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 Sujet du message : Re: D'Austerlitz à Sedan
Message Publié : 21 Jan 2017 13:23 
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Localisation : Bourgogne
@Jérôme : je ne sais pas ce qu'on enseigne à Saumur, ni dans les écoles de la cavalerie prusso-allemande, à l'époque. Mais ce n'est pas le problème. C'est une question d'articulation du commandement et de circulation de l'information et des ordres. Les cavaliers français ne reçoivent pas d'ordre particulièrement précis concernant les mesures de sauvegarde et de sûreté du corps dont ils dépendent. Ces derniers ne spécifient pas grand chose concernant leurs besoins en renseignement. Et de toute manière, leur état-major ne dispose pas d'officier spécifiquement dévolu au renseignement capable de les synthétiser.

L'organisation est donc fortement teintée d'amateurisme, puisque l'échelon de synthèse de ces question se trouve au niveau du chef d'état-major du corps, voire même directement au niveau du commandant du corps d'armée, qui ont tous les deux bien d'autres choses à traiter.
L'articulation allemande est déjà bien plus moderne, avec l'existence de cellules dédiées aux opérations, au renseignement, à la logistique, un chef d'état-major au périmètre bien défini, qui ne marche pas sur les plate-bandes du chef, et réciproquement. C'est plus là que se joue la différence.

Il est vrai que les cavaliers, les grands chefs de l'arme en particulier, ne semblent pas être pro-actifs en la matière, et ne donnent guère d'ordres à leurs subordonnés pour acquérir du renseignement ou prendre les mesures de sûreté qui aujourd'hui apparaissent les plus élémentaires. Le problème vient aussi du fait que les subdivisions d'arme de la cavalerie sont chacune censée avoir leur spécificité, et que le cuirassier n'est pas intellectuellement prêt à jouer un tel rôle alors même que parfois, il s'agit du seul cavalier disponible. Il faudrait voir si les chasseurs à cheval et les hussards, dont c'est le "coeur de métier", étaient plus efficaces.

@Aigle : je ne vois dans la réponse de Skipp que deux possibilités :
1) si on parle du républicanisme d'un général, il s'agit vraisemblablement de Trochu. Il y en avait d'autres, mais guère, et aucun n'était autant en vue ;
2) si on parle d'un officier pointé du doigt pour sa tentative de peser politiquement au détriment des considérations militaires, il s'agit sans doute de Bazaine et de sa fameuse capitulation du 27 octobre 1870, qui vise peut-être à affaiblir la République nouvelle-née au profit d'une restauration éventuelle du régime bonapartiste.

CEN EMB

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 Sujet du message : Re: D'Austerlitz à Sedan
Message Publié : 21 Jan 2017 13:38 
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Marc Bloch
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Localisation : Versailles
Je remercie EMB pour son explication - assez désolante au demeurant sur l'amateurisme de nos chefs.

Peut il nous préciser son opinion sur le niveau des sous officiers ?
Et les autres armées européennes n'étaient elles pas plus proches des approximations françaises que du sérieux prussien ? Si oui Pourquoi ?

Et enfin peut on soutenir l'hypothèse suivante : l'amateurisme de la cavalerie n'est il pas en partie explicable par la popularité du modèle héroïque et chevaleresque de la charge massive comme à Eylau ou en Crimée (la brigade légère anglaise exemple cité par EMB) ? Et ce malgré l'échec de Waterloo ? Ce culte de la charge ne résulte t il pas d'un imaginaire nobiliaire plus tourné vers les croisades que vers la révolution industrielle ? Qu'on me pardonne ces audacieuses simplifications si elles sont fausses !

Au passage j'ai trouvé cela

[...] "La cavalerie prussienne était donc beaucoup plus nombreuse que la nôtre. Elle était en outre plus instruite, plus habituée au service des reconnaissances, et ses chefs, en général jeunes et vigoureux, lui donnaient une impulsion hardie. Les uhlans, en particulier, étaient passés maîtres dans l'art de patrouiller à grande distance en avant des colonnes ; ce sont eux qui, comme les cosaques en 1814, ont laissé chez nos populations rançonnées le souvenir le plus vivace*, et qui, dans certaines campagnes, personnifient encore l'invasion. Mais du point de vue du champ de bataille, leur action est restée à peu près nulle, et les lourdes lattes des cuirassiers blancs ont été, dans les mêlées de cavalerie, bien plus redoutables que leurs lances."
Lieutenant-Colonel Rousset.
* Guillaume I qui reprochait à Thiers, reçu à Versailles fin octobre 1870, d'avoir enrôlé des Turcos et des Kabyles dans l'armée française pour combattre des chrétiens reçut cette réponse qui stupéfia tous les Allemands présents : "Mais vous-mêmes, vous avez des uhlans...".

