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Message Publié : 22 Août 2022 13:39 
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Barbetorte a écrit :
Les cahiers de doléance font paraître un consensus sur deux points :
- exigence d’une constitution écrite,
- égalité des citoyens devant l’impôt, la noblesse renonçant à ses privilèges pécuniaires.

Effectivement, en les croisant tous - mêmes si tous les cahiers de la noblesse et du clergé ne réclamaient pas forcément la fin de leur privilèges -, on retrouve cette volonté exprimée d'une égalité devant l'impôt et la fin de certains privilèges (donc disparition de la société d'ordres) ; ainsi qu'une limite au pouvoir absolu du roi (assemblée faisant les lois, Etats-Généraux permanents, constitution, etc.), donc fin de la monarchie absolue.
Par contre, aucun cahier ne contenait autre chose qu'une forme monarchique de gouvernement. En gros, les Français ont tenté de réformer une monarchie, incapable de le faire depuis plus de 20 ans, par "le bas".

Sauf que... le roi ne voulait absolument pas de tout cela !

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Message Publié : 22 Août 2022 15:42 
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Citer :
Effectivement, en les croisant tous - mêmes si tous les cahiers de la noblesse et du clergé ne réclamaient pas forcément la fin de leur privilèges -, on retrouve cette volonté exprimée d'une égalité devant l'impôt...

Le « tous » laissent augurer que certains étaient prêts à se défaire de quelques privilèges.
L'égalité devant l'impôt était de ceux-ci. Certains nobles et membres du clergé semblaient prêts à ce que ce privilège soit discuté. D'ailleurs la question semble avoir été évoquée antérieurement sous Turgot ou Calonne. Avec des nuances.
Citer :
Par contre, aucun cahier ne contenait autre chose qu'une forme monarchique de gouvernement.

Il faut en acter.
Les personnes mandatées pour porter ces cahiers ont donc quelque peu dépassé ce mandat en exigeant une constitution.
Si certains souhaitaient une monarchie à l'anglaise ou une constitution, je me pose la question de savoir si ce souhait est à inclure comme "doléance" ou comme la révision d'un statut ; révision qui n'a peut-être pas sa place lors d'Etats Généraux.
Louis XVI a-t-il été obligé de s'en remettre aux Etats-Généraux pour un changement de mode de gouvernement ou un pressant besoin d'argent avec -on ne pouvait faire de miracle- une refonte de la fiscalité ? Refonte déjà entamée dans les esprits de quelques ministres mais que les Parlements bloquaient.

Le mandat des représentants était-il impératif ou représentatif ? Je puis me tromper mais il me semble qu'il était impératif. D'impératif, le Tiers va le faire glisser en mode représentatif. Le tout en quelques jours.
Citer :
En gros, les Français ont tenté de réformer une monarchie...

N'est-ce pas présumer/présupposer de la volonté des Français ? Vous écrivez "qu'aucun cahier ne contenait autre chose qu'une forme monarchique de gouvernement.".
Citer :
Sauf que... le roi ne voulait absolument pas de tout cela !

Tout, en effet. Mais de "tout" à rien, il existait une marge. Louis XVI était le dépositaire d'une forme de monarchie. Il reste donc parfaitement dans son rôle. Le problème est son aveuglement quant aux choix/volontés de "sa" noblesse qui a emprunté la gamme des blocages.
Il était difficile, impossible (?) de travailler et en amont et en aval.
Il était devenu impensable de faire alliance avec un Tiers qui avait forcé la main du souverain.
Le tout sur fond d"opinion publique", paramètre relativement nouveau pour l'époque. Le tort avait peut-être été cette libéralité de laisser l'opinion publique s'exprimer. Le contraire n'était plus envisageable. Nous sommes donc à un moment où l'opinion publique fait de la politique et où le roi est dépassé par toutes ces nouveautés.

De nos jours nous avons cette habitude de voir nos désirs ne pas trouver immédiatement d'écho. Les modes de communications sont bien autres. Il faut constater les échauffements récurrents : qui pourtant se sent à la veille d'une révolution ?
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Message Publié : 22 Août 2022 15:55 
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Localisation : Provinces illyriennes
Citer :
Les personnes mandatées pour porter ces cahiers ont donc quelque peu dépassé ce mandat en exigeant une constitution.

Et oui, une monarchie peut être constitutionnelle...

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Message Publié : 23 Août 2022 12:45 
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Duc de Raguse a écrit :
Et oui, une monarchie peut être constitutionnelle...

