CEN_EMB a écrit :
- un équipement pléthorique mais de qualité très inégale (et plutôt de qualité médiocre qu'excellente puisqu'à côté des 992 excellents T-34 et 466 KV-I, il y a plusieurs milliers de médiocres ou obsolètes T-26, T-28, BT-5 ou BT-7 ;
- le "miracle" de l'été 1941, le T-34 ;
Lord Foxhole a écrit :
Parler de " miracle " au sujet du T-34, c'est beaucoup dire.... Le T-34 est issu d'une lignée de tanks réalisés au cours des années 1930 : ses premiers prototypes roulent déjà au début de 1940.... Le T-34 existe déjà en URSS, mais dans l'ignorance totale du reste du monde.
CEN_EMB a écrit :
Non, ce n'est pas beaucoup dire. Ces chars sont une des raisons qui explique comment les Soviétiques ont pu tenir.
Ils sont loin d'être parfaits toutefois..et les équipages loin d'être suffisamment formés et entraînés.
Je me permets de relancer ce fil, en rebondissant plus particulièrement sur vos remarques, CEN_EMB et Lord Foxhole, qui concernent la production et présence en ligne le 22 juin 1941, des chars soviétiques (dont les fameux T-34 et KV-1), car toujours en pleine lecture de l'ouvrage de Jean Lopez et Lasha Otkhmezuri "Barbarossa, 1941. la guerre absolue" j'y lis et découvre à ce sujet des précisions (qui pourraient intéresser tout un chacun ici ?) comme:
- Qu'en mai 1938, la direction générale des blindés, menée par le général Dimitri Pavlov, propose de lancer deux nouveaux types de chars. En février 1939, le comité de Défense (dirigé lui par Kliment Vorochilov) approuve ce projet et confie le travail de conception de ces modèles à l'usine de locomotives n°183 de Kharkov. En août de cette même année, un prototype nommé A-32 est livré au polygone d'essais de Kubinka, à 60 kms de Moscou. Le 19 décembre 39 (après une nouvelle série d'essais en octobre avec un prototype devenu A-34) le projet de directive de Pavlov est finalement adopté par le haut Conseil de Défense et prend le nom définitif de T-34. L'autre modèle, le char lourd KV-1 (KV de Kliment Vorochilov) est lui aussi poussé à industrialisation à ce moment. Il reste toutefois de nombreuses modifications à tester encore sur ces chars et c'est seulement le 30 mars 40 que deux exemplaires sont présentés au Kremlin puis le 26 avril que Pavlov défend devant le Haut Conseil militaire le remplacement des vieux T-26 et BT par trois modèles modernes: le char moyen T-34, le lourd KV-1 et l'amphibie T-40. Le Conseil le suit et émet un résolution, entérinée le 7 juin 1940 par un décret du conseil des commissaires du peuple et le bureau politique. Pour 1940, la production du T-34 est fixée à 600 unités, objectif quadruplé pour 1941. Au moment de l'attaque allemande, toujours selon J.Lopez, 892 T-34 et 504 KV-1 seront en service aux armées, pour les deux tiers en Ukraine. La grande majorité de ces engins ne seront pas détruits au combat mais abandonnés par leur équipage suite à une mauvaise manoeuvre ou faute de gazole.. Le général Pavlov fût, lui, fusillé pour lâcheté en juillet 41 par le NKVD.
C'est seulement- et donc- depuis juillet 40 que les nouveaux chars T-34 et KV-1 sont en production et arriveront peu à peu dans les unités (dont la plupart des équipages ne sera pas ou peu familiarisée avec ces deux nouveaux matériels au moment du déclenchement des hostilités).
- Au 22 juin l'armée russe dispose sur ses différents fronts ouest de 8000 chars opérationnels (dont à peu près 50% ne sont pas en état de soutenir un déplacement de plusieurs heures); Il lui reste cependant en réserve, en parcs, 14000 autres.
