Toutes ces interventions sont fascinantes. Il est vraiment très intéressant de se replonger comme ça dans la mémoire, notamment orale, de nos familles. J'y vais donc de ma petite contribution.
Faget a écrit :
J'aimerai avoir des témoignages de familles bourgeoises ou aristocratiques. Qu'ils le fasse sans honte ni mauvaise conscience, sur ce forum on s'efforce
de voir les faits avec un oeil scientifique. Nous ne sommes pas là pour juger. Car, il y a bien des familles qui allaient passer plusieurs mois à Biarritz, Nice , Pau, voire Spa ou Baden-Baden . Sans compter l'hôtel particulier à Paris et le château en Sologne. Où sont-ils passés ?
Pourquoi voulez-vous que l'on ait honte ou mauvaise conscience de descendre de la bourgeoisie? est-ce infamant pour vous?
De mon côté, j'ai grandi dans la fin des années 1980 et 1990, donc je suis tout jeune... et pourtant, je suis dépositaire de pas mal de souvenirs familiaux datant du 19ième siècle. Ainsi, à l'époque, un branche de ma famille se composait de propriétaire fonciers. Ils possédaient une quarantaine d'hectares de terrains dans la Drôme au début du siècle. Il cultivaient les céréales, élèvaient un petit cheptel de brebis, faisaient aussi du vin en quantité. Propriétaires d'un moulin à eau, ils faisaient de la farine. Les produits étaient souvent vendus au marché de la ville et permettaient d'entretenir des relations avec de nombreux autres paysans ou citadins. Au cours du XIXième, ils se lancèrent aussi dans la sériciculture, c'est à dire l'élevage de vers à soie qui rapporta beaucoup à une certaine époque.
Mais à chaque génération, le domaine était partagé entre les fils et se trouvait donc morcelé. A la fin du XIXième, celui qui fut mon arrière grand père ne possédait des anciennes terres de son père plus qu'une quinzaine d'hectares; heureusement, son mariage lui permit d'en acquérir de nouvelles dans d'autres coins de la Drôme.
Ma grand mère a dit que la famille à beaucoup souffert de la crise dans la sériciculture, à partir de la deuxième moitié du XIXième siècle. On dit aussi que le phylloxera toucha la propriété.
J'ai habité dans l'ancienne maison familiale, il y avait une batisse centrale; une citerne y était accolée pour recueillir les eaux de pluie, en plus du puit. Il y avait aussi une porcherie, un grange, une petite écurie, des cages à lapin... sans doute existait-il en plus des poules. Les terres étaient souvent confiées à des fermiers, et comme je l'ai lu ici, les fermiers payaient souvent pour moitié en espèce et pour l'autre moitié en nature: pommes de terre, oeufs, quintaux de blé, un porc par an, etc...
Au début du XXième siècle, mon arrière grand père épousa une femme d'une bourgeoisie plus citadine, qui allait souvent à Cannes et dans les autres villes du sud. Il était capitaine dans la cavalerie, et dut, lui aussi, demander l'autorisation à sa hiérarchie (j'ai une copie de la lettre de demande chez moi). Ce mariage lui permit de retrouver une fortune puisque la famille s'était appauvrie à la fin du XIXième siècle par les différentes crises, notamment agricoles. Malheureusement, une partie de cette fortune s'évanouit dans les emprunts russes, mais cela dépasse le cadre de la belle époque.