Certes, un monarchie constitutionnelle mais est-ce un consensus à ce moment ? L'essentiel des cahiers de doléances montre-t-il cette aspiration ?
Je reviens sur ces fameux cahiers.

[… On savait que des modèles de cahiers types avaient été répandus. Cette influence existe, on peut localement en mesurer l'impact.

Dans la plupart des cas, les revendications locales ont su se faire entendre ; seulement l'influence des hommes de loi ou bourgeois locaux qui ont très souvent pris la plume détermine la tonalité du cahier. …
Il y a plus de richesse dans le foisonnement des cahiers spontané, mais la structure ou le vocabulaire des cahiers savants permettent d'y mesurer la pénétration des Lumières, de même que celui des cahiers de bailliage où furent refondus de manière très sélective les apports des cahiers de communauté.


On y mesure la très faible pénétration de certaines notions fondamentales des Lumières (la « nature » ne se retrouve guère que … dans les « droits en nature »!) …]

Comment -dans les campagnes- et dans certaines franges urbaines pouvait-on appréhender une « monarchie constitutionnelle » ?
A défaut de voyage outre-Manche, il fallait lire (ce qui demande un temps accordé à des loisirs) ; ces franges avaient-elles ce temps, temps pour apprendre, comprendre, faire une synthèse ?
On voulait « contrôler l'absolutisme » mais le mot « charte » était-il dans toutes les bouches ?
L'essentiel n'était-il pas -dans l'immédiat- un impôt plus égal et la fin de certains privilèges, ce qui ne changerait pas audacieusement l'ordre des choses mais tout au plus initierait un rééquilibre ?
Peut-on estimer que les représentants, personnes « éclairées » pour l'essentiel, ont plus laissés parler un vœu personnel que les demandes réelles ?
Les demandes émanait-elle du « bas », d'où l'emploi « … révolution par le bas... » ?
Il ne me semble pas (je puis me tromper) que ces « nouveautés » émanait du « bas » mais plutôt d'une frange de population qui a su utiliser les demandes du « bas ».

Le paragraphe suivant est « Les élections aux états généraux »
[… Dans le tiers, on ne peut passer sous silence le travail de mainmise bourgeoise, de gauchissement des intentions exprimées...
A chaque niveau, la parole a été portée par les notables : laboureurs contre manouvriers au village, bourgeois urbains traitant des revendications rurales … monopole que s'arrogèrent à la ville comme au bourg le groupe des robins d'être les porte-parole privilégiés et souvent exclusifs.
]

« La Chute de la monarchie : 1787-1792» - M. Vovelle – pp 110 à 117 – Ed. Du Seuil

C'est cette manipulation des idées, des souhaits qui rend parfois les choses moins lisibles et questionne sur la volonté réelle d'un échange où chacun ferait un pas. Il se peut fort que le Tiers voyant son audace payante, ait eu de moins en moins envie d'être consensuel mais d'optimiser la situation, chaque journée renforçant ses représentants.
Ainsi fait, on ne pouvait qu'arc-bouter le souverain dans sa vision étriquée : les innovations tant redoutées par lui, aboutissaient au désordre. Il ne peut rien sortir de bon d'un désordre.
.

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Message Publié : 23 Août 2022 18:05 
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Pour rédiger ces cahiers, il fallait être instruit, donc ce sont ceux qui savaient bien lire et écrire qui ont fait ce travail (notaires, avocats, médecins, etc.). C'est bien cette bourgeoisie (du moins pour le Tiers) éclairée (des clercs et nobles l'ont aussi manifesté dans une moindre mesure) qui est à la manoeuvre.
Est-ce qu'il y a eu exagération dans les doléances écrites, par rapport à ce qui avait été dit, dans les différents bailliages et sénéchaussées par ces derniers ? Personne ne le sait exactement.
De là à parler de "manipulation" c'est un pas qu'on ne saurait franchir.

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Message Publié : 23 Août 2022 19:36 
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J'ai aussi en tête l'idée que dans les villages c'était bien souvent le curé - qui lui savait écrire - très proche des préoccupations de ses paroissiens, et qui lui-même ne roulait pas sur l'or, qui avait recueilli leurs doléances.

