joyeuses famines avec à Versailles une cour de parasites entretenus par le peuple.
Agréable lecture car j'en déduis comme Monsieur Jourdain avec sa prose, que j'ai été philosophe agrégé toute ma vie et ceci sans le savoir. Maintenant ceci m'a-t-il appris quelque chose que j'ignorais (c'est mon "truc", apprendre...) ?
La réponse est hors les balises temporelles du Forum.

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"L'histoire remplit le vide du présent et se transforme elle-même en espérance !"


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Message Publié : 18 Avr 2016 19:56 
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Jean Froissart
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Inscription : 25 Juil 2007 21:37
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Jerôme a écrit :
L'un de mes meilleurs amis vient d'écrire un petit texte sur la mort du roi soleil. Il n'est pas historien mais agrégé de philo. Je ne suis ni l'un ni l'autre et ne partage pas son pessimisme foncier sur notre temps. Mais je me dis que l'agora d'un forum historique peut être le bon endroit pour réfléchir à la place de la mort, de la médecine et de la culture dans une société, hier et aujourd'hui !

Voilà donc ce texte

"J’ai lu l’autre jour le récit, par ses deux valets, de l’agonie de Louis XIV. On mesure à lire ce texte la nature exacte de ce qui distingue notre époque de celle du Roi-Soleil. En peu de mots : la différence essentielle est que nous sommes devenus des barbares, mais que nous sommes bien soignés. Notre époque est comme un hôpital ultramoderne, peuplé d’hommes de Cro-Magnon, au milieu des ruines de la culture.

A la lecture, l’homme moderne occidental, qui a encore une petite idée de ce qu’était la civilisation, est nécessairement agité de sentiments contradictoires : d’un côté, il se réjouit de vivre à notre époque, où une boîte d’antibiotiques suffirait à soigner le mal du roi ; de l’autre, il est confondu par la supériorité écrasante et générale du XVIIème siècle : élévation des sentiments, piété, délicatesse de l’expression, hauteur de vue, beauté de la langue ; il faut imaginer aussi la splendeur des lieux où se déroule cette agonie poignante.

A-t-on idée de spectacle plus grandiose qu’un coucher de soleil sur les façades mordorées du château de Versailles ? Tout se passe comme si la somme immense d’intelligence et de sensibilité qui avait été investie dans l’Art et la Pensée, les mœurs et la conversation humaines, la spiritualité et l’agrément des manières s’était trouvée aspirée par la Modernité et projetée dans le développement de la seule technique. Nous nous retrouvons donc capables de vivre beaucoup plus longtemps, mais dans un monde qui n’offre plus rien qui vaille vraiment de vivre. Car entretemps, la civilisation proprement humaine a disparu."
C'est joliment écrit ; mais effectivement on est plus proche de la Philosophie que de l'Histoire.
Un point de vue est exprimé, que je trouve respectable (et je "comprends" le ressenti etc.) mais que j'estime assez primaire et plein de préjugés.

Ca, c'est vraiment du domaine du cliché (sauf s'il est question de Palmyre...):

Notre époque est comme un hôpital ultramoderne, peuplé d’hommes de Cro-Magnon, au milieu des ruines de la culture.

Déjà, qui peut définir ce qu'est, et surtout, ce que doit être la Culture ?
Lorsqu'on se penche sur les pensées inhérentes à l'Antiquité on trouvera ce même genre de propos, à savoir que la société dans laquelle on vit est en déliquescence, que l'on doit subir une période de décadence, que la Culture n'existe (quasiment) plus etc. et EVIDEMMENT que c'était mieux avant.

Pour prendre un exemple, toutes les musiques nouvelles apparues depuis un siècle ont été décriées, et je vais citer quelques exemples : Stravinsky s'est fait massacrer en présentant "Le Sacre du Printemps", le Jazz à ses débuts était considéré comme une "musique de nègres", immorale, uniquement jouée dans les bars malfamés, idem pour le Blues, le Rock'n'Roll fut désigné par certains comme étant la "musique du Diable" etc etc.
Qui oserait actuellement douter de la grande richesse d'une musique comme le Jazz ?

Le XXème siècle a été une période extrêmement créatrice sur le plan artistique : il suffit de se pencher sur le début du siècle et de se renseigner sur ces mouvements novateurs que furent le Cubisme, l'Expressionnisme, Dada, le Surréalisme et d'une manière générale l'Art Moderne/Contemporain. Mais comment peut-on nier cette effervescence ?

Pour en revenir à la phrase/pensée citée plus haut, si on en était resté aux "hommes de Cro-Magnon"

Image

on en serait resté là. (surnommé d'ailleurs le « Versailles de la Préhistoire » :mrgreen:).