- Par ailleurs, le 1er semestre 41 avait vu une réorganisation et un rééquipement des corps mécanisés (encore en cours au moment de l'attaque allemande) puisqu'en novembre 39 le Conseil militaire suprême avait ordonné que les 4 corps mécanisés dont disposait l'armée soviétique soient retirés de l'ordre de bataille et répartis en 26 divisions motorisées mises au service direct de l'infanterie. Sept mois plus tard, après la démonstration donnée par les panzers en France, Timochenko, ministre de la Défense, avait ordonné la reconstruction urgentissime de ces corps mécanisés, encore plus gros que ceux existant auparavant, devenant ainsi les plus grosses formations mécanisées jamais vues dans l'histoire. Sur le papier elles se composaient de 1108 tanks, 37 200 personnels et 300 pièces d'artillerie, bientôt ramenés à 1031 chars et 36 000 hommes groupés en deux divisions blindées et une d'infanterie motorisée plus un régiment motocycliste. C'est 2,5 fois plus gros qu'un corps panzer type 1941. Neuf corps mécanisés de ce type sont formés en 1940, vingt autres sont prévus pour février 41. Aucun ne possédera ses matériels au complet en juin 41. La moyenne s'établit à 450 chars, soit l'équivalent d'un corps panzer. Le total de ces chars, où le démodé T-26 est majoritaire et les nouveaux modèles T-34 et KV-1 ne représentent que 8 %, doit encore être réduit de 29 % pour cause de révisions mécaniques majeures.
Douze modèles de chars différents, plus de trente avec les variantes, se trouvent donc dans ces formations (si bien que la fourniture des pièces détachées et des obus de six calibres différents est un casse-tête insoluble). De plus les Etats-Majors des corps, trop peu étoffés, sont dans l'impossibilité de gérer la circulation, la concentration et le déploiement de telles masses de matériels et d'hommes. A aucun moment, lors des contre-attaques, les corps mécanisés ne pourront se rassembler. Si bien que, dans les faits, les Allemands ont affronté de petits paquets de 40 à 50 chars aveugles (pratiquement pas d'avions de reconnaissance ni de véhicules radios à disposition), incapables de se ravitailler en essence et en munitions, sans liaisons entre eux et avec le commandant du corps. En résumé, les formations blindées de l'armée rouge ne sont encore en 1941 que des squelettes expérimentaux, inaptes à la guerre.
- Enfin, dernière précision (et non la moins étonnante à mon sens, dans le cadre de ce fil): le 30 mars 1941, dans la matinée, lors de la réunion qu'a organisé Adolf Hitler, à sa chancellerie, avec les chefs des trois armes, les principaux représentants de l'OKW et de l'OKH, les commandants des trois groupes d'armées (prévues pour Barbarossa), les 12 commandants d'armée et de groupe blindé, ainsi que vraisemblablement, les neuf commandants de flotte et de corps aérien qui doivent mener l'attaque contre l'URSS, chacun flanqué de son chef d'état-major, afin de leur exposer,
pour la première fois sans fard, dans un discours de deux heures trente, le programme de conquête du Lebensraum (sans toutefois donner d'ordres précis - qui viendront plus tard-, à l'exception du problème juif dont, s'il n'est fait état explicitement, est présent dans tous les esprits des officiers présents lorsque le Führer évoque 'l'extermination des commissaires bolchéviques et de l'intelligentsia communiste" signifiant l'extermination d'une partie des juifs soviétiques), c'est ici, donc qu'Adolf Hitler, les yeux dans les yeux avec ses généraux, venu s'assurer de leur état d'esprit sur l'aspect politique et racial de la campagne à venir et de leur consensus sur les buts et moyens de celle-ci leur expose, lors du rappel de la situation stratégique, la nécessité d'attaquer la Russie et une évaluation de ses forces qui mentionne des "chars mammouths de 42 à 45 tonnes avec canon long de 100 mm" ce qui fait référence au calibre près, au char lourd KV-1 tout juste mis en service...les allemands ne découvriront donc pas l'existence des nouveaux modèles de chars russes au déclenchement de Barbarossa mais en réaliseront très très vite, dès l"été, leur supériorité de performances et opératives.