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Message Publié : 23 Août 2022 20:26 
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Les campagnes sont mon gros problème. Je ne vois pas les mots "charte" ou "constitution" prononcés/verbalisés.
Si les débats sur les impôts et améliorations concernant le statut peuvent être verbalisés, tout comme certaines notions à caler avec le mot "liberté" ont certainement été fructueuses pour peu d'explications, le côté "monarchie constitutionnelle" : je ne vois vraiment pas, du moins dans certaines régions. Je pense que déjà le mot "absolutisme" n'évoquait rien. On savait comment on vivait, quelles étaient les contraintes, les devoirs etc. Mais pour le reste...
Bien sûr il y a le passage des colporteurs mais -pour avoir lu des affichettes- ceci ne va pas très loin.
Restent ceux qui ont les moyens d'acheter les journaux mais comment les journaux pouvaient -en ces temps- arriver dans les villages alors que dans les années 70, le seul journal était le journal départemental acheté à la pièce au café bien souvent (il ne servait à rien de "s'abonner", le journal départemental était déposé -comme le pain et autres- au niveau du café.
Et puis un journal, il faut du temps pour le lire, un dictionnaire pour certains mots : tout ceci me pose question dans les régions essentiellement rurales.
Déjà, dans les années 70 ces mots ne renvoyaient à rien alors en 1789 ? Même avec le prêtre, je suis étonnée. J'ai cherché sur le net et je n'ai rien trouvé correspondant à un canton.
J'imagine que pour les villes, c'était grandement différent. Pour avoir lu quelques lignes des cahiers du Tiers concernant Paris, nous sommes totalement sur une autre planète.
*

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Message Publié : 23 Août 2022 20:54 
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Rebecca West a écrit :
Les campagnes sont mon gros problème.


Votre "gros problème" est de savoir se mettre dans la tête des gens de l'époque. Vous avez une vision qui est très loin de la réalité de l'époque. Dans les campagnes, tout le monde n'est pas inculte. Ne pas savoir lire ou écrire ne veut pas dire qu'on n'est pas capable de comprendre. Il y a plusieurs témoignages sur comment s'est passée la rédaction des cahiers. Quelqu'un avait posté il y a quelques années un écrit sur la rédaction des cahiers de doléance dans un bailliage campagnard. De mémoire, les discussions avaient eu lieu dans l'église, qui était le local le plus grand du bourg. Les gens étaient venus de tout le bailliage. D'abord pour élire leurs représentants à la rédaction, et leur représentant pour les États Généraux. Ensuite, la rédaction du cahier de doléance avait eu lieu. Effectivement, dans ce qu'on pourrait nommer le "comité de rédaction", il y avait surtout des notables, mais ils ont "officié" devant la population entière, au vu et au su de tous. Avec parfois des gens qui demandaient des éclaircissements sur tel ou tel point.

Vous ne voyez pas tel ou tel mot "verbalisé", pourquoi ? Pensez-vous avoir affaire à des arriérés ? Pensez-vous que nous sommes tellement supérieurs à nos ancêtres d'il y a 230 ans ? On aurait fait de telles avancées durant ces quelques générations qui nous séparent d'eux ? Vous savez, ils avaient peut-être quelques connaissances en moins, mais ils avaient la même intelligence que nous.

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Message Publié : 24 Août 2022 8:07 
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Narduccio a écrit :
Votre "gros problème" ... Vous avez une vision qui est très loin de la réalité de l'époque. Dans les campagnes, tout le monde n'est pas inculte ... Ne pas savoir lire ou écrire ne veut pas dire qu'on n'est pas capable de comprendre.

Je n'ai rien écrit de tel. Que vous le ressentiez ainsi, je n'y puis rien.
Citer :
Les gens étaient venus de tout le bailliage.

Cité plus haut : le bailliage était l'endroit où " … furent refondus de manière très sélective les apports des cahiers de communauté".
Citer :
... mais ils ont "officié" devant la population entière, au vu et au su de tous. Avec parfois des gens qui demandaient des éclaircissements sur tel ou tel point.

« devant la population entière, au vu et au su de tous. » : l'expression n'a pas de sens. Comment des personnes ne sachant ni lire ni écrire peuvent-elles contrôler ? Pour le "vu" : peut-être ; le "su" est déjà plus difficile.
Demander des éclaircissements n'est pas avoir la sûreté que les écrits correspondront aux souhaits : Vovelle l'explique (cité pour partie plus haut).

[… On y mesure la très faible pénétration de certaines notions fondamentales des Lumières (la « nature » ne se retrouve guère que … dans les « droits en nature »!) .Doit-on s'en étonner ? La plupart des cahiers reflètent dans leur langage l'univers mental des juristes qui en ont assumé la rédaction...].

Nous sommes devant une rédaction de juristes « éclairés » dont la notion de « nature » n'est comprise que un sens bien spécifique. Que va comprendre le rédacteur s'il est médecin ou autre ?
Les prêtres ont certainement été des acteurs mais il ne faut pas trop en avoir une idée « fantasmée ».
Un mot qui revient souvent concernant ces moments et les différents protagonistes est le mot "défiance". En posant certaines questions, je suis donc bien l'esprit de ce temps de "défiance".

