Barbetorte a écrit :
J’ai vécu à Strasbourg de 1965 à 175 et j’ai fait toutes mes études secondaires au lycée Kléber.
Je n’ai pas constaté au cours de ces dix ans d’aversion particulière envers les Allemands. En revanche j’ai constaté une certaine aversion en dehors de l’Alsace de la part de personnes suffisamment âgées pour avoir connu l'Occupation. Mais il est possible que je mente ou que, malgré les dix ans que j’ai passés en Alsace, j’ai une méconnaissance totale de ce territoire et de sa population.
Pourriez-vous cesser de rechercher inutilement une polémique et de me faire écrire des choses que je n'ai pas écrites ?
J'ai évoqué une aversion de l'écrasante majorité des Alsaciens pour la période de l'annexion nazie de cette région - c'était le message initial autour des discussions dans les cafés alsaciens des années 1980 que vous jugiez plausibles, mais "choquantes" - et du fait que les Allemands soient le plus souvent malaimés par ceux-ci, justement en souvenir de cette époque.
Merci donc de ne pas me faire écrire ce que je n'ai pas écrit.
D'ailleurs la cuisinière de De Gaulle - votre exemple pour prouver que les "Français de l'intérieur", à la différence des Alsaciens, auraient conservé une rancoeur contre les Allemands -, qui était alsacienne et qui aurait refusé de servir le chancelier Adenauer, me semble un très bon exemple.
Pourquoi ne le citez-vous plus ?
Barbetorte a écrit :
Je mens peut-être en disant que beaucoup d’Alsaciens regardaient la télévision allemande
Personne ne dit que vous mentez, mais cette pratique culturelle très banale ne veut pas pour autant dire que la population alsacienne ne conserve pas un mauvais souvenir de cette période, de l'autorité allemande en général et se montre parfois sur la défensive devant des Allemands. Les souffrances et les humiliations vécues pendant la guerre se sont transmises dans les familles sur plusieurs générations.
C'est autre chose que de regarder des variétés ou des spectacles en langue allemande à la télévision. Le divertissement n'appelle généralement pas la méfiance : le folklore bavarois filmé ne rappelle pas les atrocités nazis.
Ne faites-vous pas la différence ?
Barbetorte a écrit :
Philippe Husser n’enseignait plus en 1940, il avait pris sa retraite en 1928. En 1940 il avait 78 ans.
Il fait tout de même partie du profil de "rallié", "compatible avec le nazisme", comme l'écrivait un autre intervenant plus haut.
Son cas n'est pas forcément représentatif de la majorité de la population de l'époque.
Lisez tous les témoignages (il n'y en a pas un, mais plusieurs dizaines) contenus dans les liens que j'ai placés plus haut pour vous faire une idée.
Je vais tout de même citer le témoignage du médiéviste Francis Rapp sur la terreur qui régnait alors à Strasbourg en 1942 et qui frappait également cette jeunesse alsacienne :
"Des arrestations avaient lieu. Sur ce qui se passait rue Sellénick, dans les locaux de la Gestapo, on racontait des choses effrayantes. Des camarades de classe disparaissaient pour revenir deux ou trois mois plus tard, émaciés, tondus et muets"Pensez-vous, même si le temps leur a fait comprendre que l'Allemagne ne rimait pas systématiquement avec l'hitlérisme (Francis Rapp l'avait également compris lorsqu'il était lycéen), que ces personnes, leur famille, leurs amis, aient pu conserver de la sympathie pour tout ce qui représentait l'Allemagne dans les vingt années qui suivirent l'annexion (voire après) ? En ce sens la réaction de la cuisinière de Charles de Gaulle est plus que symbolique, elle est représentative. Combien de Strasbourgeois ont témoigné après la guerre qu'ils avaient peur du retour des Allemands (ils ne disaient pas nazis), combien ont été terrorisés dans le nord du Bas-Rhin lorsque l'opération
Nordwind avait été déclenchée, que les Allemands rencontraient des succès ponctuels et que les Américains battaient en retraite et voulaient évacuer Strasbourg, d'un retour des Allemands ?
L'être humain est primaire : il ne voit pas de prime abord l'idéologie, il voit avant tout les uniformes, les hommes qui les portent et la langue qu'ils parlent.
Barbetorte a écrit :
D’ailleurs on envoyait à Schirmeck ou au Sruthof tous ceux qui ne plaisaient pas au régime nazi, régionalistes alsaciens compris.
Lorsqu'ils n'ont plus voulu jouer le jeu des nazis, oui, mais pas au départ (encore que il y a eu tellement de cas...), la place Kléber fut débaptisée pour porter le nom de l'un d'entre eux, fusillé par les Français pour espionnage au début du conflit.
