Jerôme a écrit :
Je ne sais où placer mon sujet mais je m'interroge sur l'étendue de la censure des grandes œuvres philosophiques et des grands auteurs des Lumières : Voltaire. Montesquieu, Diderot, Rousseau ...
J'imagine que leurs œuvres étaient librement diffusées de 1789 à 1799.
Mais avant ? La monarchie de Louis XVI était elle libérale en la matière ?
Et après ? Bonaparte puis Napoléon a t il autorisé ou interdit la réimpression de ces auteurs ?
Et la Restauration ?
Question plus complexe : ces œuvres étaient elles disponibles dans les bibliothèques universitaires ou autres ?
Bonjour,
En préambule, nous pouvons nous appuyer sur le célèbre monologue de Figaro dans
Le mariage de Figaro (acte V, scène III). Ecrit en 1778, il doit subir l'ordalie de la censure pour enfin être présenté en 1784. On peut retenir cette habile formule: "
sitôt je vois, du fond d'un fiacre, baisser pour moi le pont d'un château fort, à l'entrée duquel je laissai l'espérance et la liberté" ou encore celle-ci
"je vois s'élever contre moi mille pauvres diables à la feuille" . Un "petit" commentaire ici (III. B.) :
https://commentairecompose.fr/le-mariag ... 5-scene-3/Malgré le fait que cela se déroule en Espagne, il a dû revoir sa copie avant de la présenter.
Ce sujet a, je pense, déjà été abordé ailleurs. Je vais synthétiser et tenter une approche nouvelle (je l'espère).
Si on prend Montesquieu et ses
Lettres persanes , on peut voir qu'il a usé de techniques particulières pour faire "passer la pilule":
- La publication anonyme à l'étranger (A Amsterdam en 1721)
- La technique du "Manuscrit trouvé": l'auteur sous-entend qu'il exhume simplement un récit. Véritable bouteille à la mer, il se dédouane dans un même mouvement de cela. Diderot dans Jacques le Fataliste ne fait pas autrement lorsqu'il imagine un éditeur fictif qui hésite entre trois versions différentes. Rousseau pour sa Nouvelle Heloïse se refuse à dire si tout cela est vrai. Enfin, Montesquieu monte un véritable canular avec Le Temple de Gnide: publié anonymement, il annonce qu'il s'agit d'une traduction d'un manuscrit grec trouvé dans la tombe d'un évêque. Pour nuancer, dès 1778 au moins on se doute de la supercherie. Plus d'infos ici: http://www.persee.fr/doc/caief_0571-586 ... _42_1_1736
-L'utilisation de mécènes
- L'utilisation de l'ironie (Candide en est la parfaite illustration)
Pendant la Révolution, les mânes de Candide et les restes de Rousseau ont été transférées au Panthéon (1790-91). Ici voir le dico critique de Mona Ozouf et de François Furet. La Révolution a besoin des Lumières pour se légitimer. On peut donc imaginer une présence dans des bibliothèques pour les élites.
Pour Napoléon, je n'ai pas vraiment étudié le sujet. On peut avancer l'idée qu'il favorisait ce qui l'arrangeait... Davantage
l'Esprit des lois que le
Contrat social donc.
Pour la Restauration, je n'ai pas d'infos.
Bonne journée.