Luern a écrit :
le lettré à une assez faible valeur comme esclave. Le cas est envisageable à petite echelle (l ile de Paques) mais me semble douteux à cette echelle.
En tout cas un bon bois d'ébène, c'est du bétail humain en bonne santé, avec une tête, deux bras et deux jambes valides ; INDIFFEREMMENT de ce qu'il fût lettré ou non. Par conséquent, vous avez certainement tort de considérer que le critère de "lettré" était négativement discriminant de la valeur de l'esclave. Notez en outre que les capacités artistiques et artisanales de leur cheptel humain étaient fort utiles aux maîtres. Mais ceux-ci n'avaient rien à faire de capacités scripturaires dans des systèmes d'écriture qu'ils n'utilisaient pas, et dont ils n'avaient aucun besoin.
Il faudrait considérer le problème non pas du point de vue de la société esclavagiste, mais de celui des sociétés négro-africaines mises en esclavage : les fonctions sociales y étant assez distinctement réparties, les scribes ne sont pas des sofa/militaires. Ils sont donc parmi les catégories les moins aptes à se sauver de rapts, guerres d'approvisionnement en bois d'ébène, et autres razzias.
En outre, sachant que l'enseignement en Afrique a un caractère initiatique, tel qu'on ne peut avancer dans les sciences qu'à mesure de son avancement dans les différentes classes d'âge (un génie précoce, ça n'existe pas dans ce système d'enseignement) : les personnes les plus instruites, les sages, les prêtres, sont presque toujours parmi les plus âgées. Elles sont donc (doublement) vulnérables dans un contexte de guerre perpétuelle et de razzias, par leurs spécialités non martiales et leur âge souvent avancé...
Luern a écrit :
Plusieurs autres hypothèses peuvent etre envisagées
1/ l'absence d utilité
A quoi sert d'ecrire ?. Toute l antiquité répond : A tenir compte des taxes sur les recoltes puis, plus tardivement, a noter les lois (quand la loi n'est pas coutumière).
=> un exemple : les germains n'avaient pas de réel usage à l'ecriture, les Incas si ! (et ont donc développés un système équivalent) .. ceci pour dire qu'il n'y a pas que les "ègres" qui puissent ne pas avoir d'usage à l ecriture mais que cela depend plus de la forme d organisation de la société et de son agriculture.
La réponse de "toute l'Antiquité" n'est pas nécessairement celle de l'Afrique. Il vaut toujours mieux s'interroger sur une société à partir des faits documentés dans la dite société, plutôt que de les déduire de ce que l'on sait par ailleurs.
En l'occurrence, en Afrique ancienne l'écriture a été souvent utilisée dans des sociétés sécrètes, à des fins diverses, mais souvent liées à des préoccupations spirituelles :
-
astronomie, pour connaître la position de certains astres et en tirer des conséquences pratiques pour certains rites, notamment agraire ; donc aussi
agriculture pour la connaissance des saisons et rythmes annuels des activités agricoles
-
correspondance, entre dirigeants politiques, mais aussi entre membres de différentes sociétés sécrètes ne résidant pas toujours dans un même lieu, et qui devaient pour autant conserver des contacts permanents, notamment en vue d'organiser leurs différentes réunions sécrètes,
- etc.
En conséquence, "l'absence d'utilité" de l'écriture ne peut pas être prononcée en ce qui concerne les données africaines. C'est plus exactement une utilisation différente, mais bien réelle et quoique souvent sécrète, de l'écriture que l'on y constate. D'ailleurs (entre nous) le fait même que de nombreux systèmes scripturaires existent en Afrique aurait pu suffire à écarter cette hypothèse...
Citer :
2/ le support
Rares sont les climats qui preservent les ecrits sur supports organiques
Là j'achète. Cependant, ces "supports organiques" disparaissent d'autant plus rapidement qu'ils subissent les affres pyromanes d'une Colonisation qui brûla d'innombrables villages et agglomérations africains...
Citer :
3/ un Interdit Religieux
Les gaulois, exemple typique ou l usage de l ecriture était très etroitement encadré.
Que l'usage de l'écriture soit strictement réservé à quelques catégories sociales, voici une condition aggravante du risque de sa disparition (ou dans le cas africain de son atrophie) dans un contexte de 500 ans d'instabilités politiques, avec leur cortège incommensurable de guerres...