Source : http://laguerrede1870enimages.fr/page19 ... rect=false


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 Sujet du message : Re: D'Austerlitz à Sedan
Message Publié : 21 Jan 2017 14:13 
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Inscription : 20 Déc 2008 14:01
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Localisation : Bourgogne
Le niveau général du combattant et de l'encadrement de contact (jusqu'au niveau de l'officier subalterne) est considéré comme excellent à l'été 1870, pour toutes les armes et spécialités, et à raison au vu de la performance individuelle ou dans des groupes tactiques bien définis (jusqu'au niveau du corps, c'est-à-dire les échelons de la section ou du peloton, de la compagnie, de l'escadron ou de la batterie, du bataillon, du régiment, peut-être de la brigade, moins au-delà) au combat en août et septembre 1870.
Je souscris à votre point de vue sur le fait que la charge héroïque est le principal legs de la cavalerie du Premier Empire à celle du Second, alors que c'est clairement le moins important et surtout le plus démodé !

Pour moi, l'armée française n'était pas exceptionnelle en Europe du point de vue des insuffisances du commandement ou de l'organisation. C'est plutôt l'armée prussienne et à son imitation les autres contingents allemands qui l'étaient. L'articulation du commandement et la qualité du travail d'état-major des officiers "im Generalstab" prussiens ont été une référence jusqu'en 1918, et même 1945. Aujourd'hui, le travail d'état-major se fait, avec des modernisations évidemment liées essentiellement à la numérisation ou des changements de détail, selon un schéma encore très prussien (par le biais de l'appropriation par les Américains de ce schéma à partir de 1945, peut-être un peu avant).

Si on ajoute à cela les vulnérabilités structurelles du régime impérial à l'été 1870... On ne peut qu'être confondu, effectivement, par la légèreté avec laquelle la France est entrée en guerre en juillet 1870 !

CEN EMB

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 Sujet du message : Re: D'Austerlitz à Sedan
Message Publié : 11 Avr 2017 7:38 
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Marc Bloch
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Localisation : Versailles
je raccroche à ce débat une autre question. Au vu de leurs missions, on pourrait penser que les cavaliers "légers" devaient avoir de grandes qualités : autonomie de décision, adaptation au terrain, endurance, .. outre une bonne maîtrise de la topographie !

Peut on déduire que les "légers" auraient été meilleurs que les "lourds" dont l'action en dehors des mouvements se serait limitée à des charges massives ? ou bien fais je ici une simplification grossière ?


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 Sujet du message : Re: D'Austerlitz à Sedan
Message Publié : 13 Avr 2017 17:41 
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Parlons en de la topographie, l'armée française manque cruellement de cartes, qui ont été "égarées" dans le foutoir de la mobilisation alors que l'armée prussienne est parfaitement pourvue jusqu'au stade des petites unités. Pour faire de la reconnaissance, il faut savoir où l'on est. Ajoutons que les sous-officiers français ne savent généralement pas lire une carte au contraire de leurs homologues allemands qui ont un entraînement spécial.

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 Sujet du message : Re: D'Austerlitz à Sedan
Message Publié : 14 Avr 2017 0:18 
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Marc Bloch
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Localisation : Allemagne
En 1870, la couverture de la carte d'état-major au 1/80 000 pour la France n'était pas achevée. Mais alors avec quoi travaillaient les Prussiens chez nous ?
A propos de la lecture de la carte, j'ai un très vieux souvenir de quand j'étais enfant et où les anciens combattants de 14-18 avaient une grande admiration pour leurs officiers "qui eux savaient lire la carte". C'était mythique :wink:

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 Sujet du message : Re: D'Austerlitz à Sedan
Message Publié : 14 Avr 2017 6:58 
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Localisation : Région Parisienne
Une petite histoire de la cartographie en France;

http://www.institut-strategie.fr/Strat8283-10.htm

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 Sujet du message : Re: D'Austerlitz à Sedan
Message Publié : 17 Avr 2017 6:49 
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Fustel de Coulanges
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Jerôme a écrit :
une bonne maîtrise de la topographie !


De Brack (Avant-postes de cavalerie légère) :

« D. Est-il important, pour un officier de cavalerie légère, de savoir dessiner ?
R. Aussi indispensable que de savoir écrire.

D. Pourquoi ?
R. Parce que souvent avec deux lignes, il dit plus et mieux qu'avec deux pages écrites; que quelques traits au crayon se font plus vite, et plus facilement, que ne se compose un rapport ; et qu'ils assurent, et classent bien mieux les détails de ce rapport, que ne le font les souvenirs qu'on conserve d'une longue reconnaissance.

D. Le dessin n'offre-t-il pas d'autres avantages encore ?
R. Il en offre un immense pour la guerre, c'est d'habituer à regarder et à bien voir; à apprécier les distances, les natures de terrains; à rendre présent ce qu'on a vu; et surtout à juger de la possibilité, de la vitesse, et de l'à-propos des entreprises.
[…]

D. Il faut donc qu'un officier de troupe légère apprenne à dessiner, pour apprendre à bien voir, et suive un cours de topographie ?
R. Cela est indispensable, s'il veut être officier distingué. Je crois même qu'il serait fort utile que ce cours donnât des notions coloriées de perspective aérienne. En poussant loin le talent du dessin topographique, l'officier trouvera des chances nombreuses d'être extrêmement utile aux généraux d'avant-garde, et de se faire une réputation qui hâtera son juste avancement.

