Barbetorte a écrit :
Je ne pense pas du tout que Vatican II ait conduit à l’effondrement de la pratique religieuse parmi les Catholiques. Sans cette réforme, l'effondrement aurait été pire.
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Pour moi il ne fait pas de doute que si l'on avait parlé en latin à l'église, lorsque j'étais gamin, nous aurions mené un cirque infernal à nos parents pour la déserter. (je suis né en 1960) disons à peine passée la "petite communion".
Je suis un peu surpris que les changements liturgiques soient datés par Jérôme de 1970.
Dans le quartier de HLM et de maisons populaires que j'habitais enfant, je peux témoigner que je n'ai jamais entendu la messe en latin. La pratique religieuse, en 67, était encore fermement établie : il y avait une "messe des enfants" dans la chapelle du quartier, par exemple, à 9h00 le dimanche. Ce qui nous bouffait la seule grasse matinée possible de la semaine et où on se rendait donc avec un enthousiasme modéré. Je préférais aller à la messe de 11h00, lorsque mes parents s'y rendaient. (Bien que participant à divers actions chrétiennes, tel que le CPM - la "préparation au mariage" des fiancés - ils n'y allaient pas chaque semaine, ce qui est déjà un signe : ç'aurait été impensable dans notre "village de famille", à 40 km de là.) Circonstance amusante, les HLM et le quartier ayant poussé comme des champignons pour élargir la ville, la grand messe avait lieu, à l'époque,... dans le cinéma du quartier, toujours bondé pour l'occasion. Jamais je n'y ai entendu un seul mot de latin, pas même le "credo". Jamais non plus, je n'ai été mieux assis à la messe !
Surprenante, d'ailleurs, cette pratique encore très présente, dans un quartier semi-populaire (le bas de Montrapon - Besançon est en pentes - groupait plutôt des maisons bourgeoises) dans les années 67 ou 69. Tous les gamins des HLM (où toutes les professions se mélangeaient, à l'époque, et où je n'ai jamais connu une famille arabe) se tapaient non seulement le caté le jeudi matin, mais encore deux séances d'une demi-heure, les mardi et vendredi de 11h45 à 12h15. Sortis de l'école, il fallait dévaler la rue de Fontaine-Ecu, puis ensuite la remonter en courant pour manger avant de retourner à l'école, à 13h45. Alors qu'on avait école le samedi après-midi -jusqu'à fin 69 - on ne risquait pas de s'ennuyer !
En même temps, si on avait voulu nous en dégoûter... (A la même période, mon ex, dans le fin bout du Haut-Doubs, solide bastion religieux, se tapait la messe tous les matins à 7h30, et quand on connait les températures du lieu en hiver...) Il va de soi que les loulous parmi mes copains, futurs ouvriers, s'en sont dispensés assez tôt. Pour moi, qui avais déménagé dans un quartier plus "classe", je me souviens que pendant la "retraite de la communion solennelle" le curé critiquait les gamins qui ne mettaient plus un pied à l'église passée cette étape... ce qui était tout à fait mon intention !
Quand au missel en latin, je témoigne n'en avoir jamais vu un exemplaire, ni en ville ni à la campagne.
@Barbetorte : Pour revenir au sujet, en 63, plus de 2/3 des familles françaises allaient encore chaque dimanche à la messe ! Mais si mon expérience personnelle témoigne d'une résistance très au delà de 65, et même dans un quartier populaire, il a pu en être autrement dans les grandes villes, dans certaines régions très à gauche (dans le sud, par exemple) et bien entendu, définitivement, dans les bastions ouvriers comme le Nord-Pas de Calais.
Donc la date de cassure de 1965 ne me choque pas. Pour ce qui me concerne, j'ai vu la pratique s'effriter progressivement dans mon nouveau quartier, disons entre 72 et 78. Je ne crois pas qu'un seul de mes copains y soit retourné après la Communion, en 74. Mais comme rien jamais n'est si simple, je suis resté plus longtemps parmi les scouts, mouvement catholique, en théorie, puis retourné à la paroisse Saint Louis de Montrapon pour y participer au jumelage avec une paroisse catholique de Dortmund, dans la Ruhr. De bons souvenirs, mais à vrai dire peu religieux. (Ceux des copains qui s'aimaient le plus ont réactivé ce jumelage il y a quelques années, mais je dois dire que nos amis allemands sont autrement plus fidèles que nous à leur foi, et y créent même, pour l'une d'elles, des évènements artistiques très étonnants.)
@Barbetorte : en revanche je pense que vous poussez trop loin l'idée d'un passage total à l'athéisme. Toutes les gradations existent. Il y a une foule de Français qui ont eu, soit par le caté, soit en suivant leurs parents à reculons à la messe, ne serait-ce que pour les baptêmes, mariages et enterrements, quelques bribes d'éducation religieuse, et sont donc plutôt déistes que athées purs et durs. Je suis moi-même resté plutôt croyant (mais en rien de la race liturgique) et mes parents, qui ne pratiquent plus guère qu'à l'occasion, ont gardé une foi réelle. (mais qui ne va pas sans question, ce que je considère comme un signe de bonne santé religieuse : on ne questionne pas une foi inexistante.)
Parmi mes 6 frères et soeurs (je suis l'ainé, donc précurseur familial en tous domaines
) un seul a refusé mordicus de donner la moindre éducation religieuse à ses 4 filles, les autres, et moi-même, n'y voyant pas malice. Mon oncle et parrain, bien que me sachant païen, a baptisé mes deux enfants.
Du coup, lors de son enterrement dans la superbe église moderne Saint Jean à Dole, où s'étaient déplacés son évêque et pratiquement cinquante prêtres du diocèse - c'était une personnalité attachante et chaleureuse - seule une de mes petites nièces a été effarée par le spectacle de tous ces curés en aubes, et a confié son désarroi en sortant :"Pépère, tu trouves pas que c'était bizarre, tous ces curés ?" "Mais pourquoi, bizarre ?" (C'était pour nous très émouvant) "Je sais pas, ça faisait un peu... Comme le Ku Klux Klan, si tu vois ?"
Les athées nous grimpent sur les genoux !
En revanche, parmi les athées, il existe une frange non négligeable très hostile à l'Eglise, foyer d'endoctrinement réactionnaire. Héritage d'une tradition communiste ou anticléricale très vivace et très ancienne en France, mais pas seulement : ce courant s'est étoffé depuis. (J'ai mon fils dans ce courant là, alors qu'il serait volontiers plus réac que moi, mais il a pris les curés en grippe, et ma fille qui est nettement plus croyante que moi : Les voies du Seigneur sont parfois déroutantes.)