En milieu rural, le laboureur (définition dans wiki) est privilégié (lors des élections donc bien en amont, lors des doléances) au manouvrier.
Vovelle pour avoir une idée de la hiérarchie :
[… le riche laboureur n'a pas besoin d'être propriétaire pour tenir le haut du pavé … Au dessous le petit exploitant appelé « personnier » ou « haricotier » forme la transition avec le groupe des manouvriers, propriétaires parcellaires … Les journaliers sans terre constituent la strate inférieure de cette société.]

Pour avoir une idée des pourcentages, ce lien :
https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1955_num_10_4_2487

Voici pourquoi la "représentation" du Tiers au sein de la société rurale me semble plus que parcellaire.

Je laisse les dernières lignes de votre post : l'analyse un peu "brutale" n'engage que vous...
.

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Message Publié : 24 Août 2022 9:13 
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Rebecca West a écrit :
« devant la population entière, au vu et au su de tous. » : l'expression n'a pas de sens. Comment des personnes ne sachant ni lire ni écrire peuvent-elles contrôler ? Pour le "vu" : peut-être ; le "su" est déjà plus difficile.


Parce que tout était lu à haute et intelligible voix... Vous prenez certains de mes propos au pied de la lettre. Car vous avez une vision "actuelle" de comment se passent les choses. Actuellement, on n'éprouve pas le besoin de lire à haute voix des comptes-rendus de plusieurs pages lors des réunions publiques. Pourtant, c'est ce qui devrait être fait et c'est ce qui est requis dans pas mal de textes.

Comme je l'ai écrit plus haut, on a des témoignages, des comptes-rendus de ces réunions. Faites l'effort d'en lire quelques uns. Essayez de vous mettre à la place de gens de l'époque et de comprendre comment ils fonctionnaient. Ces gens, qui ne savaient pas lire et écrire, avaient des vies où l'on échangeait des biens, où on commerçait, où on se liait par des contrats. Ce n'étaient pas des mineurs ne pouvant pas comprendre le monde dans lequel ils vivaient. Vous prétendez que ce n'est pas comme cela que vous les percevez. Lisez-vous, car dans ce que vous écrivez, c'est bien cela qui transpire. Et c'est bien cela qui signe votre incompréhension. Vous ne voyez pas le mot "charte" dans leur bouche... Pourtant, une bonne partie de leurs vies est gérée par des chartes.

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Message Publié : 24 Août 2022 12:15 
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Pendant longtemps des personnes étaient capables de dire : "j'ai eu la variole". Est-ce pour autant que ces gens comprenaient ce qu'est une infection ? Si oui, le problème aurait été vite éradiqué... :rool:

Quant aux cahiers de doléances, il faut sortir du "tout le monde..." etc. : offrez quelques liens, citez des extraits.
Je vous laisse continuer, vous trouverez bien un contributeur.
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Message Publié : 24 Août 2022 12:23 
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Rebecca, à vous lire, on a l'impression d'une confiscation de la rédaction proprement dite par les métiers juridiques de base.
Ce qui me semble une focalisation excessive. (Nul doute qu'ils étaient là, mais aussi omniprésents ?)

Autre chose : Si on lit bien, vous allez jusqu'à suggérer également qu'un "écrivain public" pourrait improviser hors de ce qu'on lui demande, sans que l'assistance illettrée s'en aperçoive. Je pense que celui qui aurait joué à ça aurait pris un grand risque : il était à la mercie du premier relecteur qui pouvait passer. (Et inutile d'imaginer la colère de l'assemblée, dans ce cas.) De plus, le cas du rédacteur/lecteur unique, seul parmi les illettrés, était-il si fréquent ?

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Message Publié : 24 Août 2022 13:45 
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Pierre de L'Estoile
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La rédaction des cahiers de doléance a été confiée à des personnes qui en avait la capacité. Même aujourd’hui tout le monde ne serait pas capable de rédiger de tels cahiers, a fortiori en 1789 où moins de la moitié de la population savait lire et écrire. Ce n’est pas pour autant que toute la population n’a pas été entendue. Les études historiques tendent à montrer qu’au contraire un très grand soin a été apporté à la consultation de tous, même des membres plus ou moins en marge de la société comme les serfs, les Juifs ou les Protestants. Cet exercice de démocratie populaire, paradoxal sous un régime officiellement de royauté absolue, est resté unique dans l’histoire de la France.

