Atlante a écrit :
C'est intéressant, mais j'ai quelques doutes pour la domestication feu. Je croyais savoir que les plus anciennes traces, autour de 750 000 ans, étaient situées sur les bords d'un lac israélien et que les suivantes dataient de 400 000 ans sur un site breton.
En fait, pour le feu c'est compliqué. On utilise de nombreux mots : "domestication", "maîtrise", pour bien montrer qu'il y a des niveaux dans les indices trouvés et à partir de là, on essaye de savoir ce que les gens de l'époque faisaient ou pas.
Bon, aujourd'hui, généralement, on maîtrise bien le feu. On sait l'allumer, l'éteindre à volonté ... enfin, presque parce qu'autrement, nous n'aurions pas besoin de pompiers et de détecteurs d'incendie.
Pour la préhistoire, on sait qu'il y a des traces de foyers très anciennes, mais la trace d'un foyer ne prouve pas une maîtrise ou une domestication. C'est ce qui explique le décalage des dates qu'on trouve dans la littérature entre les "optimistes", ceux qui croient que dès qu'on trouve un charbon cela veut dire que les humains maîtrisaient le feux et les "pessimistes", ceux qui croient que la maîtrise est plus tardive.
Premièrement, sur plusieurs sites on trouve des traces du passage d'humains ou de pré-humains et des traces de combustion. Sans qu'il soit possible de mettre en valeur un lien de causalité entre ces 2 faits.
Deuxièmement, la présence très au nord d'humains ou de pré-humains à certaines périodes donne à penser qu'ils devaient avoir des moyens de se chauffer ou de se maintenir au chaud. Mais, ils étaient peut-être très endurants.
On a trouvé des ossements et des bouts de bois qui avaient été soumis à un feu. Le feu durci les outils en bois, et il permet de fendre les os pour en manger la moelle. Mais, on ignore si c'était une utilisation opportuniste ou liée à un début de domestication du feu. En fait, on trouve des auteurs qui vont soutenir chacune des 2 thèses.
On pense qu'il y a eu plusieurs niveaux dans la domestication du feu. D'abord une période où l'on a cherché à maintenir des feux naturels pour les utiliser. Sûrement, qu'on allumait des torches pendant des incendies naturels et qu'ensuite on a cherché des moyens pour préserver/garder ce feu. Ce n'est pas aussi évident que cela lors des nomadisations. Pour un groupe sédentaire, il suffit d'éviter que de l'eau n'éteigne le foyer et alimenter suffisamment celui-ci pour que le feu ne s'éteigne pas.
Justement, parlons du foyer. Au départ, ça devait être de simples feu de camps : des branchages posés à même le sol qu'on allume grâce à une brindille enflammée.
Mais çà, ce n'est pas un "foyer aménagé". On commence à trouver des indices de foyers aménagés vers -400 000 BP (et encore, les spécialistes ne sont pas tous d'accords). C'est quoi un foyer aménagé ? Et bien, dans la forme la plus simple, on creuse le sol, ou l'on met en place un cercle de pierre ou de bois qui va protéger la base du feu. En fait, le feu se trouve dans une espèce de cuvette ce qui le protège des courants d'airs qui peuvent éteindre les premières flammèches.
Dans un second temps, on va isoler le feu de l'humidité du sol. Donc, on place des pierres au sol et on allume le feu par dessus.
Puis, il y a le problème de la "production" du feu. Presque tous les archéologues sont d'accords là-dessus, au début les premiers utilisateurs du feu se sont contentés de le collecter dans la nature. Mais, dans un second temps, ils sont arrivés à le produire eux-même.
Ce qu'on nomme "domestication" du feu est ce long cheminement qui va des pré-humains qui ont un comportement animal envers le feu en ayant la crainte de celui-ci. Le feu brûle. Ensuite, il y a un premier saut psychologique qui entraîne l'utilisation du feu pour améliorer les outils ou pour cuire des viandes.
Après l'utilisation, on découvre comment garder un feu et maintenir un foyer. Voire, comment améliorer le fonctionnement du foyer.
Et puis, pour finir, on découvre les techniques nécessaires à produire du feu à la demande. La domestication du feu, c'est l'ensemble de ce processus. Pour les archéologues, le challenge, c'est à partir de quelques charbons de bois, quelques pierres calciner de deviner à quel stade de cette domestication se trouvent les gens qui habitaient à tel ou tel endroit.
Citer :
La plus ancienne trace de foyer volontaire est située dans la grotte de l'Escale (Bouches-du-Rhône). Découverte en 1960 au cours des travaux menés par Électricité de France pour l'usine hydro-électrique de Saint-Estève Janson, elle contient des strates, correspondant à un épisode tempéré de la glaciation de Mindel (environ à - 700 000 ans), qui ont livré quelques rares pierres calcaires intentionnellement taillées et cinq à six emplacements de feux. Ils sont étendus, couvrant 2 à 4 m², et le sol, fortement rubéfié, et l'épaisseur des cendres attestent une combustion intense. Ils seraient l’œuvre des Homo erectus européens.
Certains préhistoriens contestent l’ancienneté de ces feux et même qu'ils aient été intentionnels et préfèrent utiliser le critère que représente l'aménagement d'un foyer pour affirmer la présence d'un feu volontaire dans un gisement. Les premières traces de feu entretenues sont datées de - 400 000 ans à Zhoukoudian en Chine. On y a retrouvé de nombreuses pièces en os et des pointes de bois de cerfs, toutes durcies au feu. Ces différents vestiges prouvent que les Sinanthopes ont maîtrisé et entretenu des foyers sur le site. Cela représente une hauteur totale de 6 mètres de cendres, en 4 couches superposées, qui contenaient des charbons, des pierres brûlées et même quelques ossements humains.
D'autres sites présentant des traces de foyers ont également été repertoriés, principalement en Europe : Vertesszöllös (Hongrie), Terra Amata (Nice - France), Lunel Viel (France), Achenheim (Bas Rhin) et à Ménez Drégan (Bretagne- France). D'une manière générale on estime que l'utilisation du feu s'est généralisée en Europe il y a environ - 400 000 ans. Ils seraient l’œuvre des Homo heidelbergensis.
Le plus ancien foyer clairement identifié en France serait Menez-Dregan :
Citer :
La couche 5c a livré une structure constituée de huit pierres disposées en cercle, associée à une concentration de charbon de bois et à quelques silex rougis par l'action du feu. La couche 5e/5 a livré une structure composée de six galets de quartz disposés en arc de cercle entourant une concentration charbonneuse. Des mesures de susceptibilité magnétique indiquent qu'il s'agit d'un foyer dans lequel le feu a été entretenu et localisé. Les sédiments chauffés de ce foyer ont été datés par RPE (369 000 +/- 47 000 ans BP et 396 000 +/- 45 000 BP).
À la base de la séquence, les couches 7 et 9 (465 000 +/- 65 000 ans BP) ont également livré des indices de combustion qui pourraient correspondre à l'une des plus anciennes traces de feu maîtrisé par l'homme.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Menez-Dreganhttp://hominines.portail-svt.com/articles.php?lng=fr&pg=63http://unesdoc.unesco.org/images/0014/001461/146145f.pdfhttp://crdp.ac-amiens.fr/picarcheo/PDFSAMARA/Feu.pdf