Barbetorte a écrit :
Observons que l’état d’esprit des actuels indépendantistes ou régionalistes corses est très voisin de celui des indépendantistes ou régionalistes Alsaciens qui s’exprimaient dans l’entre-deux guerres. On n’est pas obligé de l’adopter mais on ne peut le condamner.
Les pains de plastic et les assassinats en moins et puis il y avait un dégradé chez les autonomistes alsaciens dans l'Entre-deux-Guerres, ils n'allaient pas jusqu'à l'indépendance, ils demandaient seulement l'autonomie au sein de la République.
Barbetorte a écrit :
Ce que je sais en toute certitude est qu’à Strasbourg on pouvait opter en sixième en toute liberté ou pour l’anglais ou pour l’allemand.
J'ai répondu sur la question de l'espagnol que vous avanciez alors comme choix possible au collège, ce qui était impossible alors.
Et le "complexe" scolaire Kléber (qui cumule collège et lycée) n'est pas forcément représentatif du reste de l'Alsace.
Strasbourg, vous répondrons les autonomistes alsaciens, a toujours été la vitrine du conquérant : on y trouvait tout ce qu'il n'y avait pas en dehors, "comme par magie".
Barbetorte a écrit :
Oui, je sais, et alors ? Vous voudriez qu’à Montauban on ait le choix de la langue régionale occitan ou breton ? Cela n’aurait aucun sens. S’il est décidé d’enseigner les langues régionales, on enseigne évidemment la langue régionale du lieu.
L'allemand n'est pas la langue régionale, c'est l'alsacien et elle en diffère malgré la racine commune.
En Bretagne c'est le breton qui est enseigné, en Corse le corse. Allez donc dire à un Corse que sa langue régionale est l'italien (et pourtant c'est aussi proche que l'alsacien de l'allemand)...
Alors pourquoi ces différences d'après vous ?
Un Germain Muller aurait très bien pu vous expliquer, tout comme en quoi l'alsacien n'est pas l'allemand, je vous laisse chercher.
Barbetorte a écrit :
Personne au cours de cette discussion n’a dit ni même simplement insinué que la population alsacienne a regretté le temps de l’annexion. Ne faites pas de faux procès.
Vous n'en étiez pas très loin en citant votre instituteur alsacien, qui avait l'air très complaisant à l'égard des autorités nazies, en tout cas peu choqué d'être redevenu par la force "allemand" en 1940, pour en faire le représentant de la majorité de la population alsacienne :
Barbetorte a écrit :
Philippe Husser, un instituteur né en 1862 et mort en 1851, expose dans son journal (Un Instituteur alsacien. Entre la France et l'Allemagne, journal 1914-1951, 1989) une vision des évènements qui devait être partagée par de nombreux Alsaciens.
Puis dans votre tentative de présenter la population alsacienne moins rancunière à l'encontre de l'Allemagne que les autres Français suite à la Seconde Guerre mondiale, ce qui est également faux :
Barbetorte a écrit :
Les Français ont conservé depuis 1870 et pendant très longtemps une aversion envers les Allemands. Pour ceux qui ont connu la période de l’Occupation, un Allemand est resté un Boche. Un bon exemple nous en est rapporté par les biographes du général de Gaulle : la cuisinière de de Gaulle avait fait savoir qu’elle refuserait de servir le Chancelier Adenauer invité à la Boisserie. J’ai personnellement constaté la survivance de sentiments anti-allemand dans la génération de mes parents. Ayant vécu dix ans en Alsace, je n’ai pas constaté de sentiments similaires de la part des Alsaciens.
Je ne dresse donc aucun procès, je réponds simplement à vos affirmations particulièrement contestables sur certains points.
C'est vous qui êtes revenu plusieurs messages après le mien qui répondait à Pierma sur la question de ces "brèves de comptoir". Je regrette, mais il n'est pas possible de faire des analogies avec la
deutsch qualitat de l'industrie automobile allemande, le
french bashing et l'apologie de l'hitlérisme tout en laissant penser qu'une grande partie de la population alsacienne pouvait penser cela après 1945.
Bref, nous nous sommes expliqués, je pense qu'il n'y a plus désormais d'incompréhensions et que nous pouvons passer à autre chose.
Même si Jerôme a déjà eu sa réponse - sur laquelle nous étions d'accord -, je pense qu'il faut en revenir au sujet initial.
Si vous souhaitez ouvrir une discussion sur l'annexion de l'Alsace-Moselle et de ses conséquences (même mémorielles), n'hésitez pas.