Pierma a écrit :
J'ai toujours eu l'impression qu'il y a chez Louis XVI une incapacité à comprendre que le cadre absolutiste dans lequel il a été élevé puisse changer.
Le roi se trouve l'héritier/dépositaire d'une charge qu'il va transmettre ; laisser un royaume dans un état meilleur que celui trouvé, là est son devoir.
Chez Louis XVI, le côté « droit divin » est très présent, surtout l'adjectif "divin". Ceci donne une toute autre dimension à la fonction. Les comptes à rendre seront à Dieu. On le voit lors du sacre, l'homme est changé ensuite. Le livre "
Les deux corps du roi" de Kantorowictz est très intéressant pour aborder ceci.
Je n'ai pas fini la biographie, j'ai donc lu la fin en diagonale. Une chose a attiré mon attention : il ne semble pas être question du décès du Dauphin Louis. Ce décès a dû initier chez le roi de grandes questions. S'il venait à décéder : qui autour du petit duc de Normandie ? Si Louis-Charles décédait, la main passait à Provence : sans enfant. Restait Artois.
Il est à remarquer que chez les souverains les plus endurcis, l'absence de descendance marque souvent une coupure. Le retour aux affaires ne semble plus semblable. Il existe une sorte de démission.
La comparaison avec Louis XIV est souvent présente, au débit de Louis XVI. Cependant, lorsque Louis XIV voit sa descendance s'éteindre, il faut avouer qu'il va y avoir du mou dans la corde. Déjà, en amont, il y a eu la légitimation de ses enfants naturels, ce qui met un peu à mal le lignage (chez les princes, c'est le choc), il y aura le fameux testament qui montre que Louis le Grand avait un peu perdu.
Petitfils évoque un conseiller discutant avec le roi du sort de Charles Ier d'Angleterre et le roi ne tilte pas. Il déplore la chose. Il déplore le décès de ce roi mais reconnaît que le positif ait été que les sujets se soient trouvés plus heureux ainsi. C'est dire son aveuglement.
Vous évoquez l'échec, les échecs. Le problème est qu'un échec est toujours un deuil et, pour se remettre, positiver, analyser lucidement, il faut un certain temps. Louis XVI va en manquer cruellement.
Un roi ne songe pas à « sauver sa tête » (je songe au véritable traumatisme que fut l'abdication de Charles Quint). Il doit transmettre. La recommandation de Louis à son fils : ne pas chercher à le venger. Il reste certain que cet épisode de chaos va cesser et que les choses reprendront leur fil. Une tradition pluri-séculaire ne s'efface pas facilement. Il a dû avoir quelques retours au Temple, retours qui doivent l'ancrer dans sa vision : plus de roi, des nouveautés et rien ne fonctionne. Il faudra un coupable : il est là. Son rapport à Dieu lui fait peut-être appréhender tout ceci comme un dessein divin qui lui échappe.
Ce ne sont que des pistes ; elles restent très discutables.
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