Je termine en disant que la "Culture" est particulièrement vivifiante actuellement ; j'ai vu ces derniers mois l'artiste Techno/Electro Jeff Mills créer une oeuvre en s'inspirant de l'art antique égyptien

http://www.lm-magazine.com/blog/2015/02/03/jeff-mills/

et de "Planets" de Gustav Holst

https://www.youtube.com/v/nd1PzRDiQS8

et c'est un exemple parmi tant d'autres.

PS : Je viens de voir la réponse de Pierma. Je pense exactement la même chose, donc rien à rajouter.

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Message Publié : 18 Avr 2016 20:16 
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Jean Froissart
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Inscription : 25 Juil 2007 21:37
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ezio-auditore a écrit :
Citer :
il faut imaginer aussi la splendeur des lieux où se déroule cette agonie poignante.
A-t-on idée de spectacle plus grandiose qu’un coucher de soleil sur les façades mordorées du château de Versailles ?

Je ne pense pas que ceci ait effleuré le moribond, pas plus que les courtisans présents un peu gêné par l'odeur. Tant qu'à trouver un chouette coin, perso Versailles n'aurait pas emporté la timbale, château mort à ce moment (une semaine d'agonie, tout le monde ou presque avait fichu le camp). Pour le mordoré du crépuscule, on repassera : le roi est DCD au matin vers les 8 heures passées ; ça la fiche un peu mal. Reste un sentiment de déjà lu.
Wouuaaahhhh, rien de tel pour désacraliser... lol lol lol

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Message Publié : 18 Avr 2016 22:23 
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Grégoire de Tours
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Localisation : Kaamelott
Et la "beauté de la langue" ? Sans trop m'avancer, la langue doit être drôlement chargée avec une semaine d'agonie. :mrgreen:
Quant à "l'élévation", certains doivent se dire qu'il est ample temps, ffff..... 7 jours dans cette pestilence.... :mrgreen:

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Message Publié : 18 Avr 2016 22:48 
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Inscription : 25 Juil 2007 21:37
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ezio-auditore a écrit :
Et la "beauté de la langue" ? Sans trop m'avancer, la langue doit être drôlement chargée avec une semaine d'agonie. :mrgreen:
Quant à "l'élévation", certains doivent se dire qu'il est ample temps, ffff..... 7 jours dans cette pestilence.... :mrgreen:
Sérieux... Vous m'avez vraiment fait marrer... Ce qui n'est pas fréquent sur ce forum :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen:.

En sus, on peut rajouter que Louis le quatorzième n'avait plus de dents ni de cheveux...

Image
"Massacre à la Tronçonneuse"

Ca casse le mythe.

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Message Publié : 19 Avr 2016 15:53 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 18 Avr 2015 15:58
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Localisation : Kaamelott
Robert Spierre a écrit :
En sus, on peut rajouter que Louis le quatorzième n'avait plus de dents ni de cheveux...

Oh, le mythe était miteux. Pendant longtemps, il consommait deux fois son consommé : une fente palatine pas fermée faisait qu'une partie de ce qu'il avait en bouche ressortait par le nez... On réussit toutefois à opérer, ce qui est du luxe pour l'époque car même de nos jours, une fente palatine nécessite plusieurs interventions.
A 20 ans, en effet, il perdit ses cheveux suite à une fièvre d'où le budget bigoudi effarant pour ses perruques.
En ceci, il est imité par un journaliste spécialiste des familles à particules et des clés de WC planqués.
Quant aux dents, je l'ignorais...
Ah ! Que de bonheur et quel artisanat de partager la couche d'un tel roi... 8-|

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Message Publié : 19 Avr 2016 19:23 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 12 Nov 2009 21:20
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c'est un peu le propre de la littérature de décrire dans un style très élevé des réalités qui peuvent être tristes, douloureuses voire dégoûtante

nous vivons une époque scientifique que préfère la précision technique - pas une épqoue littéraire

et une époque émotive qui exprime les émotions par des formules expressives loin de la rigueur classique

tout change


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Message Publié : 19 Avr 2016 22:50 
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Jean Froissart
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Inscription : 25 Juil 2007 21:37
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marc30 a écrit :
c'est un peu le propre de la littérature de décrire dans un style très élevé des réalités qui peuvent être tristes, douloureuses voire dégoûtante

nous vivons une époque scientifique que préfère la précision technique - pas une épqoue littéraire

et une époque émotive qui exprime les émotions par des formules expressives loin de la rigueur classique

tout change
Ca veut dire quoi "une époque émotive" ?

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Message Publié : 20 Avr 2016 20:22 
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Pierre de L'Estoile
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Inscription : 27 Déc 2013 0:09
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On dit que le niveau baisse, que les élèves entrent illettrés en sixième, que le baccalauréat est donné à tous et ne vaut plus rien. A en juger par ce qu’il nous est proposé de commenter, ce triste constat s’étend à l’agrégation de philosophie.