D. Mais cette étude serait longue et par conséquent impossible dans la position actuelle des choses ?
R. C'est pour cela qu'on peut se borner à acquérir la prompte connaissance de quelques chiffres topographiques conditionnels, qui, en peu de jours, peuvent se loger dans notre mémoire, se trouver facilement au bout de notre crayon, et dont l'emploi sera éminemment utile pour appuyer les rapports des reconnaissances.

D. Qu'est-ce que la topographie proprement dite ?
R. La topographie est la base de toutes les opérations militaires. Son étude ne saurait être trop approfondie. Quelque connaissance que l'on ait acquise de l'ennemi, quelque force même que l'on ait à sa disposition, toute entreprise quelle qu'elle soit, dépend, dans son exécution, de la connaissance du terrain.

D. Un officier de troupe légère doit-il se fier entièrement aux cartes qui lui sont remises ?
R. Non ; il doit les considérer plutôt comme une indication utile, que comme une reproduction littérale de ce qui est. Il ne doit jamais oublier de rectifier sur sa carte les erreurs qui auraient pu s'y glisser, et d'ajouter les détails utiles qu'elle ne donnerait pas. Il doit penser que plus la carte est anciennement publiée, moins elle doit être exacte, car en bien peu d'années souvent, des villages disparaissent, d'autres se créent, d'autres se joignent, et confondent leurs noms ; des routes changent de direction ; des ruisseaux modifient leurs cours ; des étangs sont desséchés, et donnés à l'agriculture ; des gués sont remplacés par des ponts ; des ponts sont abattus, et reportés plus loin; des terres couvertes de forêts, de bruyères, de marais, des champs, des vignes, des prés, changent entr'eux de destination, de production , et, par conséquent, de formes topographiques.
Il doit aussi se rappeler que la petite dimension de l'échelle sur laquelle la plupart des cartes sont faites, doit souvent entraîner des erreurs. Ainsi, je le répète, il faut que cet officier considère la carte qui lui est remise comme une indication fort utile, surtout pour la direction de sa marche, mais qui, dans ses détails, ne doit pas entraîner de sa part une confiance entière.

D. Indiquez-moi les chiffres conditionnels topographiques que vous dites faciles à retenir et à tracer ?
R. Je vais le faire, en traçant d'abord séparément ces chiffres; puis en les réunissant, en un exemple général, et qui s'appliquera aux chapitres reconnaissances et rapports.
Il est bien qu'un officier ait une grande feuille de papier pour tracer au fur et à mesure le plan de sa marche. Il lui est presque toujours facile d'établir ce plan sur une échelle qui ne soit pas trop petite, parce qu'il peut s'arrêter, et mettre pied à terre toutes les fois qu'il a quelque chose à dessiner. Il peut même dessiner en restant à cheval, si cette feuille est ployée d'avance de la manière la plus commode, pour qu'elle ne se présente au crayon que successivement, et partiellement, au fur et à mesure du besoin, et que la partie dessinée prenne successivement et partiellement aussi dans le pli, la place du papier blanc qui en est sorti ; mais les petites feuilles d'un calepin suffisent, en ayant soin de suivre sur elles, et page par page, en commençant toujours uniformément par le haut ou le bas, le tracé de son plan. C'est sur des feuilles de la même dimension que celle d'un calepin que je donne ici le second exemple que vous me demandez.

D. Quel soin doit-on apporter dans le tracé de ces plans ?
R. C'est, en les commençant, de ne pas les établir sur une trop grande échelle, afin de pouvoir contenir un terrain plus vaste dans une même feuille.
2° De tracer finement pour ne pas confondre ensemble des lignes qui marcheraient parallèlement et indiqueraient des choses distinctes.
3° De porter une attention particulière sur l'écriture et l'orthographe des noms.
4° Quand l'occasion s'en présente de passer à la plume ce qu'on a crayonné, pour être plus certain de le conserver sans qu'il s'efface.
5° De bien établir les distances en inscrivant avec soin , à côté de ses suppositions ou du dire des habitants, le temps qu'on a mis à les parcourir; ainsi d'un point intéressant à un autre, on mettra par exemple : 1 lieue (1 heure au pas), 2 lieues (1 heure au trot).
En comparant le modèle du plan que je vous trace , aux dessins topographiques que vous avez vus, vous trouverez sans doute celui-ci bien grossièrement dessiné. C'est ce que je veux : en simplifiant l'exemple, je facilite la copie. Mon but n'est pas de faire de vous des dessinateurs, mais bien de mettre en peu de jours au bout de vos doigts les chiffres utiles d'une langue nouvelle pour la plupart d'entre vous, chiffres qui ne vous rebuteront pas par la difficulté de les reproduire, et dont vous pourrez vous servir immédiatement. »

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" Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)


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 Sujet du message : Re: D'Austerlitz à Sedan
Message Publié : 17 Avr 2017 11:24 
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Marc Bloch
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Ah ! De Brack, quel bon sens, quel pragmatisme ! La technique lui a succédé, mais l'esprit de ses écrits n'a pas pris une ride.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Antoine_F ... 9_de_Brack

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