calade a écrit :
ils pensaient vraiment que cette théologie "plus proche de la vérité évangélique", purifiée, raisonnable toucherait les fidèles. Et puis il faut aussi voir que les années 60 sont des années pleines d'un enthousiasme modernisateur où du passé on fait table rase. Pensez à tout ce qui a pu être détruit ou jeté dans les églises ! Il suffit de comparer des cartes postales de 1900 et ce qu'on voit aujourd'hui.
A vrai dire, pas que les églises, loin s'en faut.
Dans les années 60, on a réinventé des choses aussi fondamentales que la manière de cultiver la terre, la manière d'apprendre à lire, la manière de construire et chauffer sa maison, la manière de vivre la sexualité... et effectivement la manière d'aller à la messe, parmi bien d'autres choses.
L'Histoire jugera de savoir si l'on a eu affaire à une génération de fabuleux ré-inventeurs ou à des apprentis sorciers.
Jerôme a écrit :
Cette analyse me semble exact mais je reste un peu étonné que des gens essentiellement soucieux d'aller vers la base se soient finalement enfermés dans un discours élitiste et sans guère d'influence sur cette base - contrairement au but affiché et certainement sincèrement recherché !
Il y a plusieurs clivages à cet égard. Avant Vatican II, vous avez les forces "progressistes" contre les forces "traditionalistes". Simple jusque là. Mais dès les années 70, vous avez déjà une deuxième rupture, celle des ex-progressistes satisfaits des changements, de leurs conséquences, qui veulent approfondir sur cette voie, et ceux qui regrettent
in fine les résultats obtenus. L'exemple le plus flagrant de cette deuxième catégorie est évidemment le cardinal Ratzinger, futur pape Benoit XVI. Mais, quand on lit la correspondance d'un Père de Lubac, d'un Bruno de Solages (par exemple) dans les années qui suivent Vatican II et la réforme liturgique de 1970, on voit qu'il y a du désabusement. Un air de "ce n'est pas cela que nous avions voulu".
marc30 a écrit :
après Vatican II on peut dire qu'on a eu une révision du fond pour qu'il soit plus vrai (plus proche de l'Evangile pour faire simple) en croyant qu'un discours plus vrai sur le fond serait aussi plus efficace (plus apte à rallier les masses)
Sur la partie liturgique, il y a une expérience forte qui a joué: celle des camps de la IIème guerre mondiale.
Pour les prêtres comme pour les fidèles, cela a été l'émotion toute nouvelle d'une liturgie épurée, ramenée à l'essentiel, intime et profonde à la fois. Par comparaison, la liturgie en musique, avec force dentelles, fleurs, dorures, statuaires etc. héritée des siècles précédents, paraissait boursouflée et gauchie. Et c'est aussi dans les camps de prisonniers que l'on a fait l'expérience des langues vernaculaires.
Ceux qui ont vécu ces fortes expériences n'ont pas nécessairement réalisé que leur intensité tenait également à la tragédie du moment et du lieu.
Les promoteurs de l'épuration (au sens premier du terme) n'ont pas pensé que, si elle leur était bénéfique, c'était que eux avaient le
background intellectuel et théologique qui rendait possibles leurs exigences. Sans imaginer que les grouillots, les pécores et le menu peuple s'exprimeraient par la voix de Brassens:
sans le latin, la messe nous emmerde