La consultation du Tiers Etat s’est faite en deux temps, d’abord au cours d’assemblées tenues par paroisse, ensuite au cours de délibérations au niveau des bailliages et sénéchaussées où les documents provenant des paroisses ont été synthétisés. On peut toujours discuter de la valeur d’un cahier pris isolément – il en a été rédigé une cinquantaine de milliers – mais, dans l’ensemble, il faut leur reconnaître la qualité d’exprimer la pensée des diverses composantes de la société. Dans une étude de 1906 (https://www.persee.fr/doc/rhmc_0996-2743_1906_num_8_5_4513) il est noté : La plus petite communauté rurale fit un cahier de doléances et, comme, d’une manière générale, le suffrage, au premier degré, était quasiment universel pour les personnes domiciliées, âgées de vingt-cinq ans et inscrites au rôle des impositions, ce fut une consultation de tous les Français.

Il n’y eut aucune pression du gouvernement.

Selon la même étude : Nombre de cahiers furent rédigés selon des modèles pré-établis et par des personnes influentes, souvent avocats, mais conclut cette étude : Ces modèles, ces influences de personnes semblent d’abord affaiblir la sincérité des cahiers ; mais ces modèles ne sont pas aveuglément suivis, ces influences ne s’exercent qu’avec l’assentiment de tous ou de la majorité.


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Message Publié : 24 Août 2022 14:30 
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Localisation : Provinces illyriennes
Merci pour ce rappel éclairé et éclairant du contexte de rédaction des cahiers de doléances Barbetorte.

Ce qui me fait ajouter un point écrit précédemment : devant une telle manifestation de démocratie - dans un régime qui ne l'était absolument pas (mais qui a laissé faire comme vous le rappelez justement) - sur plusieurs mois et à plusieurs échelles territoriales du royaume, on peut comprendre l'énorme déception chez les députés du Tiers (et de certains de la noblesse et du clergé), face à l'attitude conservatrice et intransigeante du monarque et de son Conseil manifestée à l'encontre des représentants du Tiers-Etat du 2 au 6 mai 1789 à Versailles.
Un doute subsiste toutefois : le degré de compréhension de tout ceci par Louis XVI.
N'avait-il vraiment rien vu ni rien compris de ce qu'il se passait depuis l'hiver 1788-1789 dans son royaume ou bien, plus cyniquement, avait-il fait semblant de ne rien comprendre, voire avait très bien compris mais n'en avait cure (on était là pour discuter impôt et un point c'est tout !) ?

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Message Publié : 24 Août 2022 14:56 
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Philippe de Commines
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Duc de Raguse a écrit :
Merci pour ce rappel éclairé et éclairant du contexte de rédaction des cahiers de doléances Barbetorte.

Ce qui me fait ajouter un point écrit précédemment : devant une telle manifestation de démocratie - dans un régime qui ne l'était absolument pas (mais qui a laissé faire comme vous le rappelez justement) - sur plusieurs mois et à plusieurs échelles territoriales du royaume, on peut comprendre l'énorme déception chez les députés du Tiers (et de certains de la noblesse et du clergé), face à l'attitude conservatrice et intransigeante du monarque et de son Conseil manifestée à l'encontre des représentants du Tiers-Etat du 2 au 6 mai 1789 à Versailles.
Un doute subsiste toutefois : le degré de compréhension de tout ceci par Louis XVI.
N'avait-il vraiment rien vu ni rien compris de ce qu'il se passait depuis l'hiver 1788-1789 dans son royaume ou bien, plus cyniquement, avait-il fait semblant de ne rien comprendre, voire avait très bien compris mais n'en avait cure (on était là pour discuter impôt et un point c'est tout !) ?


Après l'échec de Calonne et de son assemblée des notables en 1787, le monarque, aux prises avec les représentants intransigeants des ordres privilégiés, en appelle au peuple : « En 1788, le roi veut construire une alliance avec le peuple afin de faire plier les élites. » C'est bien cette alliance qui plaira à Georges Bernanos, qui, tout royaliste qu'il était, voyait dans 1789 « non pas l'écroulement, mais l'épanouissement de l'ancienne France ». Une monarchie populaire, un rêve qui fera long feu... Louis XVI a peut-être sincèrement souhaité réformer la fiscalité de son royaume, y compris au détriment des ordres privilégiés, mais il n'en n'a pas eu le loisir, dépassé par les évènements de printemps-été 1789. A t'il même vraiment eu le temps de se faire rapporter le contenu des dits cahiers ?

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