Faget a écrit :
Si j'ai bien compris, le FHO tenait le rôle du 2°Bureau français qui était un organisme de statistique qui dressait l'ordre de bataille allemand, les possibilités de transports et le calendrier de mobilisation, etc...Mais le recueil était le rôle du SR d'avant 1939. On fait abusivement l'amalgame entre le 2°Bureau, au travail bureaucratique d'analyse et le SR utilisant les pratiques clandestines pour recueillir les informations non ouvertes. Donc, je fais l'hypothèse que l'Abwehr était le service de recherche. Je peux me tromper et je suis preneur de toutes informations mieux fondées.
C'est également ce que j'en ai compris sauf que le FHO n'est qu'une branche du renseignement militaire, il existe aussi un FHW (Fremde Heeres West) pour les armées occidentales.
Je ne sais pas si les renseignements fournis par l'Abwehr ou toute autre officine du renseignement (les SS avaient aussi leurs propres organes dans le cadre du RSHA) sont seuls en cause pour "Barbarossa", ou si c'est l'exploitation du renseignement par le FHO qui est fautive. En l'occurrence, s'ils ont eu une vision claire en décembre 1940, et que celle-ci ne l'était plus en juin 1941, encore moins entre juillet et décembre, j'ai plutôt tendance à croire que c'est l'exploitation du renseignement qui a été mauvaise. Le FHO (et l'OKH...) s'est auto-intoxiqué en pensant impossible que l'Armée rouge puisse renaître à chaque fois des cendres de ses armées détruites dans les poches de Minsk-Bialystok, de Smolensk, d'Ouman, de Kiev, de Viazma-Briansk, de la Mer d'Azov, etc, etc. Et l'OKH, et Hitler, lui ont complaisamment emboîté le pas - ce qui explique notamment l'enthousiasme suscité par la colossale victoire de Viazma-Briansk dans la première quinzaine d'octobre 1941, censée être l'ultime coup porté à la puissance soviétique ; et l'optimisme déconnecté qui fait adopter des décisions qui avec le recul s'avéreront suicidaires, par exemple à la conférence d'Orcha le 13 novembre 1941, malgré la Rasputitsa et le raidissement de la résistance soviétique. Le concept de "Siegseuphoria" est particulièrement important pour comprendre l'état d'esprit d'un Halder ou d'un Bock à ce moment-là, associé avec la volonté forcenée de se battre "jusqu'au dernier bataillon" pour éviter de rééditer l'échec de la Marne en 1914.
En revanche, il est clair pour moi que les levées fantastiques (onze millions entre avril et juillet 1941 !) réalisées par l'Armée rouge dans le contexte du printemps et du début de l'été 1941 n'ont pas été détectées par le renseignement allemand, en tout cas que leur volume n'a pas été correctement estimé, et c'est peu dire.
Ce qui me fait relativiser ces critiques sur le renseignement allemand, c'est qu'en novembre 1941, les interceptions radio (qui sont un capteur de renseignement dans les mains des forces armées et indépendant de l'Abwehr - Nachrichtenaufklärungs und Funkhorchwesen) permettent de détecter l'apparition de nombreuses grandes unités soviétiques aux alentours de Moscou. Le renseignement fonctionne donc bien. Mais les états-majors, l'OKH en premier lieu, n'adaptent pas leurs plans à cette information cruciale et continuent à chercher la décision par l'offensive. Les contre-offensives soviétiques lancées en série à partir du 5 décembre 1941 auraient vraisemblablement subi un tout autre sort si à Orcha, comme cela était instamment demandé par l'écrasante majorité des chefs d'état-major d'armée et de groupe d'armées, la Wehrmacht avait décidé d'assumer une posture défensive et pris ses quartiers d'hiver (et établi des fortifications sur des lignes défendables qu'elle aurait organisées avant que l'Armée rouge ne soit en mesure de les lui disputer). Certes, la campagne aurait dû se poursuivre en 1942, mais dans des conditions infiniment plus favorables pour l'armée allemande que celles qui prévalaient en juin 1942 (j'y vois en particulier deux conséquences très positives : 1) positions plus rapprochées de Moscou, notamment au-delà de la ligne Volokolamsk-Maloiaroslavets-Kaluga ; 2) pertes subies au cours de l'hiver bien moindre en raison d'une meilleure tenue au feu et des moindres ravages causés par le froid, notamment les engelures des membres et la casse véhicules, dans des positions préparées et dans un contexte défensif).
CNE EMB