A la suite du Petit salon vert commençait l'appartement privé de l'impératrice. Le visiteur entrait dans le "Cabinet de travail de Sa Majesté l'Impératrice" ancien Grand cabinet de la Reine, puis cabinet de toilette puis cabinet du secrétaire particulier de l'Empereur, cabinet de toilette du Roi et enfin Salon des dames de l'appartement de réception de Louis Philippe. La vue en coupe de Lefuel de 1860 correspond au décor décrit par Moench en 1808, et l'inventaire des tableaux dressé en 1864 est identique à celui du XVIIe s, le décor mural état 1855 est donc le même que sous le Premier Empire.
Comme au Premier Empire, ce cabinet était ouvert sur deux pièces secondaires (un passage et l'antichambre noire ouvrant sur la Galerie de Diane), éclairées en second jour par les portes vitrées en partie supérieure à droite du cabinet, décrites dans les mémoires de travaux de 1808 : en effet, l'inventaire de 1855 mentionne, comme au Premier Empire, "deux rideaux de porte vitrée en mousseline brodée, 2 lés chacun, plissés en haut et en bas".
En voici une première vue d'ensemble, afin de se rendre compte du volume et de l'effet qui pouvait être produit sur un visiteur entrant chez l'impératrice depuis le Petit salon vert.
J'ai pu y replacer une grande partie du mobilier historique : l'encoignure en laque et bronze doré de Marie Antoinette reconstituée à partir de la commode du même ensemble (MET), une paire de vases en serpentine verte et bronze doré (Louvre), le bureau à cylindre de Marie Antoinette aux Tuileries (Louvre) et le régulateur de Riesener (Versailles), placé dans ce cabinet en 1855, puis avec une copie sous forme de baromètre dans le nouveau cabinet de travail (créé en 1860 à la suite des salons vert, rose et bleu). Ce dernier semble avoir "naturellement" sa place devant le trumeau entre les deux portes.
Les sièges se composaient de trois ensembles : quatre fauteuils confortables, quatre chaises de même en soie bleu clair, et six chaises Chiavari à garniture rayée de diverses couleurs et à fleurs. Donc pas de sièges "historiques" dans ce cabinet.
La pendule a été identifiée par B. Chevallier comme celle actuellement présentée dans la grande chambre de l'empereur à Fontainebleau. En bronze doré, elle est ouverte sur ses quatre côtés et permet de voir le mécanisme.
Château de Fontainebleau, n°OA5282
La paire de chenets de 1780, attribuée à Gouthière, figurait en 1807 dans le cabinet de travail de l'empereur alors à la suite de ce salon, puis elle a été transférée en 1809 dans le nouveau cabinet (sous le second Empire, petit salon vert) où elle est mentionnée sous la Restauration. Elle est depuis 1901 au Louvre.
Je pense avoir identifié le modèle des candélabres, qui ne sont pas mentionnés par Bernard Chevallier. L'inventaire de 1855 les décrit ainsi : "711 - Deux girandoles en bronze doré et ciselé mat, style Louis XVI, socle allongé, bouts demi-circulaires, sur pieds coniques à feuilles, torsades, rangs de perles, moulures à feuilles, fond du socle verni imitation bleu lapis, orné d'une couronne de fleurs et tige de myrthe, surmonté de figures de femmes (...) dans un arabesque, tenant un thyrse entouré de pampres, branches à riches rinceaux et tête d'aigles, bassins à feuilles d'acanthe, haut 49 cm, L'un 700 francs" (par comparaison, l'un des deux lustres de la pièce à 24 lumières, en cristal de roche et bronze doré, de 1,64 m de haut et 80 cm de diamètre est estimé à 467 francs).
En recherchant une équivalence de ces candélabres sur le net, j'ai trouvé ce modèle attribué à François Rémond décrit comme "célèbre modèle" et copié par Beurdeley vers 1880 :
Modèle à 8 branches, avec le socle peint en lapis :
Attributed to Louis-Auguste-Alfred Beurdeley - A pair of Louis XVI style gilt bronze, marble and lapis lazuli figural candelabra, French, late 19th century. the underside of one with faint BY mark, the underside of one figure with MY mark from the bronze master model, the other with impressed MY stamp and the numeral 3. - Dim: Height 25 1/4 in.; Width 14 in.; Depth 5 in. 64 cm; 35.5 cm; 12.5 cm
http://www.sothebys.com/en/auctions/eca ... t.546.htmlDétail sur le socle :
Modèle à 4 branches, que j'ai suivi au vu de la hauteur du candélabre indiquée dans l'inventaire :
https://www.1stdibs.com/furniture/decor ... -test-poolAutre élément historique : la table à écrire de Riesener, OA5162, présente à Compiègne puis aux Tuileries au XIXe, et aujourd'hui au Louvre :
Je l'ai installée en complément du "coin" de sièges confortables autour de la cheminée, usage montré par les aquarelles de Fortuné de Fournier pour le Grand salon de l'impératrice à Saint Cloud. En voici une vue avec l'ensemble du mur du nord, et la porte ouverte sur le passage menant à la chambre de l'impératrice. En l'absence d'indications précises de l'inventaire (un écran en bois doré), l'écran est un modèle simplifié de style Louis XVI.
J'ai "ouvert" le cylindre pour laisser apparaître les tiroirs, et installé un tapis qui correspond dans ses grandes lignes (centre marron, fond blanc autour, fleurs et arabesques) à celui mentionné par l'inventaire, ce qui permet de se rendre compte que ce tapis "éclaire" la pièce et met en valeur les meubles anciens. Il est par contre plus petit que la pièce (4,20m sur 4,90m pour le tapis, contre 5,50m de côté pour la pièce) donc une partie du parquet apparaît autour.
Ce cabinet étant une pièce intime de l'impératrice, et la pratique étant indiquée par B. Chevallier pour le cabinet de travail créé pour Eugénie en 1860, j'ai installé des photographies de membres de la famille impériale (ceux indiqués par B. Chevallier): l'empereur et le prince impérial, la princesse Mathilde, le Prince impérial à 3 ans et l'Empereur, de gauche à droite sur le bureau, et sur l'encoignure, la princesse Clotilde et la duchesse d'Albe, soeur de l'impératrice.
Deux autres meubles de rangement sont indiqués dans l'inventaire : une table coiffeuse et une étagère en que j'ai placées contre le mur de la fenêtre, ici vu depuis le passage vers la galerie de Diane :
Face à la cheminée, on trouvait sans doute de l'autre côté : une console en amarante (ici d'un modèle proche conservée à Fontainebleau), sur laquelle j'ai posé deux cassolettes (modélisation des originaux au Louvre) et l'autre coupe en serpentine, le tout encadré par deux chaises confortables, comme cela se fait à Saint Cloud. L'éclairage est assuré par deux appliques (maintenant à l'Elysée, dans le salon Pompadour).
Vue avec le passage vers la galerie de Diane
Pour le plaisir de se replonger dans le Second Empire et donner l'échelle de la pièce, une "dame du palais" en robe à crinoline avec ce côté du salon et l'enfilade sur les salons vert et des tapisseries.