Je souscris pleinement aux propos d’ezio-auditore, de Pierma et de Robert Spierre, mais suis plus réservé sur :
Citer :
nous vivons une époque scientifique que préfère la précision technique - pas une époque littéraire

Je préfèrerais une formule de Philippe Meyer : Nous vivons une époque moderne.

« De la relativité de la modernité. » Vous avez sept heures (durée de l’épreuve de composition écrite sans programme de l’agrégation de philosophie à l’Université Paris-Sorbonne)

Pas scientifique le Grand Siècle qui a donné Descartes, Pascal, Fermat, Mersenne, Papin ?

Scientifique notre époque alors que naguère une grande chaîne de radio terminait ses bulletins d’information par l’horoscope de Mme Soleil et qu’il est de bon ton dans les dîners en ville d’afficher sa nullité en maths ?

Pas littéraire notre époque alors que Bernard Pivot est une de nos grandes vedettes ?

Quand à la rigueur classique, oui si l’on est très sélectif et qu’on se borne aux tragédies de Racine. Mais il y a aussi le reste qu’on ignore ou qu’on ne sait plus voir. Molière n’a pas écrit que le Philanthrope. Avec le Médecin Volant et autres farces de même acabit, il servait à ses contemporains de la grosse rigolade comme nous en donnent nos Coluche ou Bedos. Dans deux siècles, ces derniers feront l’objet du respect compassé qu’on doit aux classiques. Dans le genre olé olé, il y a certaines œuvres de La Fontaine qu’on n’oserait pas faire lire aux collégiens. Enfin, à côté de la perfection policée d’une Mme de La Fayette, il y a l’exubérante extravagance d’un Courtilz de Sandras dont Alexandre Dumas s’est inspiré. En fait, tous les styles sont de toutes les époques.

Elévation des sentiments ? Il y a des saints et des canailles à toutes les époques. Lisons Saint-Simon. Nous y découvrirons toutes les petitesses de la cour de Louis le Grand, à commencer par celles de Louis.

Piété ? Louis XIV est mort pieusement. Sœur Emmanuelle au moins autant. A l’inverse, Mazarin parcourant une dernière fois sa collection d’oeuvres d’art, se désolant, tout cardinal qu’il fût, d’avoir à abandonner tout cela n’a pas manifesté une grande piété. On allait à la messe plus qu’aujourd’hui, c’est sûr. Mais était-on plus pieux ? Pourquoi allait-on à la messe ? Pour toutes sortes de raisons. C'était préférable si l'on ne voulait pas être regardé de travers, voire même encourir une sanction pénale. On y échangeait des billets doux. On bavardait. Certains dormaient. On s'y distrayait aussi. Les chants, les grandes orgues, les vêtements sacerdotaux richement ornés, les sermons d'un Bourdaloue magnifiquement rédigés et déclamés qu'on commentait ensuite dans les salons entre deux potins de la Cour, toute cette pompe, c'était du grand spectacle et du meilleur.

Sommes-nous bien certain que la mort de Louis XIV fut exactement ce que nous en ont laissé les témoins oculaires ? N'ont-ils pas retouché un peu le tableau ? Cela me rappelle le passage de je ne sais plus quelle oeuvre, peut-être un roman de Marcel Aymé. On relate une mort édifiante. Mais un proche du défunt précise en confidence (je cite de mémoire) : "En fait, il n'a pas dit cela. Il a dit : Si seulement je pouvais pisser !"

Délicatesse de l’expression ? Les lettres de Mme de Sévigné ont du style. C’est pour cela qu’on les a conservées. Elles n’étaient d’ailleurs pas destinées qu’à Mme de Grignan. Elles étaient aussi écrites pour être lues dans les salons. On aurait tort d’imaginer que tous ceux qui s’écrivaient déployaient un même talent. On n’a conservé que le meilleur. Quant aux échanges verbaux, l’histoire a retenu la délicate réaction de Monsieur faisant connaissance avec la Princesse Palatine : " Quoi ! Je vais devoir coucher avec ça ? "

Hauteur de vue ? Beauté de la langue ? C’est comme le style et les sentiments. Il y a du meilleur et du pire à toutes les époques.

coucher de soleil sur les façades mordorées du château de Versailles. Le lever de soleil sur lequel se dessinent les lignes pures du viaduc de Millaud, c’est très beau aussi. Mais le commun des mortels n’habitait pas Versailles. Les bas-fonds de Paris étaient moins majestueux. Pour s’en faire une idée, il faut lire Les mystères de Paris d’Eugène Sue. C’est très bien décrit de sorte qu’avec un peu d’imagination, on ressent même les odeurs. Eugène Sue est du dix-neuvième siècle. Ne nous leurrons pas. Au dix-septième c’était pire.

Finissons par la civilisation et la barbarie. Ce sont des concepts difficiles à cerner. Je propose un critère simple : la fréquence des crimes de sang. On sait que depuis Louis XIV jusqu’à nos jours aujourd’hui elle n’a cessé de baisser.


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